Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

INDEXATION

L'indexation matières

On peut dire que la plupart des problèmes techniques de l'indexation par auteur sont à présent résolus, mais c'est loin d'être le cas pour les systèmes d'indexation matières ou de classification. On en parle depuis l'Antiquité, mais le premier philosophe moderne qui ait exercé une influence considérable fut Francis Bacon, dont le système se fondait sur les trois fonctions intellectuelles : la mémoire, l'imagination et la raison. Ce système exerça une profonde influence sur la grande Encyclopédie, comme le reconnaît Diderot dans sa Préface. Gabriel Naudé, bibliothécaire de la Mazarine, déclarait que, pour disposer les livres dans une bibliothèque, le meilleur ordre serait « le plus facile, le moins intrigué, le plus naturel, usité, et qui suit les facultés de théologie, médecine, jurisprudence, histoire, philosophie, mathématiques, humanité ». Tous les systèmes ultérieurs se sont fondés sur le principe du « plus facile » ; quant au « plus naturel », il opère une synthèse entre l'approche baconienne des facultés mentales et l'approche scolastique des disciplines traditionnelles sur lesquelles sont fondées les universités.

L'index auteurs représente un accès facile et naturel aux documents d'une collection, mais l'index matières soulève difficultés et controverses. D'abord, le choix des noms des sujets implique une définition de ceux-ci, or les définitions ne font pas toujours l'objet d'un accord unanime, surtout d'un pays à l'autre ; ensuite, les progrès de la connaissance risquent de changer les rapports entre sujets. Les systèmes de classification reflètent les théories de la connaissance en vigueur à leur époque ; il peut donc arriver qu'un nouveau système plus satisfaisant rende bientôt périmés les systèmes existants. Pour qu'un système réussisse, il faut qu'il présente un fondement théorique reconnaissable ; les utilisateurs s'apercevront ainsi qu'il a un sens pour eux. Les systèmes fondés sur les disciplines universitaires ont un sens parce qu'ils expriment la façon dont leur époque se représente l'organisation des connaissances humaines ; mais, en contrepartie, ils n'abordent qu'avec précaution les idées nouvelles. Cette timidité se trouve aggravée dans les bibliothèques parce que le reclassement d'un nombre élevé de documents est une entreprise importante et coûteuse. On est donc tenté de faire figurer les connaissances nouvelles dans des cadres existants ; mais après cela il n'est plus ni facile ni naturel d'y accéder. Tel est le problème qui préoccupait Melvil Dewey, dans la chapelle de Amherst College (Massachusetts) en 1873, quand une intuition lui vint à l'esprit : il s'agissait de subdiviser les sujets de façon hiérarchique per genus et differentiam et d'uniformiser le rangement des livres dans les rayons en attribuant à chaque sujet un nombre suivant une notation décimale fractionnaire. Ainsi, l'ordre des documents refléterait la manière dont les savants, notamment dans les « sciences classificatoires », étudiaient leur discipline et y réfléchissaient. La première édition de la classification décimale de Dewey (D.D.C.), en 1876, expose que le système a été conçu pour les besoins du catalogage et de l'indexation, mais qu'on a constaté qu'il servait aussi fort bien à numéroter et à ranger les livres et brochures dans les rayonnages. On a appelé « ordre baconien inversé » l'ordre dans lequel se succèdent les classes : Philosophie, Religion, puis Sciences, Littérature et Arts, Histoire et Géographie. Ce système a connu un succès considérable dans les bibliothèques du monde entier, et un bureau chargé de le réviser dépend de la bibliothèque du Congrès qui, comme la B.N.B. (Bibliographie nationale britannique), incorpore dans ses notices MARC les[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : (formerly) director of central library services and Goldsmith'Librarian, University of London, England.
  • : agrégé de l'Université, docteur en linguistique

Classification

Pour citer cet article

Douglas J. FOSKETT et Jacques MANIEZ. INDEXATION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Maison des sciences de l'homme - crédits : C. Mouly

Maison des sciences de l'homme

SYNTOL - crédits : Encyclopædia Universalis France

SYNTOL

Algèbre de Boole - crédits : Planeta Actimedia S.A.© Encyclopædia Universalis France pour la version française.

Algèbre de Boole

Autres références

  • BIBLIOTHÈQUES NUMÉRIQUES

    • Écrit par Yannick MAIGNIEN
    • 5 198 mots
    • 1 média
    Les bibliothèques trouvent ici une confirmation de leur vocation première : à savoir décrire et signaler les collections,indexer leur contenu, tenir des bases d'autorité concernant une discipline ou un auteur, classer les documents dans des systèmes normés (Décimal, Dewey) et encyclopédiques....
  • HUMANITÉS NUMÉRIQUES

    • Écrit par Thierry POIBEAU
    • 5 371 mots
    • 2 médias
    ...souvent considéré comme le père du domaine des humanités numériques (Jones, 2018). Dès 1949, il a lancé en partenariat avec la société IBM un projet de création d’index autour de l’œuvre de saint Thomas d’Aquin, appelé l’Index thomisticus. Plus récemment, il a été souligné, à juste titre, que...
  • MOTEURS DE RECHERCHE

    • Écrit par Brigitte SIMONNOT
    • 4 130 mots
    • 2 médias
    Les pages Web collectées sont analysées par un logiciel qui procède à leur indexation. L'indexation consiste à caractériser les pages par des mots clés pour permettre de les retrouver. Dans le cas des moteurs de recherche, l'extraction de mots ou de groupes de mots à partir des documents est automatisée....
  • MOYEN ÂGE - La pensée médiévale

    • Écrit par Alain de LIBERA
    • 22 212 mots
    ...Saint-Cher, les dominicains de Saint-Jacques mettent en chantier une grande Concordance de la Bible(achevée vers 1240), véritable ouvrage de référence, où chaque mot est indexé du nom du livre dans lequel il est employé, d'un numéro de chapitre, enfin d'une lettre (de A à G) y notant sa place relative....

Voir aussi