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HILAIRE DE POITIERS (315 env.-env. 367)

Le retour en Gaule

À peine revenu d'exil, Hilaire vit encore une fois tout l'horizon de la scène politique se transformer. À Lutèce, pendant l'été 360, Julien fut proclamé empereur par ses troupes et, l'année suivante, celles-ci s'avancèrent le long du Danube à la rencontre des armées de Constance. L'Occident échappait ainsi à l'emprise de la politique religieuse de l'empereur d'Orient. Répondant à une lettre des évêques orientaux reçue par Hilaire, le concile de Paris, réuni au cours de l'été 360, proclama le « consubstantiel » nicéen et condamna Ursace, Valens et Saturnin. Hilaire lui-même avait composé en cette même année un virulent pamphlet Contra Constantium, dans lequel l'empereur était traité d'Antéchrist à cause de sa politique religieuse.

C'est après son retour d'exil qu'Hilaire adapta pour le public latin certains commentaires d'Origène sur les Psaumes et sur Job, et peut-être aussi qu'il rédigea alors ce petit traité de typologie qui s'intitule Tractatus mysteriorum.

Cependant les luttes religieuses n'étaient pas terminées. Hilaire fit déposer les évêques du parti d'Ursace et Valens, notamment Saturnin d'Arles. Mais il échoua dans sa tentative de faire subir le même sort à Auxence de Milan. Il composa toutefois un Contra Auxentium dans lequel il dénonçait les ambiguïtés des formules de foi professées par celui-ci.

Cet homme d'action fut un styliste. Il prend modèle consciemment sur le prologue des Histoires de Tacite dans le prologue de son Livre contre Ursace et Valens. Jérôme, qui l'appelle « le Rhône de l'éloquence latine », fait remarquer que le De Trinitate imite, par le style et le nombre des livres, les Institutions de Quintilien. Mais Hilaire fut surtout un maître à penser pour les générations postérieures. Avant lui, la théologie latine considérait que le Verbe n'avait été engendré qu'au moment de la création ; sous l'influence de la théologie orientale, Hilaire affirme fortement l'éternité de la génération du Verbe et oriente ainsi la théologie occidentale dans une direction nouvelle. Sa célèbre formule trinitaire (De Trin., II, 1) – « dans le Père, le Fils et l'Esprit Saint, il y a l'Infinité en celui qui est l'Éternel, la Beauté (Species) en celui qui est son Image, la Jouissance en celui qui est la Grâce » – doit s'interpréter à l'aide de la description de la quête du divin contenue dans le premier livre du De Trinitate : l'Infini de l'éternité divine serait inaccessible à l'esprit humain s'il n'était délimité par le contour de la Beauté qui le manifeste (I, 7). On reconnaît là des idées traditionnelles de la théologie orientale ; et on croit déjà lire du Grégoire de Nysse lorsqu'on rencontre des formules comme celles-ci : « Dans la mesure même où l'infinité de notre esprit s'élance pour atteindre quelque idée conjecturale de l'infinité divine, dans cette mesure même l'infinité de l'éternité sans mesure échappe à l'infinité de la nature qui la poursuit » (De Trin., I, 6).

— Pierre HADOT

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Pour citer cet article

Pierre HADOT. HILAIRE DE POITIERS (315 env.-env. 367) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • SATURNIN D'ARLES (IVe s.)

    • Écrit par Richard GOULET
    • 123 mots

    Huitième évêque d'Arles, chef du parti arien en Gaule. Saturnin présida le synode de cette ville en 353. Ce synode, tenu en présence de l'empereur Constance, condamna Athanase et exila Paulin de Trèves. Saturnin, qui bénéficiait de l'appui de l'empereur, ainsi que des évêques Ursace et Valens, dut...

Voir aussi