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FICIN MARSILE (1433-1499)

La sagesse d'un pèlerin

Si le visage d'une « puissance suréminente et divine » se reflète dans le visible à travers les miroirs de plus en plus troubles de l'ange, de l'homme et de la matière qualifiée, si le microcosme humain est bien le lieu où la lumière universelle trouve son expression harmonieuse, entre l'éblouissement de la plénitude et le morcellement de la matérialité, la condition mixte de l'homme lui interdit de se perdre en de pures rêveries. Médecin autant que poète, Ficin, dans ses Trois Livres de la vie, assigne au pèlerin terrestre trois guides célestes : Mercure, Phébus et Vénus ; trois fonctions psychiques : Volonté, Entendement, Mémoire ; trois guides humains : le père charnel, le précepteur spirituel, le médecin du corps. Pour éviter la mélancolie propre aux gens de lettres (mercuriens), les excès du désir vénérien qui « gâtent l'estomac et les parties nobles », il faut suivre les mouvements mêmes du Soleil, se lever avec lui et profiter pleinement de ses premiers rayons, les plus bénéfiques. On doit éviter le vin, la viande de bœuf, le gibier, les fromages fermentés, les lentilles, la moutarde, tout ce qui est « noir », la colère, la solitude, user des bains, écouter la musique, se promener à travers les prés fleuris, « à l'air libre » et en pleine lumière. Le quinquagénaire fuira les femmes, l'ombre crépusculaire, et se nourrira de jaunes d'œuf, dont l'or vient du Soleil. Mais avant tout, à chacun de ses âges et suivant sa fonction, que chaque humain se conforme à son génie naturel, et use selon sa vocation des dons que lui prodiguent les astres, les pierres et les images.

Ficin n'est pas un optimiste béat ; il craint les mauvais présages, les feux follets et la foudre sur Florence qui annonce la chute des Médicis ; mais, à la différence de Luther, il n'a jamais rencontré Satan face à face. La grâce pour lui est plutôt illumination et union que pardon immérité du pécheur. C'est la « vision de sa propre lumière » qui attire l'âme vers sa patrie perdue et l'ouvre à la béatitude.

— Maurice de GANDILLAC

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université de Paris-I
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis et Maurice de GANDILLAC. FICIN MARSILE (1433-1499) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Ange Politien, fresque de C. Rosselli - crédits : G. Nimatallah/ De Agostini/ Getty Images

Ange Politien, fresque de C. Rosselli

Autres références

  • LE BANQUET, Platon - Fiche de lecture

    • Écrit par François TRÉMOLIÈRES
    • 992 mots
    • 1 média
    La postérité du Banquet doit beaucoup à sa traduction latine par le Florentin Marsile Ficin (1433-1499) et surtout au Commentarium in Convivium Platonis de amore qui l'accompagnait, publié en 1484. Le Commentaire fixe les grands thèmes d'une « théologie platonicienne » accordée au christianisme...
  • HERMÉTISME

    • Écrit par Sylvain MATTON
    • 4 971 mots
    • 1 média
    C'est en 1460 environ qu'un moine apporta de Macédoine à Florence un manuscrit du Corpus Hermeticum. En 1463, Cosme de Médicis demanda à Marsile Ficin de le traduire en latin, et ce avant même de traduire Platon. Dans la Préface à sa traduction, Ficin, se référant à saint Augustin, fait d'Hermès...
  • MICROCOSME ET MACROCOSME

    • Écrit par Hélène VÉDRINE
    • 4 283 mots
    • 1 média
    ...décider s'il veut s'égaler au héros ou au pourceau. Dans sa Théologie platonicienne (Theologia platonica, 1482 ; trad. R. Marcel, Paris, 1964-1965), Marsile Ficin décrit avec enthousiasme les puissances de l'âme. Celle-ci n'imite plus passivement le macrocosme, mais elle se définit par ses capacités...
  • ART ET HUMANISME À FLORENCE AU TEMPS DE LAURENT LE MAGNIFIQUE, André Chastel - Fiche de lecture

    • Écrit par Martine VASSELIN
    • 1 018 mots
    • 1 média
    ...mages), figures de l'esprit et de la poésie (Pallas et les Muses), figures de la beauté et de l'amour, éléments clés de la « mystique » néo-platonicienne. André Chastel extrait des textes ficiniens les éléments d'une philosophie du beau et de l'art qui se diffusèrent dans la société florentine sous des formes...

Voir aussi