Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

DIXIELAND

Style de jazz traditionnel, à la croisée des influences des fanfares et du blues, souvent attribué aux pionniers de La Nouvelle-Orléans, le dixieland est parfois distingué du style New Orleans proprement dit pour ne faire alors référence qu'aux styles affinés durant les années 1920 par les musiciens de Chicago. Le terme est également associé au style renouant avec le jazz traditionnel dans les années 1940.

La Nouvelle-Orléans ne fut pas la seule ville où fleurit le jazz à l'orée du xxe siècle, mais elle fut le cœur de cette effervescence musicale et vit apparaître les premiers grands jazzmen. Il est très probable que la musique qui allait devenir ce qu'on appelle le style dixieland ou Nouvelle-Orléans était jouée à l'origine aussi bien par des musiciens noirs que par des musiciens blancs.

À la fin du xixe siècle, la Nouvelle-Orléans était virtuellement coupée en deux quartiers, selon l'origine ethnique. Cette ségrégation de fait fut mise en exergue en 1897 par la création de Storyville, secteur réservé à la prostitution et au jeu, divisé en un quartier noir et un quartier blanc. Rares étaient les bordels, cabarets ou maisons de jeux de Storyville qui n'employaient pas de musiciens. La culture urbaine unique de la ville constituait un terreau propice à l'émergence d'un nouveau style musical.

Les musiciens noirs et blancs de la Nouvelle-Orléans partageaient, semble-t-il, de nombreuses influences communes, même si les Blancs se tournaient davantage vers le ragtime et les musiques d'Europe, tandis que les Noirs y incorporaient leur héritage africain. Cette distinction était parfaitement incarnée par les deux musiciens les plus emblématiques de l'époque : « Papa » Jack Laine (George Vital, 1873-1966) et Buddy Bolden (1877-1931). Laine était un batteur qui se produisait à la Nouvelle-Orléans depuis 1891, et auquel on attribue souvent la paternité du jazz blanc. Dès 1910, son groupe, spécialisé à l'origine dans les marches militaires, ne jouait pratiquement plus que du ragtime. Nick La Rocca, l'un de ses nombreux musiciens, s'inspira du son et exploita la plus grande partie du répertoire de l'ensemble de Laine lorsqu'il créa en 1916 son propre groupe, The Original Dixieland Jazz Band (O.D.J.B.). Ce groupe influent empruntait à la tradition des fanfares l'emploi d'une section mélodique de cuivres fondée sur la trompette (ou le cornet), la clarinette et le trombone. En 1917, l'O.D.J.B. enregistra Livery Stable Blues, premier 78-tours de l'histoire du jazz. Cet enregistrement et les suivants, dont Tiger Rag, Dixie Jazz Band One Step et At the Jazz Band Ball, sont représentatifs du jazz joué par les musiciens blancs, techniquement irréprochables mais beaucoup moins créatifs que les Noirs.

L'approche de la musique noire était incarnée par Buddy Bolden, premier grand cornettiste de jazz. Son style vigoureux fut marqué par le blues dès les années 1890, avec des inflexions à « faire pleurer les notes » et un jeu dans le registre émotionnel. On lui attribue également l'origine de l'improvisation collective et de la vocation du jeune Louis Armstrong. Comme pour nombre de jazzmen légendaires des débuts, il n'existe pas d'enregistrement de Bolden, mais on peut entendre des bribes de son style dans la musique de pionniers tels que Bunk Johnson ou Sidney Bechet.

À la fermeture de Storyville, en 1917, nombre de musiciens de La Nouvelle-Orléans émigrèrent vers d'autres villes, principalement Chicago, qui devint la nouvelle capitale du jazz. Le style dixieland s'y épanouit et atteignit le sommet de sa popularité. Chacune des deux villes développa un courant qui lui était propre. La musique de La Nouvelle-Orléans continua d'être fortement influencée par les marches et les fanfares portées par un rythme quaternaire accentuant les temps forts ainsi que[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis. DIXIELAND [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • HERMAN WOODY (1913-1987)

    • Écrit par Pierre BRETON
    • 1 308 mots
    • 1 média

    Enfant, Woodrow (Woody) Charles Herman manifeste si peu d'attirance pour la musique que ses parents doivent user de quelque contrainte pour la lui apprendre. Auraient-ils deviné que leur obstination vaudrait à leur fils une carrière longue de plus de cinquante ans et une célébrité planétaire ?...

  • JAZZ

    • Écrit par Philippe CARLES, Jean-Louis CHAUTEMPS, Universalis, Michel-Claude JALARD, Eugène LLEDO
    • 10 992 mots
    • 25 médias
    ...Sidney Bechet, puis, à partir de 1940, par de jeunes Blancs américains amoureux du passé de leur nation. Ce mouvement, appelé « revival », dure encore et nombre de jeunes orchestres se réclament toujours du vieux style (on a tendance à recouvrir ces reconstitutions du terme de « Dixieland »).
  • NEW ORLEANS ou NOUVELLE-ORLÉANS STYLE

    • Écrit par Jean-Louis CHAUTEMPS
    • 917 mots

    Connu grâce à des enregistrements de musiciens louisianais à Chicago pendant les années 1920, ce style est caractérisé par une structure orchestrale, issue des fanfares, qui utilise l'improvisation collective.

    Le style New Orleans, ou Nouvelle-Orléans, ou néo-orléanais – on dit aussi parfois...

Voir aussi