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FRANCE (Le territoire et les hommes) Un siècle de politique économique

Capitale

Paris

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          « La France est hantée par l'idée de déclin. » La formule de Christian Stoffaës résume de façon percutante l'histoire économique française depuis le début du xxe siècle, ou plutôt la manière dont les Français ont vécu cette histoire.

          L'idée qu'il existe un « retard français » est, en effet, une constante sur le long terme. Les comparaisons qui sont établies tournent régulièrement au désavantage de la France : avec le Royaume-Uni au xixe siècle, avec les États-Unis depuis 1945, avec le Japon dans les années 1980, avec l'Allemagne sans interruption. Dès 1918, le rapport Clémentel insiste sur les « archaïsmes » de l'économie nationale. Ce qui apparaît dans l'entre-deux-guerres comme une stagnation française conduit à noircir le tableau, et la défaite de 1940 autorise des jugements extrêmement sévères aussi bien dans les rangs de la Résistance qu'à Vichy. « La France, déjà en retard dans maints secteurs avant la guerre, est maintenant plus gravement éprouvée qu'elle ne l'était en 1918 », affirment ainsi les services de l'État français dans la « tranche de démarrage » de 1944 ; en écho, le rapport rédigé la même année pour le compte du Comité français de libération nationale par André Philip commente : « Depuis plusieurs dizaines d'années, les retards de la France dans la course au développement économique et au bien-être s'accumulent. À chaque étape, nous sommes un peu plus dépassés. » Quant à Jean Monnet, il craint que l'économie « ne se cristallise à un niveau de médiocrité » (mémorandum au général de Gaulle de décembre 1945).

          Domination du secteur agricole, faiblesse industrielle, en dehors de quelques secteurs tels les biens de consommation ou les produits de luxe, insuffisante concentration des entreprises, stagnation de l'investissement, individualisme et refus de l'organisation, ouverture insuffisante sur le monde, capitalisme « timide et conservateur » (selon la formule du rapport Clémentel) : telles sont les caractéristiques les plus souvent évoquées de ce « retard français ». Christian Stoffaës les résume en quatre formules dans Une économie mondiale : malthusianisme, provincialisme, ruralisme, règne du petit.

          Il n'est pas certain que tous ces traits correspondent exactement à la réalité française ; sur de nombreux plans, la France fait bien au contraire figure de grand pays moderne. Il n'empêche que ce jugement, même exagéré, dès 1919, et surtout après 1945, marque une volonté de renouveau. Il conduit aussi à survaloriser l'action de l'État, considéré comme seul capable de mener à bien l'effort de modernisation. Entreprises, banques et travailleurs jouent pourtant un rôle à ne pas sous-estimer.

          Du xixe siècle à 1945 : une longue stagnation ?

          L'héritage du xixe siècle

          Beaucoup d'historiens estiment que c'est au xixe siècle que se déterminent les caractéristiques du « retard français ». Malgré des progrès indiscutables, en particulier sous le second Empire, le bilan de la période est souvent considéré comme négatif.

          Particulièrement sur la sellette, la IIIe République. Dans leur désir de convertir la masse paysanne aux idéaux républicains, ses dirigeants auraient privilégié les intérêts de l'agriculture, au risque de décourager les autres activités. La petite propriété paysanne est donnée en exemple, le marché national est mis à l'abri de la concurrence extérieure : en 1892, Jules Méline inspire un tarif particulièrement protectionniste, dénommé « loi du cadenas », qui préserve les producteurs nationaux des importations de blés russe ou américain ; mais, du même coup, c'est toute l'économie française qui se trouve comme isolée du marché mondial.

          La France reste ainsi un pays essentiellement agricole,[...]

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          Écrit par

          • : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé d'histoire, enseignant en classe préparatoire
          • : maître de conférences en sciences économiques

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