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AMY GILBERT (1936- )

La poésie avant tout

Avec Triade, Strophe et Chant, Trajectoires forme une série d'œuvres où la recherche formelle recoupe la réflexion poétique qui en constitue le point de départ (Michaux, Char, Mallarmé).

Le 17 octobre 1968, Chant, pour grand orchestre, est créé au festival de Donaueschingen. Prolongement d'un procédé annoncé dans Strophe, cette pièce divisée en deux grandes parties enchaînées se présente comme une véritable cantilation, à mi-chemin entre la déclamation et le chant. La fin de la première partie divise l'orchestre en deux sections distinctes et qui se répondent dans un style antiphonique. Cette idée sera réutilisée dans D'un espace déployé, pour soprano lyrique, deux pianos et deux orchestres (1972), d'après Mallarmé, qui met à profit toutes les forces d'un grand orchestre symphonique inégalement partagé, suivant une vieille idée antiphonique ; lors de la création, le 10 mars 1973, les deux « orchestres » (issus de l'Orchestre de Paris) étaient dirigés par Georg Solti et le compositeur lui-même. Poursuivant l'idée antiphonique, Gilbert Amy composera ensuite Sonata Pian'e Forte, pour soprano, mezzo-soprano et douze instruments divisés en trois groupes (1974) : les deux voix de femmes et deux groupes instrumentaux se répondent, dialoguant parfois ensemble mais toujours très brièvement.

Les années 1970 voient s'assouplir le style de Gilbert Amy, qui parvient à une force incantatoire rendant son œuvre plus « immédiate ». De cette époque, il faut citer : Cette étoile enseigne à s'incliner, pour chœur d'hommes, deux pianos, ensemble instrumental et bande magnétique, à partir de La Divine Comédie de Dante (1970) ; Récitatif, air et variation, pour douze voix mixtes a cappella (1971) ; ... D'un désastre obscur, pour mezzo-soprano et clarinette en la (1971) – à la mémoire de Jean-Pierre Guézec ; D'un espace déployé (1972) ; Échos XIII, pour quatre solistes et neuf instrumentistes (1976) ; Chin'Amin Cha'Anamin, pour voix et petit ensemble (1979), d'après Gabirol. Dans Échos XIII, les quatre solistes (un piano, une harpe, un cor et un trombone) sont chacun à leur tour « appels » ou « échos » l'un par rapport à l'autre, ce qui conduit au total à quatre fois trois couples « appels-échos » au cours de l'œuvre.

En 1980, le Groupe de recherches musicales (G.R.M.) de l'I.N.A. lui commande Une saison en enfer, pour voix, piano, percussion et bande magnétique. La maîtrise parfaite de l'électroacoustique dont fait preuve le compositeur en l'intégrant parfaitement aux voix et aux instruments produit une alchimie d'une rare beauté : le texte de Rimbaud, dit par trois voix – un enfant, une femme et un homme –, produit une polyphonie enchevêtrée dont la résonance est renforcée par le piano, la percussion et les sons électroacoustiques.

À propos de Praeludium, pour orchestre, composé en 1985, en hommage à Bach, Gilbert Amy écrit : « Jean-Sébastien Bach a donné ses lettres de noblesse à un exercice de pure et simple entrée en matière. À cet égard, les grands préludes pour orgue sont des exemples d'un genre noble et développé. C'est à ce modèle que je me réfère pour ce qui concerne la coupe de ce morceau pour orchestre. »

En 1988, l'Orchestre de Paris dirigé par Peter Eötvös crée la Missa cum jubilo, pour quatuor vocal, chœur d'enfants ad libitum, chœur mixte et orchestre. Après Une saison en enfer, le compositeur avait souhaité travailler sur un texte d'une portée plus universelle et se confronter ainsi aux grands compositeurs de messes ; il accepte en créant cette œuvre monumentale, où se ressent l'influence de Stravinski, les règles strictes d'une véritable messe en latin, avec Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus et Agnus Dei.

Après avoir[...]

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Écrit par

  • : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio
  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

Classification

Pour citer cet article

Alain FÉRON et Juliette GARRIGUES. AMY GILBERT (1936- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DOMAINE MUSICAL

    • Écrit par Juliette GARRIGUES
    • 2 258 mots
    • 1 média
    GilbertAmy ne poursuivit pas l'œuvre de son créateur. Il ouvrit en effet les portes du Domaine à un très grand nombre de compositeurs aux tendances stylistiques les plus variées. Le public découvrit ainsi John Cage, les compositeurs répétitifs américains, les compositeurs de musique électroacoustique....

Voir aussi