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SAINTE-BEUVE CHARLES AUGUSTIN (1804-1869)

L' « avocat » et le portraitiste

Pourtant, même en tant que portraitiste, Sainte-Beuve a commencé par l'illusion. Chroniqueur du Globe, journal modérément romantique, il s'y fait très vite le propagandiste de l'école nouvelle. Dans son Tableau historique et critique de la poésie et du théâtre français au XVIe siècle (1828), il veut « chercher dans nos origines quelque chose de national à quoi se rattacher » (Lundi du 15 octobre 1855) et défendre les jeunes poètes contre l'accusation d'être les imitateurs d'une poésie étrangère. Il pratique, selon son propre mot, une critique « avant-courrière » et devient le « héraut » du génie de Victor Hugo. Mais les enquêtes indiscrètes et véridiques succèdent bientôt aux dithyrambes. Peu après 1830, Sainte-Beuve déclare préférer à l'éloquence et aux effusions romantiques la rigueur de l'analyse selon la méthode des idéologues. Il s'applique à « chercher l'homme dans l'écrivain » et remarque que, pour y parvenir, « on ne saurait étudier de trop près, tandis et à mesure que l'objet vit » (Préface des Critiques et portraits littéraires, 1836). C'est ainsi qu'il s'attachera désormais aux moindres détails pour attraper « le tic familier, le sourire révélateur, la gerçure indéfinissable » (« Portrait de Diderot », 1831). Une pareille quête semble exiger que celui qui s'y livre ne soit « ni fanatique, ni même trop convaincu ou épris d'une autre passion quelconque » (article Du génie critique et de Beyle, 1835). Mais la critique ainsi comprise consiste beaucoup plus à décrire les particularités morales qu'à analyser des œuvres littéraires.

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur de littérature française à la Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Roger FAYOLLE. SAINTE-BEUVE CHARLES AUGUSTIN (1804-1869) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Sainte-Beuve - crédits : Apic/ Getty Images

Sainte-Beuve

Autres références

  • CÉNACLES ROMANTIQUES

    • Écrit par France CANH-GRUYER
    • 2 432 mots
    • 1 média
    Le Cénacle proprement dit est encore appelé « Cénacle de Joseph Delorme »,en l'honneur du célèbre poème de Sainte-Beuve dans lequel ce terme se trouve appliqué au groupe d'amis et d'artistes qui, de 1827 à 1830 (à peu près du « manifeste » de la préface de Cromwell...
  • CONTRE SAINTE-BEUVE, Marcel Proust - Fiche de lecture

    • Écrit par Guy BELZANE
    • 1 252 mots
    ...seulement la rédaction d'un ouvrage théorique sur la critique littéraire, mais, par avance, l'inclusion future de cette théorie dans la fiction. Dans le chapitre suivant, « La Méthode de Sainte-Beuve », Proust définit, pour le condamner, le « biographisme » dominant à l'époque, qui consiste à analyser...
  • CRITIQUE LITTÉRAIRE

    • Écrit par Marc CERISUELO, Antoine COMPAGNON
    • 12 918 mots
    • 4 médias
    Par ailleurs, la séparation des deux usages de la critique est moderne : on fait de Sainte-Beuve le « premier des critiques », comme si la critique avait commencé avec lui. Or Sainte-Beuve est plutôt l'un des derniers à appartenir aux deux critiques : d'où le reproche, auquel Proust a attaché son nom,...
  • FRANÇAISE LITTÉRATURE, XVIIe s.

    • Écrit par Patrick DANDREY
    • 7 270 mots

    Entre la Renaissance et les Lumières, le xviie siècle fait figure, en Europe, d’époque de transition : après l’enthousiasme humaniste, c’est une période marquée par le doute, voire l’angoisse que suscite l’ébranlement de l’unité des croyances et du système ordonné des connaissances ; elle ouvre la...