Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

LIBÉRATION, France (1944-1946)

Le choix démocratique (1945-1946)

Partis

En dépit des espoirs caressés par leurs chefs, le temps des mouvements de résistance est passé, celui des forces politiques légitimes revient. Le Mouvement de libération nationale (M.L.N.), issu de la résistance non communiste, et le Front national (F.N.) sont satellisés. Le parti le plus tôt reconstitué et de loin le plus puissant est le P.C. Fort de plusieurs millions de sympathisants (et plus de 500 000 adhérents revendiqués en 1945), il anime une nébuleuse d'organisations, dont le F.N., et contrôle une grande partie de la C.G.T. S'il n'a pas rompu avec la tactique de débordement adoptée durant la clandestinité, il accepte peu à peu de mettre son activisme en conformité avec sa participation au gouvernement. Pour préserver et élargir les positions conquises à la Libération, le P.C. rend prioritaire la stratégie de large front électoral. Elle est servie par le F.N. qui intègre des modérés, radicaux ou catholiques, et propose la fusion au M.L.N. À la fin de janvier 1945, la majorité du congrès du M.L.N. fait échouer le projet. Tiraillée entre les proches de la S.F.I.O. et les partisans de l'autonomie, elle opte finalement pour sa transformation en un parti charnière hétérogène, l'Union démocratique et socialiste de la Résistance (U.D.S.R.). La S.F.I.O., qui est l'un des piliers du nouveau pouvoir, a une attitude ambivalente. D'abord sévère vis-à-vis de ses cadres qui n'ont pas donné de gages résistants, elle se montre plus conciliante ensuite pour conserver des positions électorales. Face au P.C. dont elle refuse la main tendue, elle tend à camper sur des positions « de gauche ». Son congrès de novembre 1944 refuse l'option du travaillisme à la française et l'ouverture vers des résistants venus des mouvements. Il pâtit vite dans l'opinion de la contradiction entre un discours radical et une pratique qui ne l'est pas. Se voulant lui aussi révolutionnaire, un nouveau parti, le Mouvement républicain populaire (M.R.P.) se constitue en novembre 1944 à partir de la mouvance résistante démocrate-chrétienne et de syndicalistes chrétiens. Cette force catholique neuve, la régénération de la S.F.I.O. et du P.C., l'affaiblissement des radicaux (assimilés à une force du passé), la disqualification de la droite par suite de la compromission de ses principales instances avec Vichy, l'émergence d'une nouvelle génération de responsables caractérisent un changement politique bien plus profond qu'il n'est souvent dit.

Élections

Le choix de rétablir la démocratie dans ses formes traditionnelles correspond aux attentes du pays et d'une grande partie des résistants. Dès l'automne de 1944, le calendrier électoral a été fixé, non sans débats, pour savoir s'il fallait attendre la fin de la guerre et le retour des prisonniers, requis et déportés.

Les élections municipales ont lieu les 29 avril et 13 mai 1945 alors que les rescapés des « camps de la mort » (2 500 sur 76 000 « déportés raciaux », juifs essentiellement, et 37 000 sur les 88 000 autres) commencent à arriver, mais avant le retour des 2 millions et demi de Français qui se trouvaient encore en Allemagne. Pour la première fois, les femmes – et les militaires – peuvent voter. Le résultat de ces élections constitue un succès incontestable pour les forces issues de la Résistance. Les communistes, champions de la liste unique, élargissent leur implantation à des dimensions sans commune mesure avec celle d'avant guerre. Dans les zones ouvrières et urbaines, ils font reculer les socialistes. En dépit de leurs succès dans les vieilles terres, plutôt rurales et radicales, du Midi, ceux-ci, qui se voyaient vainqueurs, sont déçus. Le M.R.P., encore balbutiant, étonne par des succès inattendus dans l'Ouest, mais aussi à Paris ou dans le Nord. Les élections cantonales de la fin septembre[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Jean-Marie GUILLON. LIBÉRATION, France (1944-1946) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Omaha Beach, 7 juin 1944 - crédits : Wall/ MPI /Getty Images

Omaha Beach, 7 juin 1944

Le général Leclerc à Paris, 25 août 1944 - crédits : National Archives, Washington, D.C.

Le général Leclerc à Paris, 25 août 1944

Charles de Gaulle, 26 août 1944 - crédits : Ralph Morse/ The LIFE Picture Collection/ Getty Images

Charles de Gaulle, 26 août 1944

Autres références

  • BECKER JEAN-JACQUES (1928-2023)

    • Écrit par Erwan LE GALL
    • 920 mots

    Historien français né le 14 mai 1928, Jean-Jacques Becker est l’auteur de travaux sur la Première Guerre mondiale faisant référence. Spécialiste de l’opinion, sa contribution à l’histoire politique de la France du xxe siècle est également importante. Nommé maître assistant à Nanterre...

  • BILLOTTE PIERRE (1906-1992)

    • Écrit par Charles-Louis FOULON
    • 867 mots
    • 3 médias

    Né à Paris le 8 mars 1906, Pierre Billotte, saint-cyrien à vingt ans, suit un parcours militaire classique. Lieutenant en 1930, élève de l'École supérieure de guerre de 1934 à 1936, le commandant Billotte est blessé pendant la campagne de France et fait prisonnier. Évadé d'Allemagne par l'U.R.S.S.,...

  • BOUCHINET-SERREULLES CLAUDE (1912-2000)

    • Écrit par Charles-Louis FOULON
    • 679 mots

    Claude Bouchinet-Serreulles, fils d'industriel, né le 26 janvier 1912 à Paris, licencié en droit et diplômé de l'École libre des sciences politiques, avait observé les méfaits du nazisme en 1937-1938 lorsqu'il avait été attaché du conseiller commercial à Berlin. Officier d'ordonnance...

  • BUCKMASTER MAURICE (1902-1992)

    • Écrit par Charles-Louis FOULON
    • 909 mots
    • 1 média

    De 1941 à 1945, le colonel Buckmaster est entré dans l'histoire et la légende de la Résistance française et des services secrets britanniques ; il fut, en effet, chef de la section française du Special Operations Executive (S.O.E.) qui devait « mettre l'Europe en feu » à la demande de ...

  • Afficher les 22 références

Voir aussi