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CLAUDEL CAMILLE (1864-1943)

Sculpture et autobiographie

À partir de 1886, Camille Claudel travaille à un groupe intitulé Sakountala, inaugurant ainsi une série d'œuvres dont les références littéraires, mythologiques ou symboliques thématisent une sorte d'autobiographie. Ce groupe, qui lui vaut une mention honorable au Salon de 1888, sera exécuté en marbre sous le titre de Vertumne et Pomone (1902) et édité en bronze sous celui d'Abandon (1905). Et lorsque sa créativité sera tarie, Camille Claudel y trouvera, en isolant de celui-ci la figure féminine, la source d'une de ses dernières sculptures, Niobide (1906). On peut lire d'autres œuvres comme autant de chapitres de la vie de l'artiste : La Valse (1889-1893) et le bonheur amoureux ; La Petite Châtelaine (1893) et l'absence d'enfant ; ou L'Implorante (1894) et la crainte de la séparation, qui est un fragment d'un grand groupe, L'Âge mûr (1899). Cette dernière œuvre représente sans doute la séparation des deux artistes, puisque Rodin, qui ne tenait pas à se voir ainsi mis au pilori, semble s'être opposé à la commande du bronze par l'État. Heureusement, un amateur, le capitaine Tissier, commandera une fonte de L'Implorante puis une du groupe tout entier, aujourd'hui au musée d'Orsay.

En 1899, Camille Claudel s'installe au 19 quai Bourbon, et c'est très esseulée qu'elle poursuit son chemin artistique. Sa dernière sculpture d'envergure, en marbre, Persée et la Gorgone (1897-1902), peut également être envisagée comme une réflexion de l'artiste sur son existence. La similitude entre la description que fait Mathias Morhardt du David et Goliath des années 1876-1877 et la construction du Persée est frappante, notamment dans le geste du « géant (ici la Gorgone), qui, de son bras gauche, cherche à protéger encore dans un effort suprême sa tête que le jeune héros a coupée ». Cependant le fait que la tête de Méduse soit un autoportrait sans complaisance accentue la qualité dramatique du groupe, même s'il s'agit d'une reprise d'une œuvre de jeunesse.

Après 1896 ou 1897, on chercherait en vain une véritable création dans l'œuvre de Camille Claudel. De même que Niobide (1906) est créée à partir de Sakountala (1888), La Fortune (1904) utilise le personnage féminin de la Valse (1893) et Aurore (1900) est bien proche de la suite des Petites Châtelaines (1892).

À son retour de Chine, en 1905, Paul Claudel est épouvanté par l'état psychologique de sa sœur, par la saleté dans laquelle elle vit et par l'ampleur que prend son aversion pour Rodin, rendu responsable de tous ses maux et de ses difficultés professionnelles. Seul son frère l'inspire encore, le Buste de Paul à 37 ans est empreint de force sculpturale et de caractère, ainsi tout comme le portrait au crayon de son père, daté de 1905, montre encore toutes les qualités d'un dessin de sculpteur. En 1913, Camille Claudel est internée, d'abord à Ville-Évrard, à l'est de Paris. Après son transfert, nécessité par l'avancée de l'armée allemande, elle vivra près de trente ans à l'asile de Montdevergues à Montfavet près d'Avignon, refusant de dessiner ou de modeler.

— Anne RIVIÈRE

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Pour citer cet article

Anne RIVIÈRE. CLAUDEL CAMILLE (1864-1943) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<it>Camille Claudel</it>, A. Rodin - crédits : AKG-images

Camille Claudel, A. Rodin

Monument aux bourgeois de Calais, A. Rodin - crédits : Simon Bilbault

Monument aux bourgeois de Calais, A. Rodin

Monument aux bourgeois de Calais, A. Rodin - crédits : Simon Bilbault

Monument aux bourgeois de Calais, A. Rodin

Autres références

  • CORRESPONDANCE DE CAMILLE CLAUDEL

    • Écrit par Thierry DUFRÊNE
    • 905 mots

    Depuis les années 1980, l'étoile de Camille Claudel (1864-1943) n'a cessé de monter. Une rétrospective, en 1984, au musée Rodin à Paris et au musée Sainte-Croix de Poitiers, puis la publication du catalogue raisonné de son œuvre par Anne Rivière et Bruno Gaudichon, en 2001, ont beaucoup fait pour...

  • SAKOUNTALA (M.-C. Pietragalla)

    • Écrit par Odile COUGOULE
    • 1 020 mots

    Sakountala, spectacle créé en 2000 par Marie-Claude Pietragalla pour le Ballet national de Marseille, évoque, dans une grande fresque spectaculaire, la vie et l'œuvre de Camille Claudel (1864-1943). Associant la danse, les arts du cirque et le théâtre, cette création s'inscrit dans une démarche...

Voir aussi