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MAHOMET ou MUḤAMMAD (571?-632)

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La secte mekkoise

Muḥammad prit l'habitude de faire des retraites, à l'instar des ascètes chrétiens et de leurs imitateurs arabes, dans une caverne d'une montagne proche. Il y méditait en s'y livrant à des pratiques d'ascétisme. Un jour, vers l'an 610, il eut une vision « comme le surgissement de l'aube », il entendit une voix, il vit, selon la tradition, l'archange Gabriel (Djibrīl en arabe) qui lui transmettait des paroles de Dieu.

D'abord effrayé, suspectant un piège de Satan, il s'habitua peu à peu à recevoir ces paroles, il les répéta à son entourage et, plus tard, les dicta à un secrétaire. C'est leur notation écrite, plus tard mise en ordre, qui devait former le Coran (en arabe qur'ān, « récitation »). On a pu reconstituer plus ou moins la chronologie des révélations (sans aucun rapport avec l'ordre canonique du livre tel qu'on l'édita plus tard). Au début, en un langage saccadé, sonore, ardent, la voix d'En-Haut dénonçait surtout les riches et les puissants, les marchands mekkois fiers de leurs fortunes, avides d'en jouir. On les adjure de se soumettre au Créateur unique et tout-puissant, Allāh, qui leur demandera des comptes au jour terrible du jugement. Ils devront suivre les conseils du modeste « avertisseur » qu'est Muḥammad, se montrer humbles et justes, donner une part de leurs biens aux pauvres et aux orphelins.

L'appel de Muḥammad convainquit d'abord sa maisonnée et quelques amis, puis d'autres Mekkois de condition modeste, parmi les frustrés, les humiliés, avec aussi des jeunes animés d'un esprit de révolte contre leur milieu. Autour de lui se forma une petite secte se livrant à des pratiques de piété, suscitant l'ironie, le mépris ou parfois la compassion.

Le passage à l'hostilité déclarée semble avoir suivi une tentative (ou une apparence de tentative) faite par Muḥammad, inconsciemment semble-t-il, pour regagner l'estime de ses concitoyens en accordant quelque place à des divinités locales à côté d'Allāh (littéralement « la divinité ») que les Arabes reconnaissaient déjà comme un dieu parmi d'autres. Sa rétractation après cette tentative parut une déclaration de guerre aux dieux, au sanctuaire, aux valeurs et aux intérêts de la cité. Il se posait en seul interprète autorisé des volontés divines, prétention dangereuse même sur le plan temporel.

Une persécution suivit qui frappa surtout les faibles de la secte, alors que les membres importants (dont Muḥammad lui-même) étaient protégés par leurs clans, même opposés à leurs idées. La pensée du Prophète se développait. Les révélations insistaient maintenant dans un style narratif et plus calme sur les récits bibliques. L'accent était mis sur les prophètes du passé qui avaient été méconnus par les leurs, les gens importants de leur peuple. Le groupe était désigné du nom de musulmans (en arabe muslimūn, « ceux qui remettent leur âme à Allāh »). Il se distinguait par la pratique de la ṣalāt, « prière rituelle », en fait ensemble fixé de prosternations, d'inclinations et d'invocations que le croyant accomplit plusieurs fois par jour en hommage au Créateur en se tournant vers Jérusalem selon la coutume juive et chrétienne.

Certains fidèles émigrèrent en Éthiopie chrétienne où ils furent bien accueillis. On pressentait peut-être une catastrophe cosmique, aube des derniers jours. Les événements mondiaux qui rappelaient des prophéties anciennes impressionnaient les esprits. Les Perses avaient envahi l'Empire romain d'Orient, prenaient la ville sainte de Jérusalem (614) et menaçaient Constantinople.

En 619 moururent coup sur coup deux protecteurs de Muḥammad : son oncle Abū Ṭālib et sa femme-mère Khadīdja. Abū Ṭālib fut remplacé à la tête du clan de Hāshim par un autre oncle,[...]

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)

Classification

Pour citer cet article

Maxime RODINSON. MAHOMET ou MUḤAMMAD (571?-632) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Mahomet - crédits : VISIOARS/ AKG-images

Mahomet

Autres références

  • ABŪ BAKR (570 env.-634)

    • Écrit par
    • 1 049 mots

    Premier calife musulman, ami, beau-père et successeur du Prophète Mahomet ‘Abd Allāh, Abū Bakr reçut le surnom de ‘Atīq (affranchi), puis celui d'al-Siddīq (le crédule), parce qu'il aurait été le premier à avoir cru immédiatement à l'histoire du voyage nocturne de Mahomet à ...

  • AÏCHA (614-678)

    • Écrit par
    • 327 mots

    Troisième femme et épouse préférée du prophète Mahomet, le fondateur de l'islam. '̄A'isha Bint Abī Bakr, née en 614 à La Mecque, morte en 678 à Médine, joue un rôle politique non négligeable après la mort de son mari.

    Tous les mariages de Mahomet sont motivés par des intérêts...

  • ALAOUITES ou NUṢAYRĪS

    • Écrit par
    • 1 297 mots

    La secte shī‘ite des Nuṣayrīs (An-Nuṣayriyya), qu'on appelle plus couramment Alaouites (Alawites), représente environ 11 p. 100 de la population syrienne. Elle est implantée principalement dans la région montagneuse du djebel Anṣariyya (anciennement as-Summāk), au nord de l'est côtier du pays....

  • ‘ALĪ IBN ABĪ ṬĀLIB (600 env.-661)

    • Écrit par
    • 664 mots

    Cousin de Muḥammad, et l'un des premiers convertis à l'islam. En 623 (ou 624), ‘Alī épouse Fāṭima, fille du Prophète et de sa première épouse, Khadīdja. À la mort du Prophète, en 632, il ne lui succède pas à la tête de la communauté : ce n'est qu'en 656 qu'il sera élu calife. La légende et...

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