BIOCARBURANTS ou AGROCARBURANTS

La filière brésilienne

LeBrésil a été un précurseur dans le domaine de la production de biocarburants : des incitations financières y ont été mises en place dès les années 1970, époque des deux premiers chocs pétroliers, dans le cadre du plan Proalcool. Le parc automobile y est conçu pour pouvoir utiliser aussi bien de l’essence qu’un mélange essence-bioéthanol ou du bioéthanol pur : les véhicules flex-fuel sont de plus en plus nombreux au Brésil. La production brésilienne de bioéthanol, qui représente 23 p. 100 de la production mondiale, permet de couvrir aujourd’hui plus de 40 p. 100 de la consommation nationale de carburant tout en permettant au Brésil d’être le premier exportateur mondial de bioéthanol. Cette production est assurée par plus de trois cents usines qui sont principalement localisées dans l’État de São Paulo. Mais plusieurs centaines de nouveaux projets, en cours d’étude ou de réalisation, concernent également différents États voisins, d’où la construction envisagée d’« alcooloducs » pour acheminer le bioéthanol produit jusqu’aux principales régions de consommation et aux ports d’exportation.

Le cours du bioéthanol qui sert aujourd’hui de référence sur le marché mondial est celui du marché à terme de São Paulo. Il y est établi, de façon significative, en dollar américain par litre. Le Brésil produit actuellement le bioéthanol le moins cher du monde. Plusieurs facteurs jouent dans ce sens. Au départ, la canne à sucre bénéficie du fait d’être une plante pérenne : les agriculteurs l’installent pour plusieurs années, la canne pouvant être récoltée au moins cinq à six fois au cours de son existence. Elle partage cet avantage d’ordre biologique et agronomique avec d’autres plantes tropicales comme le palmier à huile. Ensuite, s’il arrive que la canne à sucre soit encore cultivée dans le cadre de petites exploitations paysannes, elle l’est de plus en plus souvent dans le cadre des fazendas, grandes propriétés de plusieurs milliers d’hectares employant une main-d’œuvre agricole nombreuse, mais peu onéreuse. Enfin, l’efficacité énergétique (E.E.), c’est-à-dire le rapport entre l’énergie restituée par le carburant et l’énergie fossile nécessaire pour le produire, est particulièrement élevée dans le cas de la canne à sucre : elle est de 8 à 10 lorsqu’elle est calculée à la sortie de l’usine de production, contre 4 pour l’huile pure de colza, 2,5 pour le biodiesel et seulement de 1,4 à 1,3 pour les céréales (maïs ou blé). Cela s’explique très largement par le fait que la bagasse, sous-produit qui reste après l’extraction du jus sucré de la canne, sert pour produire l’énergie et la vapeur nécessaires à l’obtention de bioéthanol. Les unités de production brésiliennes les plus modernes génèrent même des surplus d’électricité qui permettent de couvrir 3 p. 100 de la consommation électrique du pays. L’E.E. est moins favorable, compte tenu des coûts énergétiques des transports, lorsque le bioéthanol brésilien arrive dans les grands ports européens, mais elle est encore de l’ordre de 5 à Rotterdam. La compétition entre les débouchés énergétiques et les débouchés alimentaires est bien moins sensible au Brésil qu’ailleurs dans la mesure où ce pays, qui est en train de devenir la « ferme du monde », dispose de dizaines de millions d’hectares de terres susceptibles d’être défrichées, même en tenant compte des espaces forestiers qui sont appelés à être absolument protégés sur le long terme.

La filière nord-américaine

Aux États-Unis, la production de biocarburants repose aujourd’hui essentiellement sur la production de bioéthanol obtenu à partir du maïs. De façon significative, la majorité des usines produisant aujourd’hui du bioéthanol sont localisées dans le Corn Soy Belt, grande région[...]