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ORIGINES DE L'URBANISME AU PROCHE-ORIENT

Du village à la ville

Certains archéologues manifestent une curieuse propension à vouloir être les inventeurs de la plus ancienne ville du monde, et, tour à tour, tel ou tel site apparaît dans la littérature archéologique en revendiquant ce titre : Jéricho en Palestine, Çatal Hüyük en Anatolie ont ainsi connu cette gloire de façon parfaitement injustifiée, car, quelles qu'aient été l'étendue de ces sites ou la qualité de certaines constructions, comme la tour de pierre de Jéricho dont la fonction réelle reste toujours bien obscure, aucun autre fait précis ne permet de reconnaître des cités dans ces deux sites : la superficie, d'ailleurs estimée plus que connue, et un monument énigmatique ne font pas d'une agglomération une ville avec toutes les caractéristiques qui la définissent.

Tepe Gawra, IV<sup>e</sup> millénaire - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tepe Gawra, IVe millénaire

Ce n'est que dans le courant du IVe millénaire que des traits nouveaux apparaissent, qui permettent de reconnaître dans certains sites les premières étapes vers le stade urbain. Jusqu'alors, les sites actuellement connus ne sont que des villages parce que les habitats y sont toujours de même nature et qu'aucune hiérarchie n'existe entre eux ; l'apparition d'une caractéristique nouvelle, comme le système défensif de Tell es-Sawwan (seconde moitié du VIe millénaire, Irak), montre seulement les modifications lentes mais sûres qui touchent la société néolithique. En revanche, vers 3500 à Tepe Gawra (Irak), en pays assyrien, on observe, pour ce qui n'est encore qu'une très petite agglomération, l'amorce d'une différenciation de l'habitat, phénomène qui reflète sans doute une société plus hiérarchisée qu'auparavant et des fonctions nouvelles, comme celle de magasins ou de réserves, certaines d'entre elles peut-être destinées à la collectivité. On peut attendre de la poursuite de l'exploration archéologique de nouveaux documents qui préciseront les modalités de transformation au cours de cette période charnière, mais, comme l'a remarqué fort justement André Leroi-Gourhan (Le Geste et la parole, p. 242), « ... le passage a certainement été insensible. On peut s'attendre à découvrir des unités semi-urbanisées de plus en plus anciennes jusqu'aux limites de la protoagriculture, mais on ne découvrira probablement jamais la première cité » parce qu'il n'y a jamais eu de première cité, mais une période, longue, au cours de laquelle sont apparues de façon progressive des formes matérielles nouvelles de vie communautaire dont l'aboutissement vers 3 000 est ce que l'on appelle la ville.

Que le passage du village à la ville se soit réalisé par étapes est une façon raisonnable de concevoir l'évolution, mais, comme on l'a vu, les conditions de la recherche archéologique ne permettent pas d'observer le processus sur un site précis, pas plus pour le IVe millénaire que pour l'époque historique : l'étude de la naissance d'une ville ne peut donc se faire qu'à l'aide de concepts théoriques, sauf lorsqu'on a la chance de pouvoir étudier une ville neuve. Mais on ne saurait assimiler création ex nihilo à lente maturation.

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Pour citer cet article

Jean-Claude MARGUERON. ORIGINES DE L'URBANISME AU PROCHE-ORIENT [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 11/09/2014

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-4000 à -2000. Naissance de l'écriture - crédits : Encyclopædia Universalis France

-4000 à -2000. Naissance de l'écriture

Tepe Gawra, IV<sup>e</sup> millénaire - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tepe Gawra, IVe millénaire

Assur - crédits : Encyclopædia Universalis France

Assur