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INTENDANTS

Extension de l'institution

De 1624 à 1639, le montant des dépenses militaires françaises (aide extérieure comprise) passe de 9 millions de livres à près de 24 millions : « Élargie à l'échelle européenne, la guerre de Trente Ans se présente comme une guerre d'argent annonciatrice des conflits modernes » (G. Livet).

Les recherches d'E. Esmonin et R. Mousnier permettent de situer le moment précis où les deux types d'intendants se superposent en une institution unique. Dès 1634, des commissaires sont chargés de faire rentrer le maximum d'argent en évitant, si possible, les injustices trop flagrantes. La crise financière de 1637 provoque l'extension du système à l'ensemble de la France. Non que les choses soient d'emblée nettes : tout le développement ultérieur, de 1637 à 1648, est affaire de temps, de lieux, de moments et de personnes. Les révoltes populaires, qui ne sont pas sans rapport avec l'accroissement brutal de la pression fiscale royale se superposant aux anciens prélèvements (nobiliaires, etc.), aboutissent au renforcement de l'autorité des intendants de justice. En quinze ans, comme le notait en 1648 l'avocat général au parlement de Paris, Omer Talon, l'emprise de l'autorité centrale s'est donc brutalement renforcée au détriment des puissances publiques traditionnelles, et, surtout, des officiers. Cet état de fait ne pouvait manquer de susciter une réaction de défense.

Sous la pression des événements et, principalement, de la coalition des intérêts des officiers soutenus par les parlements, Mazarin est obligé de supprimer provisoirement les intendants par les déclarations de juillet et d'octobre 1648, faisant droit aux requêtes présentées par la Chambre Saint-Louis. La Fronde matée, on essaya de revenir à la situation antérieure. Suivant les habitudes de l'Ancien Régime, l'interdiction officielle fut maintenue jusqu'en 1789. Mazarin, toujours prudent, utilisa divers subterfuges juridiques : envois de commissaires par lettres de cachet, remise en pratique des chevauchées des maîtres de requêtes, etc. D'où de violentes réactions ; les membres des bureaux des finances, en particulier, ne furent définitivement réduits au silence qu'au début du gouvernement personnel de Louis XIV, en 1661.

Contrairement à ce qui a été parfois avancé, Colbert, comme avant lui Richelieu, a longtemps hésité sur la forme à donner à l'intendance. Au début, le ministre penchait encore pour une durée très limitée de la commission. Il semble que l'expérience pratique acquise en Alsace, et ailleurs, par Colbert de Croissy ait été décisive. À partir de 1670, progressivement, chaque généralité se voit dotée d'« un intendant régulièrement remplacé après la mutation ou le rappel de celui qui se trouvait en place » (M. Bordes). La guerre maritime franco-anglaise conduisit, en 1689, à étendre l'institution à la dernière province qui en « manquait », la Bretagne.

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Rennes

Classification

Pour citer cet article

Jean MEYER. INTENDANTS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANCIEN RÉGIME

    • Écrit par Jean MEYER
    • 19 103 mots
    • 3 médias
    ...décompte approximatif de la population française. Mais la question, noyée d'ailleurs dans un fort long et disparate questionnaire, ne reçut aucune réponse. Les intendants pouvaient sans difficultés faire le relevé des membres des parlements que le ministre demandait. Ils n'avaient, en revanche, aucune idée,...
  • BERTIER DE SAUVIGNY LOUIS BÉNIGNE FRANÇOIS (1737-1789)

    • Écrit par Guillaume de BERTHIER DE SAUVIGNY
    • 286 mots

    Maître des requêtes en 1763, Louis Bertier de Sauvigny devient l'adjoint de son père, Louis Jean, qui avait été nommé intendant de la généralité de Paris en 1744, et il lui succède, en 1771, lorsque Louis Jean est appelé par Louis XV à la présidence du parlement Maupeou. Sous son...

  • COMMISSAIRE ROYAL

    • Écrit par Solange MARIN
    • 347 mots

    Sous l'Ancien Régime, le commissaire royal est un personnage commis ou mandaté par le roi pour faire exécuter ses décisions en un moment donné et en un point précis du territoire. Le but de la mission et les moyens à employer pour l'accomplir sont consignés dans des lettres de commission délivrées...

  • ÉLECTION PAYS D'

    • Écrit par Frédéric BLUCHE
    • 333 mots

    Dans la France de l'Ancien Régime, l'élection était une juridiction de l'impôt, symbole même des progrès de l'administration royale directe. Plusieurs élections formaient une généralité. Les pays d'élection, soumis à la taille personnelle et à tous les impôts royaux ordinaires, s'opposaient...

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Voir aussi