NUCLÉAIRE (PHYSIQUE)Noyau atomique
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La découverte d'un noyau minuscule au centre de l'atome date du début du siècle (Rutherford, 1911), mais c'est celle du neutron (Chadwick, 1932) qui lança la physique nucléaire sur ses bases actuelles. Depuis lors, en effet, on admet qu'un noyau de numéro atomique Z et de nombre de masse A comporte Z protons et N neutrons, le nombre de neutrons N étant égal à A — Z. Ces deux particules du noyau, appelées globalement nucléons, ne diffèrent essentiellement que par leurs propriétés électromagnétiques : toutes deux sont des fermions de spin 1/2 (cf. physique quantique) et leurs masses sont voisines (mpc2 = 938, 28 MeV et mnc2 = 939, 57 MeV), mais le proton porte une charge positive e alors que le neutron a une charge nulle. On reproduit ainsi les caractéristiques élémentaires de tous les noyaux : une charge Ze, une masse voisine de Am et un spin entier ou non selon que le noyau considéré comporte respectivement un nombre pair ou impair de nucléons. Certes, on sait aujourd'hui que les nucléons sont chacun composés de trois quarks mais, comme les énergies mises en jeu dans un noyau sont très faibles à l'échelle des quarks, on peut raisonnablement continuer à les considérer comme les constituants de base du système nucléaire, de même qu'on considère les atomes comme les constituants des gaz rares aux températures ordinaires.
Observé d'une distance atomique de 10–10 m, le noyau ressemblerait à un petit pois vu de 100 mètres : le rayon qu'on lui attribue est de l'ordre de quelques femtomètres (1 fm = 10–15 m), selon la loi approximative R = r0A1/3, avec r0 ≃ 1,2 fm. Pourtant, sa masse vaut à peu près celle de l'atome qui lui correspond, puisque la masse d'un nucléon égale environ deux mille fois celle de l'électron. Sa densité moyenne est donc très élevée : on a ρ = M/V ≃ 2 × 1014 g/cm3, ce qui représente 1038 nucléons/cm3. L'énergie à déployer pour en extraire un nucléon est elle aussi impressionnante, soit en moyenne 8 MeV, c'est-à-dire près de 107 fois plus que l'énergie nécessaire pour délier un électron de l'atome de façon à l'ioniser. On peut y voir la source des performances énergétiques des centrales et des bombes nucléaires (cf. nucléaire). Par exemple, la fission des noyaux d'uranium contenus dans un volume comparable à celui d'un morceau de sucre est capable de fournir autant de calories que la combustion du pétrole remplissant les wagons d'un train de marchandises.
Ces ordres de grandeurs révèlent quelques aspects des forces responsables de la cohésion des noyaux. Tout d'abord, ces forces, dites d'interaction forte, sont beaucoup plus intenses que toutes les autres. En particulier, lorsqu'elles agissent de façon attractive entre deux nucléons, quel que soit leur état de charge électrique, leur intensité est environ mille fois plus grande que celle de la répulsion coulombienne qu'exercent deux protons l'un sur l'autre. En dernière analyse, cette propriété de l'interaction nucléon-nucléon rend compte, pour l'essentiel, de la cohésion du système nucléaire, mais son allure et sa portée jouent aussi un grand rôle. En effet, véhiculé par l'échange de particules massives (les mésons) entre deux nucléons, ce type d'interaction n'entre en jeu que pour de très courtes distances. Par exemple, sa portée la plus longue, associée à l'échange des mésons π, est de l'ordre de 1,5 fm : au-delà de cette distance, deux nucléons, s'ils sont chargés, ne ressentent plus que leur répulsion coulombienne. Il en résulte bien des effets mis en relief par les mesures systématiques de l'énergie de liaison des noyaux : effets de saturation, de surface, de Coulomb, etc.
Les noyaux stables les plus légers ont en moyenne autant de nucléons des deux espèces mais, à cause des forces coulombiennes, les plus lourds comportent un excès de neutrons qui croît avec Z jusqu'à ce que, pour Z ≃ 100, l'émission α et la fission les rendent instables. De ce fait, il n'existe pas d'élément « naturel » dont le nombre de masse soit supérieur à 260 environ. Cependant, on peut produire des éléments « artificiels » par réaction nucléaire. Ceux-ci, comportant un nombre de neutrons ou de protons supérieur à la norme, subissent la radioactivité β— ou β+ respectivement : ils se désintègrent en éme [...]
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Écrit par :
- Luc VALENTIN : professeur à l'Institut de physique nucléaire, université de Paris-VII
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Pour citer l’article
Luc VALENTIN, « NUCLÉAIRE (PHYSIQUE) - Noyau atomique », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 25 janvier 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/nucleaire-physique-noyau-atomique/