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CAP LE

Une métropole en mutation

Le Cap n'est ni un port important, ni une ville industrielle (seul le textile y est développé), mais une capitale politique (capitale législative du pays car siège du Parlement sud-africain et capitale de la riche province du Cap-Ouest) et une métropole tertiaire de renommée internationale qui a su profiter de son rythme saisonnier inversé par rapport aux métropoles du Nord. Son attractivité touristique est considérable (plus de 5 millions de touristes en 2005). Le centre-ville moderne (larges avenues, trottoirs, immeubles et gratte-ciel...) est complété par le complexe commercial du waterfront, ancienne zone portuaire réaménagée. Non loin à l'est reste cependant visible la marque d'un traumatisme urbain de l'époque de l'apartheid : le quartier de District Six, qui abritait une population mélangée et était célèbre pour sa vie culturelle intense, rasé entre 1965 et 1982, est encore en 2006 à l'état de terrain vague. Au sud du centre, les banlieues résidentielles, naguère réservées aux Blancs, s'étendent de part et d'autre de la célèbre montagne de la Table, avec des vues splendides sur l'océan pour les villas les plus luxueuses. Plus vers le nord et le nord-ouest, d'immenses quartiers de lotissements dotés de centres commerciaux sont occupés par les classes moyennes.

La métropole du Cap souffre des mêmes difficultés que les autres villes sud-africaines : éclatement spatial, éloignement entre emplois et lieux de résidence, inégalités sociales et raciales, pauvreté et sous-équipement de la ville noire.

Comme ailleurs, le gouvernement nationaliste de l'apartheid avait imposé une séparation stricte des groupes. Les non-Blancs furent cantonnés dans les Cape Flats, au sud-ouest de la ville, une vaste zone plane, sableuse et balayée par les vents. Aujourd'hui, ils forment les quartiers populaires non-blancs du Cap, reliés par chemin de fer aux zones d'emploi : le centre-ville, le port et les zones industrielles de Milnerton, Woodstock et Pinelands. La construction de Mitchells Plain, à partir de 1974, au sud des Cape Flats, à proximité de l'océan Indien, sur 3 100 hectares et à 27 kilomètres du centre-ville, donna naissance à une vaste cité-dortoir pour coloured. Sur le même site, en 1983, des terrains furent attribués aux Noirs, donnant naissance au quartier de Khayelistsha, dont seule une partie fut équipée et construite ; par manque de moyens, le reste est une mer de baraques précaires abritant une population de plus de 350 000 habitants (2005). Les Cape Flats sont aujourd'hui une des zones urbaines les plus difficiles du pays, criminalité et délinquance juvénile y sont extrêmement fortes, de même que les tensions raciales entre communautés.

Le Cap est certainement à un tournant de son histoire. La majorité de la population de l'agglomération appartient encore au groupe dit coloured (« coloré »), de langue maternelle afrikaans. Cela explique l'originalité politique de la ville, seule métropole du pays à n'être pas gouvernée par l'A.N.C. Mais les migrations de populations noires venues des anciens bantoustans sont en train de modifier cette structure démographique. Cette évolution rend de plus en plus cruciale la nécessité d'assurer tout à la fois le maintien du dynamisme économique d'un secteur tertiaire mondialisé (dont les activités liées au tourisme) et la réduction de la pauvreté et des inégalités.

— Philippe GERVAIS-LAMBONY

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire, université du Cap (Afrique du Sud), ancien vice-recteur
  • : professeur à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense

Classification

Pour citer cet article

Éric AXELSON et Philippe GERVAIS-LAMBONY. CAP LE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Afrique du Sud : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Afrique du Sud : carte administrative

Autres références

  • AFRIQUE (Histoire) - De l'entrée dans l'histoire à la période contemporaine

    • Écrit par Hubert DESCHAMPS, Jean DEVISSE, Henri MÉDARD
    • 9 654 mots
    • 6 médias
    ...navale ; les navigateurs néerlandais, qui ont remplacé largement les Portugais dans le commerce des épices asiatiques, fondent, en 1652, une colonie au Cap ; de là, leur influence gagne vers l'est, repoussant ou absorbant les Khoisan, jusqu'à ce que, au xviiie siècle, le contact direct soit...
  • AFRIQUE AUSTRALE

    • Écrit par Jeanne VIVET
    • 6 100 mots
    • 5 médias
    ...avec Goa et Macao. Sur la côte atlantique, les Portugais créent la ville de Luanda en 1575 tandis qu'au sud, les Hollandais fondent la colonie du Cap en 1652, qui sera prise par les Britanniques en 1806 en raison de sa position stratégique sur la route des Indes. Elle devient une colonie de peuplement...
  • AFRIQUE DU SUD RÉPUBLIQUE D' ou AFRIQUE DU SUD

    • Écrit par Ivan CROUZEL, Dominique DARBON, Benoît DUPIN, Universalis, Philippe GERVAIS-LAMBONY, Philippe-Joseph SALAZAR, Jean SÉVRY, Ernst VAN HEERDEN
    • 29 784 mots
    • 28 médias
    Originale par son milieu méditerranéen, la province du Cap-Ouest l'est également par sa population, qui appartient en majorité au groupe Coloured.Près des trois quarts des 6,8 millions d'habitants de la province sont concentrés dans la métropole du Cap, cœur économique et politique de la région,...
  • RHODES CECIL JOHN (1853-1902)

    • Écrit par Roland MARX
    • 1 119 mots
    • 2 médias

    Homme d'affaires brillant et grand homme d'État britannique, apôtre de l'expansionnisme colonial, nouveau conquistador, philanthrope, Cecil Rhodes a été aussi passionnément admiré que vilipendé. Fils d'un pasteur anglican, cinquième d'une famille de onze enfants, né dans le Hertfordshire, de constitution...

Voir aussi