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MÉTROLOGIE HISTORIQUE

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Des mesures fonctionnelles

Au cours de l'extraction puis de la transformation des minerais, la matière et les opérateurs changent, les mesures, par leur adaptation aux différentes étapes du changement, rendent compte de la complexité de la chaîne opératoire. Ainsi dans les mines de charbon, où les mineurs avancent le long d'un front de taille, l'abattage au fond était calculé en unités de longueur. Ces mesures de longueur étaient calquées sur le régime agraire, la paume mesurait l'avancement de la taille, une avée désignait la somme de ces avancements en un laps de temps déterminé, considéré comme unité de travail, la quinzaine par exemple, tandis qu'une avrée mesurait la hauteur de la taille. Ces termes informaient l'entrepreneur à la fois sur le rythme du travail ou progression de la taille et sur la puissance du filon, sa hauteur. Ils avaient une signification pour l'ingénieur.

Pour évaluer la production et calculer les salaires, ils perdaient de leur utilité. On les abandonnait au profit d'une mesure de capacité, le « panier », qui tenait de 220 à 250 livres. Pour la remontée au jour, on versait quatre paniers dans un conteneur appelé muid qui portait 1 000 livres. En Languedoc, on empruntait le vocabulaire métrique au mesurage du vin. Les mines de Carmaux avaient adopté la barrique de 18 quintaux de 100 livres, la pipe et le muid, la France de l'Est avait la « queue ». Dans la France de l'Ouest, la pipe valait 10 rasières, cette dernière d'une capacité de 64 litres pesait environ 150 livres et servait au calcul de la rémunération des mineurs de fer. La sidérurgie montagnarde du Dauphiné comme les forges catalanes de l'Ariège préféraient utiliser la benne de 120 livres ou la charge, qui en faisait le double. On retrouvait dans ces pays de montagne, en même temps que la contrainte des modes de transport, deux mesures adaptées au portage par bête de somme.

Enfin, au gueulard du fourneau, les ouvriers utilisaient le panier de 120 livres pour déverser le minerai dans le fourneau où chauffait la prochaine coulée de fonte. Il est à présumer que deux hommes pour ménager leur endurance maniaient ce panier. Toujours, en effet, les mesures tenaient compte de la productivité du travail.

Les anciennes mesures étaient donc des signes chargés de sens. Celui-ci, fondé sur le caractère spécifique de toute action humaine, était enraciné dans les conditions et les effets du travail, si bien que l'important, aujourd'hui, n'est pas de les convertir en équivalents métriques – ce pour quoi le système métrique décimal se révèle inadapté –, mais de déceler leur contenu social.

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Écrit par

  • : professeur émérite des universités de Venise et Lille, directeur de recherche émérite (C.N.R.S. Paris)

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Pour citer cet article

Jean Claude HOCQUET. MÉTROLOGIE HISTORIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 08/07/2019

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