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ĀQĀ MOHAMMAD KHĀN ou AGHĀ MUḤAMMAD KHĀN (1742?-1797) shāh de Perse (1796-1797)

Réunificateur de la Perse après la désagrégation de l'empire de Nāder Shāh (1736-1747) et la période troublée de luttes pour la succession de Karim Khān Zand (1750-1779), Āqā Mohammad Khān est le fondateur de la dynastie des Qādjār (1794-1925) sous laquelle la Perse subit des changements profonds ; d'une monarchie orientale médiévale, elle se transforma en une monarchie constitutionnelle ayant les formes extérieures d'un gouvernement parlementaire représentatif.

Avec d'autres tribus turkmènes, les Qādjār appartenaient au groupe des Qizilbash qui avaient permis aux Séfévides de prendre le pouvoir ; ils avaient servi la dynastie jusqu'à sa chute. Appartenant à la branche qoyunlu (éleveurs de moutons) des Qādjār de Astarābād (moderne Gorgān), les ancêtres directs de Āqā Mohammad Khān avaient continué à servir les Séfévides. Après la prise d'Ispahan, son grand-père Fath ‘Ali Khān fut le général en chef de Tahmāsp II dans la lutte contre les Afghans. Après son assassinat politique à l'instigation de Nāder (1726), son fils Mohammad Hasan, le père de Āqā Mohammad Khān, devint à douze ans le chef des Qādjār qoyunlu. Rebelle à l'autorité des Afshār, Mohammad Hasan utilisa systématiquement les steppes turkmènes comme refuge ; aidé d'éléments turkmènes, il parvint à étendre progressivement son contrôle sur l'Iran septentrional et devint un rival direct de Karim Khān Zand après la mort de Nāder Shāh (1747). Mais les luttes intestines entre clans qoyunlu et develu profitèrent aux Zand et retardèrent la prise du pouvoir par les Qādjār. C'est lors d'une expédition contre Sheykh ‘Ali Khān que Mohammad Hasan trouva la mort en 1759 (peut-être assassiné par un Develu).

Āqā Mohammad Khān naquit à Astarābād (en 1742 ?) dans la maison d'un seyyed qui l'éleva comme son propre fils ; par crainte de Nāder Shāh, son père Mohammad Hasan s'était réfugié dans la steppe turkmène. Après la mort de Nāder Shāh, son neveu ‘Ādel Shāh fit mander Āqā Mohammad Khān au Khorāsān. Il lui épargna la vie, mais le fit castrer (1748) ; cet événement allait profondément marquer le caractère du futur souverain connu pour sa grande cruauté (en proie à des sautes d'humeur allant jusqu'aux crises d'hystérie, il était de surcroît tyrannique, cupide et ambitieux). À la mort de son père (1759), il devint chef des Qādjār qoyunlu. Le gouverneur qoyunlu de Astarābād le cacha avec ses frères dans la steppe. Mais le gouverneur develu réappointé par Karim Khān s'empara des fugitifs et persuada ce dernier de les garder en otages à Chiraz. C'est ainsi que Āqā Mohammad Khān passa une quinzaine d'années à la cour des Zand où il jouissait, semble-t-il, d'une liberté relative et même de l'estime de Karim Khān.

Dès la nouvelle de la mort de ce souverain (1779), Āqā Mohammad Khān s'enfuit de Chiraz pour rejoindre les territoires qādjār. Par des arrangements politiques ou par la lutte armée, il parvint à réconcilier les clans qādjār et à établir son contrôle sur le nord du pays. Puis il entreprit de mettre un terme à la dynastie des Zand auxquels il prit définitivement Ispahan (1786-1787). Contre le dernier des Zand, Lotf ‘Ali Khān (1789-1794), il mena une lutte acharnée entrecoupée de retours vers le Nord pour réprimer des désordres tribaux. Il parvint à prendre Chiraz (1792) grâce à la trahison de son « maire » Hādji Ebrāhim qui devint plus tard son vizir. Ce revirement eut une importance considérable. Désormais, Lotf ‘Ali Khān ne put compter que sur une poignée de fidèles. Parvenu à s'emparer de Kermān, il y est assiégé par Āqā Mohammad Khān pendant quatre mois (1794). Lorsque la ville tombe, Lotf ‘Ali Khān s'en est échappé ; furieux, Āqā Mohammad Khān fait massacrer les habitants (les hommes sont énucléés, les femmes livrées[...]

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Écrit par

  • : chargé de recherche au C.N.R.S., chargé de conférences à l'École pratique des hautes études (IVe section)

Classification

Pour citer cet article

Jean CALMARD. ĀQĀ MOHAMMAD KHĀN ou AGHĀ MUḤAMMAD KHĀN (1742?-1797) shāh de Perse (1796-1797) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DYNASTIE DES QADJAR

    • Écrit par Pascal BURESI
    • 231 mots

    L'accession au trône d'Aghā Muhammad khān marque l'avènement d'une dynastie qui va voir la Perse entrer dans la modernité. Ce chef de la tribu turkmène des Qadjar a conquis le pouvoir en s'appuyant sur des clans arabes et kurdes épars et sur les tribus de sa région d'origine, le Mazandéran. Après...

  • FATH ‘ALI SHĀH (1759/60-1834)

    • Écrit par Jean CALMARD
    • 1 214 mots

    Neveu du fondateur de la dynastie qādjār de Perse, Āqā Mohammad Khān, et second souverain de cette dynastie, Fath ‘Ali Shāh était le fils du chef qādjār qoyunlu Hoseyn Qoli Khān Djahansuz. Né en 1173 de l'hégire (1759-1760), il avait reçu son nom ainsi que son surnom de Bābā Khān en mémoire du...

  • LOTF ALI KHAN (1769-1794)

    • Écrit par Universalis
    • 315 mots

    Dernier prince de la dynastie des Zand, né en 1769 à Chīrāz, en Iran, mort en 1794 à Téhéran.

    À la mort du grand-père de Lotf 'Alī Khān, Karim Khān Zand, une guerre civile qui durera quinze ans (1779-1794) éclate entre ses descendants et Āqā Mohammad Khân, fondateur de la dynastie des Qādjār....

  • QĀDJĀR LES (1794-1925)

    • Écrit par Jean CALMARD
    • 1 311 mots

    C'est avec cette dernière grande dynastie turkmène que l'Iran entre dans le monde moderne et dans le jeu des intérêts stratégiques et économiques des grandes puissances. Ayant pénétré très tôt en Perse (probablement dès l'époque mongole), comme d'autres tribus ...

Voir aussi