CHINE, histoire, de 1949 à nos jours
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Nom officiel | République populaire de Chine (CN) |
Chef de l'État | Xi Jinping (depuis le 14 mars 2013) |
Chef du gouvernement | Li Keqiang (depuis le 15 mars 2013) |
Capitale | Pékin |
Langue officielle | chinois mandarin |
L'ère de la révolution culturelle (1966-1976)
« Fuite en avant dans l'utopie radicale » (M.-C. Bergère) ou « lutte pour le pouvoir au sommet entre une poignée d'individus » (S. Leys), la « grande révolution culturelle et prolétarienne » fut en tout cas à la fois l'apogée du pouvoir de Mao Zedong et un extraordinaire chaos installé au cœur du régime communiste. Une génération de jeunes Chinois s'y livra, encouragés d'en haut à recommencer l'épopée de la Longue Marche : répétition comique et sulpicienne quand on en observe aujourd'hui les objets du culte ; tragédie mortelle pour d'innombrables intellectuels, experts et cadres chinois qui furent persécutés au nom de la réunification du travail manuel et intellectuel. D'une révolution, elle n'eut que le nom : car le groupe des dirigeants de celle-ci, bientôt connu sous le diminutif énigmatique de « centre », inspira constamment les décisions politiques des gardes rouges, leur fournissant révélations et instructions, retenant parfois leur fanatisme en quelques épisodes célèbres. Mais cette manipulation politique se compliqua du fait des nombreuses oppositions internes à Pékin : le jeu devint bientôt tripartite, l'armée de Lin Biao, notamment, s'imposant comme un acteur décisif. Durant les premières étapes (1966-1968), les gardes rouges purent croire mener un mouvement largement spontané, renouvelant la révolution chinoise et étalant au grand jour leurs dissensions. Leur envoi, à partir de décembre 1968, vers les campagnes et le travail manuel (près de 19 millions de jeunes urbains allaient connaître ce sort) mit fin à cette illusion. Dès lors, la révolution culturelle se réduit aux dimensions d'un combat d'appareil, où les radicaux maoïstes perdent petit à petit la partie.
Cette jeune garde rouge remet un brassard honorifique au président Mao Zedong (1893-1976), en 1966.
Crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images
Dans Les Habits neufs du président Mao, le sinologue Pierre Ryckmans, sous le pseudonyme de Simon Leys, porte un regard sans concession sur la Chine de la révolution culturelle.
Crédits : William West/ AFP
Nul ne connaît le bilan humain de cette époque, en tout état de cause beaucoup moins meurtrière que le Grand Bond en avant. Pour l'essentiel, les campagnes chinoises conservèrent leur ordre administratif et économique, même si la productivité en souffrit. À partir d'un chiffre de victimes pour la province du Guangdong (40 000), on extrapole souvent un bilan d'un peu moins d'un million de morts à l'échelle du pays. Mais l'interruption de l'enseignement supérieur pendant plus de cinq ans, la fermeture au monde extérieur, la promotion d'innombrables activistes doués surtout pour le discours de l'heure constituent également une part appréciable du passif.
L'assaut contre le parti (1966-1967)
Le lancement de la révolution culturelle
Comme pour la campagne de rectification des Cent Fleurs, l'appareil freine l'extension par Mao du mouvement d'éducation socialiste à d'autres domaines. En novembre 1965, Mao fait publier, sous la plume de Yao Wenyuan, un pamphlet dans la presse de Shanghai contre le dramaturge Wu Han. À cette époque, Mao ne réside presque plus à Pékin, et c'est de province qu'il fait partir son attaque. En février 1965, le chef d'état-major de l'armée, Luo Ruiqing, est arrêté : dès sa conception, la révolution culturelle combine mouvement de masse et guerre d'appareil appuyée sur le pouvoir militaire. En mai 1965, Mao remplace les responsables de la campagne en cours par le groupe de la révolution culturelle, avec notamment son ancien secrétaire particulier Chen Boda et son épouse Jiang Qing.
L'échange d'expériences révolutionnaires
La première affiche murale de la révolution culturelle, contre les autorités universitaires et municipales de Pékin, est écrite par une enseignante de philosophie, Nie Yuanzi : la mise à feu a eu lieu, et toute la jeunesse est lancée dans le mouvement. Les écoles ferment – pour plusieurs années – en juillet, et les étudiants et élèves sont organisés en gardes rouges : ils se diviseront immédiatement en factions concurrentes, fils de cadres et de militaires s'opposant aux jeunes des anciennes classes bourgeoises, du prolétariat et aux intellectuels. En août 1966, le comité central est réuni : mais de nombreux délégués sont empêchés d'y participer, et des soldats les remplacent dans la salle. Au nom de l'« échange d'expériences révolutionnaires », Mao convoque la jeunesse à Pékin. Par millions, bloquant trains, gares et lieux publics, ils affluent vers la place Tian'anmen, où des meetings monstres se déroulent devant l'ensemble des dirigeants, promis pour une part à l'épuration.
En 1974, dans cette école, où la préparation militaire est dispensée avec les cours, des écoliers chinois montrent leur savoir-faire en employant des armes en bois.
Crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images
Rassemblement de gardes rouges à Pékin, 1966
Jeunes gardes rouges répandant la parole de Mao, place Tian'anmen au début de la révolution culturelle (Pékin, 1966).
Crédits : API/ Gamma-Rapho/ Getty Images
Alors naît l'éphémère presse des gardes rouges, avec son culte maoïste délirant [...]
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Écrit par :
- Jean-Philippe BÉJA : directeur de recherche émérite au CNRS, Centre d'études et de recherches internationales-Sciences Po
- François GODEMENT : maître de conférences à l'Institut national des langues et civilisations orientales, maître de recherche à l'Institut français des relations internationales
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Pour citer l’article
Jean-Philippe BÉJA, François GODEMENT, « CHINE, histoire, de 1949 à nos jours », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 04 février 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/chine-histoire-de-1949-a-nos-jours/