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SOTTSASS ETTORE (1917-2007)

Des objets concrets pour exprimer des idées abstraites

Ettore Sottsass est vraiment lancé. En 1976, on le retrouve parmi les chefs de file du design radical italien au Studio Alchymia qui expose, l'année suivante, une première collection de mobilier annonçant, en 1981, la révélation de Memphis, ce terme faisant référence autant à l'Égypte ésotérique, et à la culture du sacré, qu'à la ville d'Elvis Presley, et à la culture pop, – une belle preuve de « nomadisme culturel » que certains qualifieront de sacrilège. Comme tous les créateurs, Scottsass aime avoir les coudées franches et il abandonnera rapidement (en 1985) le collectifs de designers « Memphis », pour doter ses œuvres du label Sottsass Associati, du nom du bureau d'architecture, graphisme et design qu'il a formé avec quatre jeunes collaborateurs.

En mai 1989, nouvelle provocation avec Meta-Memphis, époustouflante exhibition où les meubles apparaissent affranchis de toute sujétion à leur fonction. Les formes divaguent et ondulent, les couleurs sont violentes, superposées, heurtées, comme en témoigne la bibliothèque Claustra Carlton, le meuble de rangement Casablanca ou le buffet Beverly, où des panneaux en stratifié coloré et assemblés à l'image d'un château de cartes composent un hymne à l'instabilité. Le mélange des matériaux naturels et artificiels se manifeste comme un principe de construction avec une place majeure réservée au stratifié. Sottsass réintroduit la valeur du décor dans le mobilier et les objets, en donnant la priorité à la valeur expressive des formes dans une logique plus sensorielle que structurale.

C'en est fini des ustensiles de la production de masse qui se ressemblaient presque tous. Les formes géométriques, l'utilisation des couleurs primaires et le mélange des matériaux définissent un langage inhabituel dans le design. Les objets ont été abordés et torturés – comme chez les cubistes – dans chacun de leurs aspects. L'instable est devenu une nouvelle valeur dont la signification politique importe peu, car Sottsass ne se rattache à aucun parti : pour lui, l'indispensable renouvellement de la société sera une affaire culturelle et elle tiendra le plus grand compte de « l'ornement ». Ainsi que l'écrivaient les fidèles d'Archigram en 1960, « nous avons choisi de contourner l'image pourrissante du Bauhaus ». Ettore Sottsass a certainement été l'un de ceux qui ont appliqué, dans leurs œuvres, cette consigne à la lettre.

— Roger-Henri GUERRAND

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Pour citer cet article

Roger-Henri GUERRAND. SOTTSASS ETTORE (1917-2007) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • VALENTINE, MACHINE À ÉCRIRE (E. Sottsass et P. King)

    • Écrit par Stéphane LAURENT
    • 247 mots

    Mise au point aux États-Unis, mal acceptée au départ, la machine à écrire a connu une série de perfectionnements qui lui ont apporté sa fiabilité et ont permis sa démocratisation. Dans les années 1960, certaines machines tranchent délibérément sur la belle austérité de la Selectric d'I.B.M., conçue...

  • DESIGN

    • Écrit par Christine COLIN
    • 8 028 mots
    • 1 média
    ...exclure pour autant du design. L'Art nouveau, par exemple, est systématiquement présenté comme une source du design par les historiens. Par ailleurs, Ettore Sottsass, fondateur du groupe Memphis en 1981, à Milan, a déclaré la fin des restrictions en matière décorative, et il est l'un des designers...
  • KINGELEZ BODYS ISEK (1948-2015)

    • Écrit par André MAGNIN
    • 1 023 mots

    En Afrique noire, la sculpture traditionnelle a souvent joué un rôle de cohésion sociale en incarnant un pouvoir, un absolu. Depuis les années 1980, des artistes africains fortement individualistes défendent la liberté de la création et à travers elle l'expression de leur personnalité. Un certain...

  • KURAMATA SHIRO (1934-1991)

    • Écrit par Brigitte FITOUSSI
    • 551 mots

    Tout au long de sa carrière, le designer japonais Kuramata Shiro a su associer à son savoir-faire professionnel une dimension poétique peu commune. Célèbre dans son pays, il reste longtemps méconnu à l'étranger et n'acquiert un renom international qu'à partir des années 1980. Il participe, dès 1981,...

  • NEOTU GALERIE, Paris

    • Écrit par Constance RUBINI
    • 1 937 mots

    À la fin de l'année 1984, Pierre Staudenmeyer et Gérard Dalmon ouvrent à Paris la galerie Neotu, dans le quartier traditionnel des antiquaires, rue de Verneuil, avant de s'installer définitivement, en 1985, rue du Renard, à quelques pas du Centre Georges-Pompidou. Ils se sont rencontrés à...

Voir aussi