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IGNACE DE LOYOLA saint (1491-1556)

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Le mystique

Il faut d'abord rattacher Ignace de Loyola à l' Espagne du xvie siècle, pays où la longue lutte contre les musulmans avait engendré la piété ardente d'un peuple justement fier de son Église. Celle-ci avait entrepris sa propre réforme, grâce au cardinal Cisneros, à une époque où le nom de Luther était encore inconnu. Tout au long du xvie siècle, la solidité théologique de l'Espagne face à la Réforme, la vigueur de l'élan mystique qui se manifesta dans le pays de Thérèse de Jésus, la netteté des interventions espagnoles au concile de Trente témoignèrent de la vitalité de l'Église ibérique – vitalité qui n'allait pas sans beaucoup d'intolérance. Ignace fut l'un des plus authentiques représentants de la ferveur catholique de l'Espagne. On a trop souvent décrit l'organisateur méthodique et longtemps oublié l'homme qui, dans sa jeunesse, fut, comme la sainte d'Ávila, passionné par les romans de chevalerie. La lecture, au cours de sa convalescence, de la Légende dorée lui donna le désir de réaliser des prouesses religieuses et de devenir un chevalier de Dieu. D'où les mortifications surhumaines qu'il s'imposa au cours des années héroïques de Manresa. Il y renonça par la suite et ne songea jamais à les prescrire à ses disciples.

Tempérament exigeant, il était ouvert aux joies de l'amitié et savait à l'occasion faire preuve d'humour. Sans être un humaniste, il était loin d'être inaccessible à la beauté et, s'il avait suivi ses seules préférences, il aurait maintenu le chant choral et la musique religieuse, qu'il affectionnait, dans la vie quotidienne de la Compagnie. Il était sensible aussi à la souffrance d'autrui, visitait fréquemment les malades, n'oubliait jamais les absents. Dans la prière, cette sensibilité extrême se manifesta par le « don des larmes » (phénomène qu'on rencontre chez d'autres mystiques, mais qui fut particulièrement intense chez lui). Il faillit en devenir aveugle. Il crut longtemps que, s'il cessait de pleurer, les consolations spirituelles dont il était favorisé disparaîtraient aussi. Il reçut, dès l'époque de Manresa et ensuite tout au long de sa vie, de nombreuses illuminations, révélations et « visions ». Toutefois, il ne prétendait pas apercevoir ces « visions » avec les yeux de la chair, mais avec les yeux intérieurs, c'est-à-dire avec ceux de l'entendement. Son compagnon Pierre Canisius déclara à ce propos : « Jamais je ne dirai absolument : il a eu des illuminations, mais plutôt : il a eu de remarquables et nombreuses connaissances des choses divines. » Ces grands élans de ferveur accompagnés d'une extraordinaire allégresse l'empêchaient parfois de parler, de dormir, de faire oraison et de se livrer à toute forme d'activité, au point qu'à la fin de sa vie il se fit dispenser de la lecture du bréviaire.

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Pour citer cet article

Jean DELUMEAU et Encyclopædia Universalis. IGNACE DE LOYOLA saint (1491-1556) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • FONDATION DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS

    • Écrit par
    • 210 mots
    • 1 média

    La Compagnie de Jésus s'inscrit dans le mouvement de fondation des sociétés de clercs réguliers qui associent l'apostolat de tous les jours à la régularité de la vie religieuse encadrée par des vœux mais sans les obligations de la vie conventuelle. Ignace de Loyola transcrit son...

  • JÉSUITES ou COMPAGNIE DE JÉSUS

    • Écrit par et
    • 4 390 mots
    • 1 média
    ...péjorative. Appeler quelqu'un jesuita équivalait à le traiter de « faux Jésus », donc d'hypocrite. Quatre ans après la création de l'institut d'Ignace de Loyola, Canisius écrivait qu'en Allemagne lui-même et ses disciples étaient qualifiés de « jésuites » dans un esprit de médisance. Le...
  • MISSIONS

    • Écrit par , , et
    • 17 266 mots
    • 6 médias
    ...xviie siècles, les monarchies européennes renforcent leurs caractères centralisateurs et absolutistes. L' obéissance devient une vertu clé : Ignace de Loyola en particulier et d'autres avec lui insistent sur la totale disponibilité des sujets au bon plaisir des supérieurs qui les envoient ;...
  • ORDRES RELIGIEUX

    • Écrit par
    • 3 241 mots
    ...d'érasmisme dans les premières démarches de son fondateur n'est pas étrangère aux difficultés rencontrées par la Compagnie de Jésus naissante. En fait, Ignace de Loyola se veut d'autant plus traditionnel qu'il se sent novateur. Si l'attachement personnel à Jésus-Christ Sauveur est au cœur de son charisme,...