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OUGARIT ou UGARIT

Les mythes

Les mythes les plus importants appartiennent au cycle de Baal ; celui-ci constitue un long poème de deux mille lignes environ dont quinze cents nous sont parvenues. Il se divise en deux parties : les luttes de Baal et de Yam, le dieu de la mer, et les luttes de Baal et de Môt, le dieu de la mort.

Baal et le dieu de la mer

Au début de l'action, le monde divin est dominé par le dieu El, le père des dieux, des années et des hommes, « le bienveillant El qui est compatissant ». Il est représenté comme un vieillard barbu ; son animal attribut est le taureau, symbole de la force ; en fait, El est lointain, inactif et faible. Il habite avec son épouse Ashérat, ses enfants Yam et Baal, et les enfants de ce dernier, à la source des fleuves à la limite des deux abîmes, celui des eaux salées et celui des eaux douces. Le fils bien-aimé de El, probablement son premier-né, celui qu'il a tenu dans ses bras à sa naissance, est le prince Yam, le dieu de la mer qui porte encore le nom de Juge-Fleuve parce que son domaine s'étend aussi sur les eaux douces. Yam n'a point d'épouse. Son adversaire est Baal, appelé aussi Aliyan Baal, prince de la Terre et chevaucheur des nuées. Son associée, la déesse Anat, est vierge, aussi est-elle appelée sœur et vraie fiancée de Baal et non pas son épouse ; elle est la belle-mère des peuples et donne à Baal de nombreux enfants. La tension entre Baal et Yam naît de leur cohabitation, car Baal n'a pas de maison. Aux premières scènes du mythe, Yam, fort de la faveur de El, réclame de l'assemblée des dieux qu'on lui livre Baal et son domaine. À la formulation de cette exigence « les dieux plaquèrent leur tête à leurs genoux et à leurs sièges princiers » ; seul Baal garde son sang-froid, leur reproche leur couardise et se charge de répondre. Malgré cela, El acquiesce à la requête des messagers de Yam. Baal, alors, défend par les armes ses prérogatives : armé d'une massue magique, il s'élance en combat singulier ; Yam résiste ; une nouvelle arme plus efficace encore en main, Baal fonce sur son adversaire, le terrasse et le tue. Les dieux entonnent alors le péan de victoire : « Yam est vraiment mort, c'est Baal qui régnera », et s'assemblent autour du vainqueur en un grand banquet. À l'issue du festin, Anat, saisie d'une frénésie meurtrière, extermine « les peuples du bord de la mer et défait les hommes du Levant [...] ; elle se lave les mains dans le sang des gardes, les doigts dans les entrailles des opposants ». Le monde ainsi purifié, c'est à Baal d'en assurer la fécondité. Pour consacrer cette situation, un temple d'or et d'argent lui est construit sur les hauteurs du Nord, avec une ouverture qui permet au dieu de déverser sur le monde sa pluie, son tonnerre et sa rosée.

L'évocation de ce mythe, comme la mise à mort de Léviathan, fait penser aux grandes cosmogonies babyloniennes et bibliques. Les combats d'Anat avec les peuples du bord de la mer y introduisent peut-être des allusions à des combats anciens contre des envahisseurs marins. Le récit de la construction du temple de Baal en fait le mythe d'une liturgie de dédicace.

Baal et le dieu de la mort

La seconde partie du mythe de Baal est l'expression de l'attitude des Syro-Phéniciens face au caractère inéluctable de la mort. Malgré la défaite des puissances du mal et des fauteurs de troubles, la mort est toujours toute-puissante dans le monde. Cette situation est clairement exposée : peu après l'installation de Baal dans son temple, « les ennemis de Baal occupent les forêts, les adversaires d'Adad les gouffres des montagnes ». Pour mettre un terme à cette occupation malfaisante, le prince de la Terre envoie un messager à Môt, personnification de la mort et dieu du monde infernal, pour lui enjoindre de s'en tenir à son domaine[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut catholique de Paris
  • : agrégée de l'Université (lettres classiques), docteur ès lettres, directeur de recherche émérite au C.N.R.S.

Classification

Pour citer cet article

René LARGEMENT et Marguerite YON. OUGARIT ou UGARIT [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Carte du royaume d'Ougarit au Bronze récent - crédits : Encyclopædia Universalis France

Carte du royaume d'Ougarit au Bronze récent

Tell de Ras Shamra-Ougarit - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tell de Ras Shamra-Ougarit

Autres références

  • BAAL

    • Écrit par Universalis
    • 853 mots

    Divinité adorée dans de nombreuses communautés du Proche-Orient antique, spécialement par les Cananéens, qui semblent en avoir fait un dieu de la fertilité. Le terme sémitique baal (en hébreu, ba‘al) signifiait « possesseur » ou « seigneur », bien qu'on ait pu l'utiliser de façon plus...

  • CHYPRE ANTIQUE

    • Écrit par Jean POUILLOUX, Claude F. A. SCHAEFFER
    • 5 563 mots
    ...chypriote, accordèrent aux rois de ce pays le titre de « frère », comme l'atteste la correspondance diplomatique retrouvée accidentellement à Tell el-Amarna. Dès cette période également, les rois de Chypre entretenaient des relations d'amitié, renforcées par des liens matrimoniaux, avec la maison royale dans...
  • DAGAN ou DAGON

    • Écrit par Daniel ARNAUD
    • 334 mots
    • 1 média

    D'origine inconnue et resté étranger à la culture sumérienne, le dieu Dagan appartient surtout à la religion des anciens sémites. Son nom, qui pourrait signifier « grain », donne une idée médiocre de son importance : il est en réalité à la Syrie ce qu'est Enlil à la Mésopotamie : la...

  • ÉCRITURE (notions de base)

    • Écrit par Universalis
    • 2 596 mots
    • 7 médias
    Les deux premiers alphabets sont inventés au cours de la seconde moitié du IIe millénaire avant J.-C. L’alphabet cunéiforme d’Ugarit, d’usage courant au xive siècle avant J.-C., comprend trente signes. Il est utilisé pour écrire des langues de même famille (araméen, hébreu, ougaritique et...
  • Afficher les 9 références

Voir aussi