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LEÓN LUIS DE (1528-1591)

Fray Luis de León, « le cygne du Tormes », qu'on a appelé « le Fénelon de l'Espagne », admiré par Bossuet et par Cervantes, est le représentant le plus typique de la Renaissance dans la péninsule Ibérique, car il a fait la synthèse du lyrisme et de la pensée philosophico-théologique. Dans ce siècle de transition, où la tension s'exaspérait entre le naturalisme anthropocentrique et le fidéisme protestant, le maître de Salamanque repensa toute la scolastique à la lumière de l'humanisme (particulièrement érasmien, comme l'a deviné Marcel Bataillon) et de l'exégèse scripturaire. Âme horatienne et virgilienne, disciplinée par le stoïcisme, nourrie des prophètes d'Israël et pétrie d'ardeur chrétienne, il a apporté au problème de son temps une réponse déjà œcuménique, en faisant appel au « concert » (concierto), qui accorde les hommes sur certaines valeurs fondamentales : Dieu, la nature, l'art, la fraternité.

Un philosophe-poète, cible de l'Inquisition

D'ascendance partiellement juive, Luis de León, de l'ordre des Augustins, écouta à Salamanque Melchor Cano, Juan de Guevara et Domingo de Soto ; à Alcalá, il eut pour maître l'orientaliste Cipriano de la Huerga. Professeur de théologie à Salamanque, de 1560 à sa mort, il fut emprisonné par l'Inquisition, de 1572 à 1576 ; on lui reprochait de privilégier le texte hébraïque de l'Écriture, d'avoir traduit en castillan le Cantique des cantiques et d'entretenir des relations avec les « judaïsants ». Acquitté, il devint définiteur, éditeur de sainte Thérèse et provincial, en dépit d'un second procès d'hétérodoxie en 1582. Son chef-d'œuvre, Des noms du Christ (De los nombres de Cristo, 1583), est un gros traité (sous forme de dialogues, dans un cadre champêtre) sur quatorze noms attribués au Christ dans la Bible : Rejeton, Face de Dieu, Chemin, Pasteur, Montagne, Père du siècle futur, Bras de Dieu, Roi, Prince de la Paix, Époux, Fils de Dieu, Aimé, Jésus, Agneau. Ses autres ouvrages en espagnol sont : le Commentaire de Job (Exposición del Libro de Job), le Commentaire du Cantique des cantiques (Exposición del Cantar de los Cantares), La Parfaite Mariée (La Perfecta Casada) et des Poèmes (Poesías) qui font de lui l'un des plus purs classiques du Siècle d'or. Ses copieux travaux latins, inédits jusqu'à notre époque, sont notamment un De Incarnatione, un De Fide et un De Praedestinatione.

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Toulouse-Le-Mirail

Classification

Pour citer cet article

Alain GUY. LEÓN LUIS DE (1528-1591) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ESPAGNE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par Jean CASSOU, Corinne CRISTINI, Jean-Pierre RESSOT
    • 13 749 mots
    • 4 médias
    ...cet immense domaine, qui est aussi caractéristique de l'Espagne que celui du réalisme picaresque, sinon du réalisme tout court, on retrouve d'abord fray Luis de León, maître platonisant, voire hébraïsant, plein de sagesse et de rayonnante humanité, auteur, outre ses poésies, de traités comme Les...

Voir aussi