Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

NĀDER SHĀH (1688-1747) shāh de Perse (1736-1747)

Roi de Perse. Nāder était un chef de la tribu turkmène des Afshār — du groupe des Qizilbash qui avait contribué à la venue au pouvoir des Séfévides. Une partie de la tribu était établie au Khorāsān où Nāder naquit (à Kubkān, le 22 novembre 1688). Après la prise d'Ispahan par les Afghans (1722), qui mit un terme à la dynastie séfévide, Nāder lutta d'abord de sa propre initiative pour rétablir l'ordre dans le Khorāsān. Lorsque le Séfévide Tahmāsp II, qui avait échappé au siège d'Ispahan, dut se replier sur cette région, Nāder se mit à son service et adopta le surnom de Tahmāsp Qoli (« Esclave de Tahmāsp »). Nāder entra bientôt en rivalité avec le général en chef de Tahmāsp, Fath ‘Ali Khān Qādjār ; cet antagonisme aboutit à l'assassinat politique du chef qādjār (oct. 1726). Prenant l'initiative de la lutte contre les Afghans, Nāder va progressivement étendre son contrôle sur les Abdali de Hérat partagés par leurs dissensions. Puis il vaincra de manière décisive le Ghelzā'i Ashraf — qui contrôle l'Iran central de 1725 à 1729 — à la bataille de Mehmāndust, près de Dāmghān (sept. 1729) ; ce succès de Nāder est dû à une utilisation judicieuse de l'artillerie si négligée par les Séfévides. D'autres batailles lui ouvrirent la route d'Ispahan puis de Chiraz (fin 1729).

Après avoir reçu un brevet de gouverneur du Khorāsān et d'autres vastes régions (Māzandarān, Yazd, Kermān, Sistān), Nāder commença à agir comme souverain indépendant, faisant frapper sa propre monnaie. Puis il reprit aux Ottomans Hamadān et l'Azerbaïdjan (en 1730). Menacé à l'est par les Abdali, il retourna au Khorāsān et reprit Hérat (1732). En son absence, Tahmāsp avait repris l'initiative de la lutte contre les Ottomans. Battu, il dut signer avec ces derniers et avec les Russes des traités défavorables à la Perse. Cela provoque l'indignation de Nāder qui dépose Tahmāsp et met en place son fils ‘Abbās III, un bébé de six mois (juill. 1732). Après avoir réprimé des révoltes tribales, il attaque à nouveau les Ottomans (1733) et doit venir reprendre Chiraz à un chef baloutch (1734). Puis il entreprend de vastes campagnes en Transcaucasie, y bouscule les Ottomans (1734-1735), combat les Lesgi et se trouve opposé au khān de Crimée, au Dāghestān.

Il semble que Nāder ait alors cherché à mettre un terme au vieil antagonisme entre shī'isme et sunnisme en proclamant le mazhab dja'farite (c'est-à-dire se rattachant au sixième imām shī'ite Dja'far al-Sādeq, mort en 765, vénéré par de nombreux sunnites) comme cinquième mazhab (« rite ») sunnite. Cette proposition était la condition à laquelle il accepta de se faire couronner shāh, le 8 mars 1736. Malheureusement, cette attitude conciliante n'apporta pas une réelle détente avec les Ottomans et provoqua une vive réaction de la part des uléma shī'ites irrités de surcroît par la confiscation de biens de main-morte provenant de fondations pieuses (awqāf) pour l'entretien de l'armée.

Pour parachever l'œuvre de rétablissement de la Perse dans ses frontières séfévides, Nāder s'empara de Kandahār (mars 1737) et construisit une nouvelle ville, Nāder-ābād, sur l'emplacement de son camp. En quête de butin pour couvrir les dépenses de ses guerres continuelles, il attaqua l'Inde moghole. Au cours de sa brillante et sanguinaire campagne en Inde (1738-1739), il s'empara de Delhi et des célèbres trésors de la couronne. L'empereur moghol Mohammad Shāh dut lui céder toutes ses provinces au nord et à l'ouest de l'Indus et lui payer un énorme tribut, ce qui lui permit d'exempter les Persans d'impôts pendant trois ans. Après avoir organisé ses possessions indiennes en trois provinces, il s'attaqua au Torkestān et au Khwārazm (1740) puis[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : chargé de recherche au C.N.R.S., chargé de conférences à l'École pratique des hautes études (IVe section)

Classification

Pour citer cet article

Jean CALMARD. NĀDER SHĀH (1688-1747) shāh de Perse (1736-1747) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AFGHANISTAN

    • Écrit par Daniel BALLAND, Gilles DORRONSORO, Universalis, Mir Mohammad Sediq FARHANG, Pierre GENTELLE, Sayed Qassem RESHTIA, Olivier ROY, Francine TISSOT
    • 37 316 mots
    • 19 médias
    ...se préparait à consolider sa position à l'intérieur du pays lorsqu'il se heurta à la personnalité du nouveau commandant des forces iraniennes, le futur Nadir shah. Malgré son courage et sa persévérance, Ashraf fut vaincu, dans une série de rencontres, grâce à la supériorité tactique de son adversaire,...
  • ĀQĀ MOHAMMAD KHĀN ou AGHĀ MUḤAMMAD KHĀN (1742?-1797) shāh de Perse (1796-1797)

    • Écrit par Jean CALMARD
    • 1 094 mots

    Réunificateur de la Perse après la désagrégation de l'empire de Nāder Shāh (1736-1747) et la période troublée de luttes pour la succession de Karim Khān Zand (1750-1779), Āqā Mohammad Khān est le fondateur de la dynastie des Qādjār (1794-1925) sous laquelle la Perse subit des changements...

  • PERSE - Histoire

    • Écrit par Jean CALMARD, Philippe GIGNOUX
    • 8 046 mots
    • 8 médias
    Nāder shāh Afshār (1736-1747), Turkmène du Khorāsān, reconstitua l'intégrité territoriale, envahit l'Inde moghole (sac de Delhi en 1739) et tenta vainement de faire admettre une forme atténuée du shī‘isme duodécimain comme cinquième rite sunnite. Après les années d'anarchie qui suivirent son assassinat,...

Voir aussi