Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

DREYER CARL (1889-1968)

L'évangéliste et l'amour

Mais le cinéma ne saurait se confondre avec l'architecture. Dreyer le perçoit mieux que quiconque et il se plaît à opposer à l'ordre figé la liberté souveraine de ses héroïnes, de ses fous, de ses saints, de ses amants, de ses prophètes, à quoi correspond cette caméra frémissante comme une bête piégée. Tout film de Dreyer est un combat entre la fascination de la mort et la folie de l'amour. Car la vie et l'amour ne peuvent se peindre qu'en proie à cet instinct de mort qui est la règle et la morale de toute une société.

En ce sens, l'œuvre de Dreyer est profondément chrétienne. Évangélique avec une folle audace. Chrétienne par intuition d'une vérité de l'amour qui ne peut trouver aucun compromis avec le monde de la mort. Les amants de Dies irae sont de la même race que Jeanne la Pucelle et que Gertrud concluant sa vie par les deux mots « Amor omnia ». Et le fou d'Ordet, qui fait admettre au spectateur, à la fin du film, la résurrection insensée d'une jeune femme, laisse pressentir ce qu'aurait été le Christ vu par Dreyer. Mais ce cinéaste humble n'a pas eu toujours les moyens financiers de réaliser les films qu'il portait en lui. Il est mort, à l'âge de soixante-dix-neuf ans, emportant ses innombrables projets.

— Jean COLLET

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Paris-V-René-Descartes, critique de cinéma

Classification

Pour citer cet article

Jean COLLET. DREYER CARL (1889-1968) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Antonin Artaud dans <it>La Passion de Jeanne d'Arc</it> - crédits : Henry Guttmann/ Getty Images

Antonin Artaud dans La Passion de Jeanne d'Arc

Falconetti dans <it>La Passion de Jeanne d'Arc</it> - crédits : Henry Guttmann Collection/ Hulton Archive/ MoviePix/ Getty Images

Falconetti dans La Passion de Jeanne d'Arc

Autres références

  • ORDET (C. Dreyer)

    • Écrit par Joël MAGNY
    • 197 mots

    Ordet, c'est-à-dire la « Parole », ou plus exactement le Verbe dont nous parle la Bible. La puissance, après un demi-siècle, du film de Carl Dreyer (1889-1968) tient pourtant plus au silence qu'à la voix. Silence qui accompagne, sur la bande sonore du film, le moment où Johannes, le fils...

  • ORDET, film de Carl Theodor Dreyer

    • Écrit par Jacques AUMONT
    • 1 026 mots

    Avec Benjamin Christenssen à l'époque du muet et Lars von Trier récemment, Carl Theodor Dreyer (1889-1968) est la seule gloire cinématographique du Danemark. Pourtant, lorsqu'en 1954 il entreprend d'adapter la pièce de Kaj Munk, Le Verbe (Ordet, 1932), il n'a plus tourné de long-métrage...

  • ÉROTISME

    • Écrit par Frédérique DEVAUX, René MILHAU, Jean-Jacques PAUVERT, Mario PRAZ, Jean SÉMOLUÉ
    • 19 774 mots
    • 7 médias
    L'érotisme, chez Pasolini, si dynamique soit-il, détruit un faux ordre, mais n'est pas ordre. Au contraire, chez Dreyer, l'amour est ordre. Amor omnia, grave sur sa tombe Gertrude (1964), l'héroïne de son dernier film, son testament. Il paraît saugrenu de parler d'érotisme à propos de l'auteur...
  • PARLANT (CINÉMA) - (repères chronologiques)

    • Écrit par Michel CHION
    • 3 201 mots

    1899 États-Unis. The Astor Tramp, « picture song » de Thomas Edison. Bande filmée destinée à être accompagnée d'une chanson chantée en salle (derrière l'écran) par des artistes invités.

    1900 France. Présentation par Clément Maurice du Phono-Cinéma-Théâtre à l’'Exposition universelle....

  • SCANDINAVE CINÉMA

    • Écrit par Daniel SAUVAGET
    • 1 755 mots
    • 2 médias
    ...scène, abandonne le mélodrame avant de s'affirmer comme un des maîtres du fantastique avec La Sorcellerie à travers les âges, tourné en Suède en 1921. Carl Dreyer, journaliste devenu scénariste à la Nordisk, dirige ses propres films à partir de 1918. Son œuvre, très personnelle et exigeante, où une sorte...
  • VAMPIRE, cinéma

    • Écrit par Jean TULARD
    • 874 mots
    • 1 média

    Le thème du vampire doit sa célébrité au cinéma. Dès le xviiie siècle, Dom Calmet avait réuni tous les éléments du mythe (monstre buveur du sang des vivants, qui ne peut mourir que d'un pieu enfoncé dans le cœur), éléments repris, au xixe siècle, par Collin de Plancy...

Voir aussi