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MARABOUTISME

Les chorfa

Le mot chorfa est la forme dialectale de shurafā', pluriel de sharīf (chérif). Ce sont les descendants du Prophète et de sa fille Fāṭima (Fatma). Ce qu'on a dit sur les chaînes initiatiques remontant à ‘Alī explique l'importance qu'ils ont prise. Si certaines familles, comme les Idrīsides et plus tard les Filaliens et les Sa‘diens, ont donné naissance à des dynasties qui ont régné sur le Maroc, beaucoup de ces « nobles » étaient de pauvres gens qui s'adonnaient à la recherche de la sainteté. Mais leur qualité leur conférait un grand prestige. On les appelait du titre de moulay (classique mawlāya), alors que sīdī (classique sayyidī, abrégé en quand on s'adresse à un lettré) s'emploie pour tous les saints. On connaît le sanctuaire de Moulay Idris à Fez. Mais la « vogue » des chorfa encouragea d'une part la fabrication de fausses généalogies et d'autre part elle favorisa la formation de lignées de chorfa qui ne descendaient que d'un murābiṭ notoire, mais non chérif. Le mouvement fut tel que certaines tribus reléguèrent le nom ancestral pour prendre celui d'un marabout, chérif réel ou supposé. On les a appelées tribus maraboutiques.

Cette importance des chorfa est due également à la part que prirent ces familles, surtout au xvie siècle, à la lutte contre les infidèles espagnols et portugais. Leur baraka était un gage de victoire, comme au temps du Prophète de qui ils la tenaient. Il ne faut donc pas s'étonner que l'idée shi‘te du Maḥdi, le maître de l'Heure, qui doit, à la fin des temps, faire régner la justice et rétablir le culte pur de l'islam, ait reparu dans ce milieu sunnite du Maghreb. Plusieurs légendes indiquent l'endroit d'un lieu maraboutique où le Maḥdi apparaîtra. L'idéal du maḥdisme explique le rôle religieux, social et politique joué par les marabouts.

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Roger ARNALDEZ. MARABOUTISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AFRIQUE NOIRE (Culture et société) - Religions

    • Écrit par Marc PIAULT
    • 9 619 mots
    • 1 média
    L'islam noir est marqué par l'importance du «  maraboutisme » et des confréries. Les fidèles se réunissent et vivent autour d'un personnage savant et saint qui les instruit et maintient une collectivité pieuse de subsistance. Les confréries ont joué un rôle comparable à celui des sociétés initiatiques...
  • GAMBIE

    • Écrit par Christian COULON, Universalis
    • 3 892 mots
    • 2 médias
    ...autorités traditionnelles pour cible. Ce mouvement posa de graves problèmes au pouvoir colonial. Ces conflits sont connus sous le nom de guerres Soninkés- Marabouts : le premier terme désignant les princes mandingues et le second les réformateurs musulmans. Dans le royaume de Kombo, l'action des marabouts...
  • MAURITANIE

    • Écrit par Jean-Louis BALANS, Pierre BOILLEY, François BOST, Universalis
    • 10 190 mots
    • 5 médias
    ...sont « guerrières » – les Hassanes réputées d'origine arabe, mais aussi quelques tribus berbères qui ont protégé ou reconquis leur autonomie –, les autres « maraboutiques », en principe d'origine berbère, mais non exclusivement. La séparation entre les deux ordres est statutaire et fonctionnelle. Elle reproduit,...
  • SÉNÉGAL

    • Écrit par François BOST, Universalis, Vincent FOUCHER
    • 10 071 mots
    • 8 médias
    ...l'islam maraboutique qui, bien qu'anciennement établi en Afrique de l'Ouest, était resté limité. Dans le contexte d'effervescence socio-politique, des marabouts pacifiques réussissent là où leurs prédécesseurs, avec leurs méthodes guerrières et prédatrices, avaient échoué. Ils procèdent à des conversions...

Voir aussi