BRASSEUR CLAUDE (1936-2020)
Né le 15 juin 1936 à Neuilly-sur-Seine, fils de Pierre Brasseur et Odette Joyeux, qui le mettent en pension pendant une grande partie de son enfance, Claude Brasseur est le descendant d’une longue lignée de comédiens. Il intitule d’ailleurs son autobiographie Merci ! Pierre et fils, maison fondée en 1820 (avec Jeff Domenech, 2014), et son propre fils, Alexandre, né en 1971, sera à son tour acteur. Après avoir quitté le lycée en classe de seconde, Claude Brasseur est pendant une courte période assistant-photographe à Paris Match, mais débute rapidement au théâtre (Judas de Marcel Pagnol, 1955) et au cinéma (Rencontre à Paris, Georges Lampin, 1956).
En plus de soixante ans de carrière, il interprétera trente-cinq pièces, cent vingt films et plus d’une trentaine de téléfilms ou séries. Pour le petit écran, il incarne Rouletabille dans Le Mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux (Jean Kerchbron, 1965) ; Marcel Bluwal le dirige dans des adaptations de Marivaux et de Molière – dont un mémorable Dom Juan, au côté de Michel Piccoli, en 1965 – puis lui offre le rôle principal des Nouvelles Aventures de Vidocq, en 13 épisodes diffusés sur la première chaîne de l’ORTF en deux séries (1971-1973), qui font de lui un acteur célèbre et populaire. Son père – « monstre sacré » aux cent cinquante films et quarante pièces – meurt en 1972 d’une crise cardiaque en Italie à la fin du tournage de La Plus Belle Soirée de ma vie d’Ettore Scola. En 1964, face à Eddie Constantine, Pierre et Claude avaient joué côte à côte les rôles du père et du fils Loudéac dans Lucky Jo, de Michel Deville. Au Théâtre des Célestins, Claude avait interprété en 1960 Un ange passe, écrit et mis en scène par Pierre.
Sur scène, cet habitué du festival de Ramatuelle interprète des classiques (Britannicus de Racine, 1966) comme des auteurs modernes (Du côté dechez l’autre d’Allan Ayckbourn, 1971). Il est fidèle à des metteurs en scène qui le dirigent à plusieurs reprises : Jean-Pierre Miquel, Marcel Bluwal, Christophe Lidon (L’Indigent Philosophe de Marivaux, sa dernière pièce en 2017), et surtout Roger Planchon pour une dizaine de mises en scène, de l’adaptation des Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas à Tartuffe de Molière, maintes fois repris. En 1987, Planchon monte à nouveau George Dandin, cette fois au Théâtre national populaire (TNP) de Villeurbanne puis filme la pièce avec la même distribution – Claude Brasseur, Zabou – dans une captation en décors naturels et une belle réécriture qui comporte même quelques scènes nouvelles. Le film sort en salles dans toute la France, en même temps que la pièce tourne dans le circuit des centres dramatiques. L’expérience est passionnante et, pour relater cette histoirede mésalliance, Planchon passe avec art du divertissement rythmé de coups de bâton au théâtre, au drame psychologique d’un couple au cinéma.
Claude Brasseur n’ayant pas un physique de jeune premier mais un charme simple, avec une voix un peu rocailleuse adoucie par son regard, il n’est jamais meilleur au cinéma qu’au sein d’un petit groupe de grands comédiens comme lui, auxquels il donne la réplique. Dans La Boum (Claude Pinoteau, 1980), il accepte de remettre en jeu sa célébrité pour incarner le père d’une jeune inconnue, Sophie Marceau. Le film est un triomphe (plus de 4 millions d’entrées). Dans Un éléphant çatrompe énormément (1976) puis Nous irons tous au paradis (1977) d’Yves Robert, dans un scénario écrit par Jean-Loup Dabadie, il excelle aux côtés de Jean Rochefort, Guy Bedos et Victor Lanoux, les quatre amis quadragénaires étant encore plus émouvants lorsque, dans le second de ces films, ils sont gagnés par la mélancolie. Certes, la même qualité n’est pas au rendez-vous de Camping 1, 2 et 3 (2006-2016) de Fabien Onteniente et Frank Dubosc, fondés sur le même principe choral.[...]
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Écrit par
- René PRÉDAL : professeur honoraire d'histoire et esthétique du cinéma, département des arts du spectacle de l'université de Caen
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