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MÉTROLOGIE HISTORIQUE

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Les mesures de longueur et de surface

Pied, pouce, etc., les plus anciennes mesures furent anthropométriques, l'homme s'érigeant en mesure de toutes choses. Il était commode de confronter la longueur de tout bien au pouce, à l'empan, à la coudée, au pied, au pas ou à la brasse, et il était déjà scientifique d'introduire entre ces mesures empruntées au corps humain tout un système simple de rapports arithmétiques, multiples ou sous-multiples, entiers, ne reposant pas sur des fractions. Ainsi l'empan a quatre valeurs, selon qu'il mesure l'écart entre le pouce et l'un ou l'autre des quatre doigts. Mais sa mesure est toujours égale à 1/8 de la brasse, qui mesure l'écartement des bras jusqu'aux poignets, ou aux mains fermées, ou à l'extrémité du médius, ou enfin du médius tendu, bras levé, au sol. À ces quatre mesures de la brasse, et de l'empan, correspondaient aussi quatre mesures de la coudée, car ces trois mesures de longueur entraient dans un système fondé sur les nombres 1, 4 et 8, où chaque brasse correspondait à 4 coudées et 8 empans. Ces systèmes de compte prévalaient bien avant le Moyen Âge, la perfection et l'équilibre des monuments que nous ont laissés les anciennes civilisations, depuis les pyramides ou le Parthénon jusqu'aux cathédrales gothiques ou aux églises baroques, reflètent aussi cette harmonie des nombres. Les systèmes métriques prédécimaux ont magnifiquement servi le travail de l'homme. Ils se caractérisaient, se distinguaient mieux par leurs rapports de groupement et de division que par les grandeurs absolues des mesures qui les constituaient. On fut bien en peine en effet de dégager des étalons (standards) pour ces mesures du corps humain : l'esprit chrétien aurait aimé choisir les mensurations du Christ ; de façon plus réaliste, on s'en tint à celles du roi, à défaut de toujours bien connaître les caractéristiques physiques du plus illustre des souverains médiévaux, l'empereur Charlemagne, mais longtemps on utilisa le pied de Charlemagne à côté du pied du roi, comme mesures royales de longueur.

On préférait cependant souvent évaluer la superficie d'une terre cultivée non par ses mesures géométriques, mais par la quantité de grains nécessaire à son ensemencement ou par les récoltes espérées. La nature et la richesse des terroirs aboutissaient alors à créer des valeurs différentes, selon la loi des rendements décroissants. On semait plus dru les bonnes terres fertiles susceptibles de procurer de meilleurs rendements. Une bicherée de bonne terre, ensemencée d'un bichet de grain, occupait dans certaines régions une surface d'un cinquième inférieure à celle d'une terre médiocre et elle-même inférieure d'un sixième à une mauvaise ou légère. Plus la terre était pauvre, plus l'unité de surface exprimée en quantité de semailles était étendue. Le morcellement physique du paysage agraire distribué dans la grande majorité des terroirs entre fonds de vallée, coteaux et plateaux, aux sols divers plus ou moins exposés aux intempéries et à l'ensoleillement, contribuait aussi à l'instabilité des mesures dans un même village. Or très tôt on prit conscience de la nécessité de l'alignement des mesures locales et, par conséquent, on commença d'abandonner les mesures fondées sur des critères subjectifs. En Lorraine, on garda par exemple le jour, qui devint une mesure conventionnelle normalisée, uniformisée entre les seigneuries, c'est-à-dire une mesure géométriquement précise, mesurée à la toise ou verge. L'hommée perdit aussi son caractère concret et devint un sous-multiple du jour, dont elle représenta le dixième. Cette adaptation n'était possible que dans un cadre social précis : en fait le jour ou journal avait longtemps été lié à la corvée[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite des universités de Venise et Lille, directeur de recherche émérite (C.N.R.S. Paris)

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Pour citer cet article

Jean Claude HOCQUET. MÉTROLOGIE HISTORIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 08/07/2019

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