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CANDRAKĪRTI (fin VIe s.)

Un des plus grands maîtres de l'école mādhyamaka. Candrakīrti serait né au Samanta, dans le sud de l'Inde. Élève de Kamalabuddhi, il découvre par lui les œuvres de Nāgārjuna, de Buddhapālita et de Bhāvaviveka. Établi à Nālandā, il se trouva en concurrence avec Candragomin, de l'école yogācāra. Celui-ci devait l'emporter et devenir le chef de la grande université bouddhique.

L'œuvre de Candrakīrti, d'une importance capitale, comporte de nombreux commentaires : La Prasannapadā (ou encore Prasannapadāmadhyamakavritti), ouvrage fondamental pour la connaissance du Mādhyamaka, est un commentaire sur les Mūlamadhyamakakārikā de Nāgārjuna. Elle est conservée intégralement en sanskrit et traduite fragmentairement en allemand, en anglais et en français. Un autre commentaire est celui que Candrakīrti écrit sur le Catuhśataka d'Āryadeva. Le Mādhyamakāvatāra, œuvre entièrement originale, n'est conservé qu'en tibétain.

La position de Candrakīrti est celle de l'école prāsañgika. Grâce à lui, les méthodes de Buddhapālita l'ont emporté définitivement sur celles de Bhāvaviveka. Pour Buddhapālita, le madhyamika (adepte du Mādhyamaka) doit se contenter de vaincre ses adversaires par la réduction à l'absurde de leurs thèses (prasañga). C'est une méthode efficace contre tous les systèmes et qui ne peut pas se retourner contre le Mādhyamaka, ce dernier n'ayant pas de thèse à soutenir, et sa réfutation de l'opinion adverse ne signifiant pas l'acceptation de son contraire. Bhāvaviveka, fondateur de la tendance svātantrika, désirait pouvoir formuler, à l'intérieur du Mādhyamaka, un système logique. Ainsi, dans son Karatalaratna, essaie-t-il de prouver la vérité de la śūnyatā par des syllogismes. Ce procédé se heurte à de nombreuses objections. Est-il possible de prouver la vacuité universelle si l'on est obligé d'admettre que les arguments avancés sont eux-mêmes śūnya ? Et comment concilier cette vacuité avec le principe du Pratītyasamutpāda (production en dépendance) ? Candrakīrti donne raison à Buddhapālita et devient le chef de file des Prāsañgika. Il se lance dans des controverses avec les Vijñānavādin, montrant notamment que la connaissance (vijñāna) dont ces derniers défendent l'existence est elle-même inconsistante puisque son objet n'existe pas. La voie du milieu (madhyamā pratipad), celle que proposait Nāgārjuna et que défend Candrakīrti, se trouve à égale distance de l'affirmation et de la négation (quant à l'existence des choses). Le Mādhyamaka se réduit à une critique. L'une des formes les plus intéressantes de l'argumentation réside dans le principe de la solidarité des contraires : Si A n'existe pas, son contraire B ne peut exister.

Répétant que tout est śūnya (vide), le Mādhyamaka n'est pas, cependant, un nihilisme. Négativisme tout au plus, il pose tout aussi bien la négation de la négation que la négation elle-même. Il ne faut pas perdre de vue que cette philosophie s'inscrit dans un système religieux dont le but suprême reste la délivrance et que toute l'argumentation, avec les vertiges qu'elle nous donne parfois, ne tend que vers celle-ci.

— Jean-Christian COPPIETERS

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Pour citer cet article

Jean-Christian COPPIETERS. CANDRAKĪRTI (fin VIe s.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BOUDDHISME (Histoire) - Littératures et écoles bouddhiques

    • Écrit par André BAREAU
    • 5 970 mots
    ...Quatre centaines » (de strophes), n'est conservé intégralement qu'en version tibétaine et partiellement seulement en sanskrit et en traduction chinoise, et Candrakīrti, dont la Prasannapadā, « Celle dont les mots sont clairs », précieux commentaire du traité de Nāgārjuna, rédigé à la fin du vi...

Voir aussi