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OVIDE (43 av. J.-C. 17 apr. J.-C.)

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L'exil et la survie

Une dizaine d'années après la publication de L'Art d'aimer, Auguste semble découvrir l'immoralité de ce poème et décide d'exiler son auteur. Il s'agit visiblement d'un prétexte destiné à voiler des motifs sur lesquels on a fait beaucoup d'hypothèses et qui sont probablement politico-religieux. En exil, la poésie d'Ovide s'intériorise. Les Tristiaet les Epistulae ex Ponto (ou Pontiques) se présentent comme des épîtres en distiques élégiaques adressées à Auguste, à la femme du poète, à ses amis. On y découvre ce que la poésie du « moi » peut devenir pour un latin privé de l'encadrement romain. Le voyage par mer dans la tempête, la révolte, les prières réitérées, la fidélité et l'infidélité des amis, la rigueur du pays gétique, la lente mais inéluctable perdition dans l'ennui d'un dépaysement trop intense pour être pittoresque, donnent à ces poèmes leur tonalité. Cependant, on y retrouve aussi les souvenirs du passé, de Sulmone, du printemps romain, des connivences littéraires. Tous ces motifs s'imbriquent et se rejoignent en de mélodieuses variations qui ne sont ressassements que pour un lecteur inattentif.

La « gloire » d'Ovide fut celle qu'il attendait. Le Moyen Âge lui fit, particulièrement aux xiie et xiiie siècles, une légende de sagesse et de sainteté quelquefois teintée de magie. On l'a lu, recopié, expliqué, commenté, déformé, interprété, moralisé. Les ouvrages didactiques de langue latine l'utilisent comme une autorité à l'instar de Virgile. Les poètes imitent son style, empruntent sa mythologie et sa connaissance multiforme de l'amour ou du changement. Marbode, Baudri de Bourgueil, Alain de Lille, Boccace, Dante, Chaucer, Marie de France, Chrétien de Troyes, les auteurs du Roman de la rose, etc., lui ont pris des formes et des thèmes comme plus tard l'ont fait les auteurs de la Renaissance, dans toutes les langues. Beaucoup d'artistes, de peintres surtout, se sont souvenus des légendes qu'il avait contées. Certains de ses personnages ont donné leur nom à des complexes ou à des catégories psychologiques... Tout cela a tenu, sans doute, à ce que furent son sens de l'humain et son amour de la poésie.

— Simone VIARRE

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Pour citer cet article

Simone VIARRE. OVIDE (43 av. J.-C. - 17 apr. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • LES MÉTAMORPHOSES, Ovide - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 848 mots
    • 1 média

    Ovide, Publius Ovidius Naso (43 av. J.-C.-17 apr. J.-C.), reprend dans ses Métamorphoses un thème classique de l'Antiquité : le récit des transformations d'hommes en bêtes, en objets inanimés, parfois en forces de la nature. Le texte en est un long poème de douze mille vers, divisé en quinze livres,...

  • ADONE, Giovanni Battista Marino - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 1 038 mots
    • 1 média
    Il convient alors de mesurer à l'aune des règles du récit le contenu narratif de l'Adone, issu pour l'essentiel des Métamorphoses d'Ovide, auxquelles, du reste, Marino accordait le statut de « poésie épique ». La structure narrative de l'Adone peut-être ainsi schématisée : ...
  • GÉOLOGIE - Histoire

    • Écrit par
    • 6 554 mots
    • 5 médias
    ...rythme extrêmement lent à l'échelle humaine, la mer prend tranquillement la place de la terre et vice versa, au long d'une durée infinie. Le poète latin Ovide (43 av. J.-C.-17 apr. J.-C.) développe cette idée des mutations de la géographie dans des vers célèbres des Métamorphoses, où il fait parler...
  • GÓNGORA Y ARGOTE LUIS DE (1561-1627)

    • Écrit par
    • 2 217 mots
    ...rimés ABABABCC). L'argument du poème, souvent adopté par les prédécesseurs de Góngora, tant italiens qu'espagnols, est tiré des Métamorphoses d' Ovide (chant XIII, vers 738-897). À l'image de l'archétype latin, Góngora relate la légende du Cyclope amoureux de Galatée ; Polyphème, dédaigné par la...
  • LITTÉRATURE ÉPISTOLAIRE, notion de

    • Écrit par
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    L'expression littérature épistolaire désigne tout texte qui relève de la situation pragmatique de la correspondance et peut être lu hors de cette situation ; elle paraît ainsi contradictoire : les régimes de vérité de la littérature et de la lettre semblent mal s'accorder. Le premier se trouve...

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