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ASSIMILATION SOCIALE

Quelques structures sociales complexes résultant du processus d'assimilation

Au sein de sociétés très différentes, les groupes de nouveaux venus peuvent se cristalliser de façon semblable. Pourtant les résultats ultimes du processus d'assimilation peuvent varier sensiblement d'une société à l'autre.

On examinera quelques exemples empruntés aux différents pays d'immigration.

Dans une société universaliste, fondée sur la réussite sociale, dotée d'un équipement industriel avancé, comme ce fut le cas pour les États-Unis au moment où ils reçurent le plus fort afflux d'immigrants, une nette pression s'exerça sur ces derniers pour qu'ils acceptent les notions universelles de base de cette société, sur le plan de la politique comme sur le plan technique ; qu'ils s'identifient au système de valeurs articulé sur la réussite sociale ; qu'ils transforment leurs structures traditionnelles en associations secondaires, calquées sur les institutions de la société d'accueil.

L'intensité et l'efficacité de cette pression varient cependant selon la catégorie sociale des immigrants auxquels elle s'applique. On distinguera deux sous-catégories : dans la première, les nouveaux venus continuent à faire preuve d'une certaine fidélité à leurs traditions dans leur approche des structures politiques et économiques du pays d'accueil. On ne trouve pas trace de ces sous-catégories dans les secteurs de la société d'accueil qui sont relativement préservés de cette notion de réussite qui sert de modèle à l'ensemble. On distingue dans les sociétés modernes d'accueil trois secteurs : le secteur rural (surtout dans les pays où il existe un paysannat « traditionaliste ») ; le secteur le plus fermé, constitué par les couches les plus élevées de la structure sociale, également par les couches les plus cultivées au sein desquelles les critères d'accueil sont fortement particularistes ; enfin le secteur des couches inférieures, exclues de la lutte pour la réussite sociale.

Dans le premier secteur, les nouveaux venus dont les dispositions sont fortement traditionalistes trouveront à s'intégrer. Dans le deuxième trouveront le mieux à s'intégrer ceux qui manifestent le plus haut degré de culture et de qualités d'assimilation des valeurs tenues pour essentielles par ces milieux clos. Dans le troisième, ceux que la réussite intéresse le moins et dont les possibilités professionnelles ou les ressources sont faibles. Les échecs au processus d'assimilation se manifesteront surtout dans le premier et dans le troisième secteur lorsque les exigences de la structure d'accueil mordent sur les modèles traditionnels des immigrants, les obligent à formuler des revendications nouvelles, minent la stabilité des groupes et provoquent des réactions personnelles qui contraignent le nouveau venu à l'opposition ou l'obligent à se réfugier dans l'apathie.

Les possibilités de désintégration du groupe nouveau venu, instabilité des relations sociales, délinquance juvénile, criminalité, etc., sont les plus fortes parmi les groupes dont le niveau culturel et éducatif est plus bas que le niveau culturel moyen de la société d'accueil.

La seconde sous-catégorie qui se développe dans les sociétés basées sur la réussite se caractérise par une compatibilité plus marquée entre les aspirations des nouveaux venus et les exigences du pays d'accueil, par l'intérêt qu'ils portent à la réussite sociale. Ils prennent part aux activités sociales du pays auquel ils s'identifient (en général le milieu urbain bourgeois ou petit-bourgeois), leur communauté traditionaliste se dissout, leurs modèles antérieurs s'estompent ; on leur affecte d'ailleurs des rôles particuliers selon leurs affiliations d'origine ; ils peuvent maintenir leur identité culturelle qui apparaît comme[...]

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Pour citer cet article

Shmuel Noah EISENSTADT. ASSIMILATION SOCIALE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AMÉRIQUE (Structure et milieu) - Géographie

    • Écrit par Jacqueline BEAUJEU-GARNIER, Danièle LAVALLÉE, Catherine LEFORT
    • 18 105 mots
    • 9 médias
    L'assimilation se fait rapidement pour ceux qui trouvent un métier. Au Canada, 57 p. 100 des habitants reconnaissent l'anglais comme leur langue maternelle, 67 p. 100 comme la seule langue officielle et, comme on compte, en outre, 13 p. 100 de bilingues, on peut estimer que 80 p. 100 des Canadiens savent...
  • CHICAGO ÉCOLE DE, sociologie

    • Écrit par Christian TOPALOV
    • 3 219 mots
    ...ces questions une théorie du cycle des interactions sociales, qui comprenait quatre phases : la concurrence, le conflit, l'ajustement et l'assimilation. Si l'assimilation était à ses yeux souhaitable et probable, certains de ses élèves, comme l'afro-américain Franklin Frazier (1894-1962) observaient plutôt...
  • COMMUNAUTÉ

    • Écrit par Stéphanie MOREL
    • 1 420 mots
    ...l'école de la République, de la glorification des « petites patries » pour encenser la « grande patrie », à la fois diverse et unique ; ou encore la prise en charge institutionnelle dans les années 1970 de la « scolarisation des enfants de migrants » au travers de structures différentialistes inédites....
  • INTÉGRATION, sociologie

    • Écrit par Gilles FERREOL
    • 1 272 mots

    De la thèse d'Émile Durkheim, De la division du travail social(1893), aux Formes élémentaires de la vie religieuse (1912), le terme intégration – qui désigne, dans son acception la plus générale, l'opération consistant à adjoindre un élément à d'autres, afin de former une totalité – est au...

  • Afficher les 8 références

Voir aussi