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KITAN ou KHITAN

900 à 1000. Morcellement - crédits : Encyclopædia Universalis France

900 à 1000. Morcellement

Ancien peuple de pasteurs nomades protomongols, connu depuis le ive siècle, qu'on trouve installé à la fin du viiie siècle sur le territoire des actuelles Mongolie-Intérieure et république populaire de Mongolie. En 926, son chef Abaoji (872-926, du clan Yelü), qui s'était proclamé empereur une vingtaine d'années auparavant (907) et avait depuis lors soumis l'extrême nord de la Chine (nord du Hebei et du Shānxi), s'étend dans la région du Liaodong (Mandchourie méridionale) par la conquête du royaume toungouso-coréen de Bohai. Les Kitan adoptent en 937 le nom dynastique chinois de Liao (947-1125), tiré du nom de la région où ils viennent de s'établir. Depuis leur capitale Yanjing, implantée en 936 sur le site de l'actuelle Pékin, ils lancent de redoutables raids de razzia contre les dynasties éphémères de la Chine du Nord (époque dite des Cinq Dynasties). Les Song, qui réunifient la Chine à partir de 960, tentent en vain d'arracher aux Kitan les terres chinoises qu'ils occupent ; ils sont finalement contraints d'acheter une paix souvent précaire par le versement d'un tribut annuel en soies et en argent, coûteux et humiliant (traité de Shanyuan, 1004). Au tournant du xie siècle, l'empire Liao, qui s'étend de la mer du Japon jusqu'au Turkestan, compte approximativement, selon les estimations du principal spécialiste occidental de l'histoire kitan, Karl A. Wittfogel, 750 000 sujets Kitan, groupés en tribus que commande une aristocratie héréditaire, 2 400 000 sujets chinois, 450 000 sujets bohai, 200 000 sujets d'ethnies diverses. Ce sont les Liao qui vont forger le modèle d'organisation politique et sociale dualiste propre aux dynasties de conquête ultérieures : dynasties jürčen, mongole des Yuan, mandchoue des Qing.

En 1124-1125, les Jürčen, tungus ou protomandchous originaires des forêts sauvages de la Mandchourie, détruisent l'empire Liao avec le soutien des Song. Un membre du clan impérial, Yelü Dashi (1130-1142), réussit à s'enfuir vers l'ouest, suivi d'un petit groupe de partisans, et fonde au Turkestan oriental, avec l'aide d'une colonie de 16 000 familles kitan qui y était déjà installée, un nouvel empire : Qara-Kitai ou Xi Liao (« Liao occidental »). Le prestige de l'empire Kitan et de son rejeton, le Qara-Kitai, a été immense en son temps ; à tel point que le nom de Kitai (une forme dérivée de Kitan) est resté en certaines langues, ainsi en russe (et en vieil anglais sous la forme Cathay), pour désigner la Chine même.

Les Kitan ont créé deux écritures démarquées des caractères chinois mais, à la différence de ceux-ci, phonétiques par syllabes la « grande écriture » (inventée en 920) , et la « petite écriture » (datant de 924), transmise par quelques inscriptionsdécouvertes à partir de 1923, qui comporte 370 caractères inspirés de l'alphabet uighur. Les Kitan, convertis au bouddhisme lorsqu'ils se sinisent, ont originellement des rites et des coutumes très riches qui se rattachent à un vieux fonds turco-mongol ; un texte chinois qui les décrit a été traduit en français par R. Askin. L'art de la Chine du Nord de cette époque est profondément marqué par leur influence (céramiques et fresques murales surtout, d'un style très particulier). Nombre de Kitan, qui ont été incorporés dans l'empire des Jin se rallieront de bonne heure à Gengis-khān et l'aideront tant à conquérir la Chine du Nord qu'à en comprendre la civilisation (rôle de Yelü Chucai).

— Françoise AUBIN

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Écrit par

  • : directeur de recherche au C.N.R.S. et à la Fondation nationale des sciences politiques (C.E.R.I)

Classification

Pour citer cet article

Françoise AUBIN. KITAN ou KHITAN [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

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Autres références

  • CHINE - Histoire jusqu'en 1949

    • Écrit par Jean CHESNEAUX, Jacques GERNET
    • 44 594 mots
    • 50 médias
    Un empire dont les classes dirigeantes sont d'origine Kitan et se rattachent au groupe mongol se constitue dans le courant du xe siècle en Mongolie orientale et en Mandchourie. Il prendra en 986 le nom d'empire des Liao et dominera au xie siècle toute la zone des steppes, cherchant à imposer sa...
  • CORÉE - Histoire

    • Écrit par Universalis, Jin-Mieung LI, Ogg LI, Madeleine PAUL-DAVID
    • 6 282 mots
    • 13 médias
    Le début de l'histoire de Koryŏ, qui a donné, par la suite, le nom de Corée, est marqué par les invasions des Kitan, c'est-à-dire la dynastie chinoise des Liao (907-1125). Après avoir réussi à repousser les attaques des Kitan à deux reprises, en 993 et 1010, Koryŏ fut finalement obligé de concéder...
  • JURCHEN ou JÜRČEN

    • Écrit par Françoise AUBIN
    • 555 mots
    • 2 médias

    Ancien peuple de chasseurs forestiers semi-nomades tungus (ou protomandchous), originaire de la Mandchourie orientale. Connu depuis le viie siècle, les Jürčen sont assujettis à un peuple protomongol, les Kitan, depuis la fondation de la dynastie Liao dans le nord de la Chine et en Mandchourie....

  • MONGOLIE, histoire

    • Écrit par Françoise AUBIN, Vadime ELISSEEFF
    • 17 572 mots
    • 20 médias
    ...1211, à l'ouest, les Qarluq et autres peuples turcs des rives de l'Ili et du lac Balkhaš, alors sous domination qarakitai ; enfin, en 1212, à l'est, les Kitan, peuple sinisé de race mongole, qui avaient conquis le nord de la Chine au xe siècle, sous le nom dynastique de Liao, avant d'être assujettis aux...
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Voir aussi