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ABRAHAM IBN DAUD dit RABAD Ier (1110 env.-env. 1180)

Historien, philosophe et astronome juif, Abraham ben David Halevi dit Ibn Daud ou Rabad Ier (Rabbi Abraham b. David) est connu des théologiens et philosophes latins du Moyen Âge sous le nom d'Avendauth et, notamment, à travers son œuvre de traducteur de l'arabe en latin (dont il s'acquitta parfois en collaboration avec Gundissalinus, comme pour le Fons vitae d'Ibn Gabirol), sous ceux de Jean d'Espagne et de Jean de Séville. Albert le Grand l'appelle « David le Juif » et lui attribue la rédaction, ou plutôt la compilation, du célèbre Liber de causis, ouvrage qui fut considéré longtemps comme étant d'Aristote ou de son école et dont les lecteurs attentifs, notamment Thomas d'Aquin, découvrirent autour de 1270 qu'il était composé d'extraits de l'Elementatio theologica du néo-platonicien Proclus.

Petit-fils du mathématicien et astronome Isaac b. Baruch Albalia, Abraham ibn Daud naquit à Cordoue ; il fut l'élève de son oncle Baruch b. Isaac Albalia et acquit une culture hébraïque, grecque, arabe et latine. Il dut fuir Cordoue après la conquête almohade et s'installa à Tolède, où il s'illustra comme un des grands traducteurs de ce centre intellectuel au xiie siècle. Il y mourut martyr dans des conditions qui restent ignorées.

Son œuvre historique majeure, le Sefer ha-Qabbalah (Livre de la Tradition), est un traité dirigé contre les karaïtes, démontrant l'authenticité des traditions défendues par les tenants du rabbinisme ou rabbanites. Il suit la transmission de la Loi depuis Moïse, les prophètes, l'époque du second Temple, la rédaction du Talmud. Il relate l'histoire des grands foyers du savoir de Kairouan, de l'Égypte, de la France et surtout de l'Espagne en son temps, insistant sur les transitions d'un foyer à un autre. Deux annexes complètent l'ouvrage : Zikhron divré Romi, une histoire de Rome, de sa fondation à la création de l'empire musulman ; Divré Malké Israel be Vait Šeni, une histoire des rois d'Israël de l'époque du second Temple. L'œuvre historique d'Abraham ibn Daud demeure importante pour l'étude de l'Espagne du xiie siècle. Éditée à Mantoue en 1514, elle a fait l'objet d'une édition critique et d'une traduction anglaise par Gerson D. Cohen (Sefer ha-Qabbalah, The Book of Tradition, Philadelphie, 1967).

L'ouvrage philosophique d'Abraham ibn Daud, écrit en arabe sous le titre Al-‘Aqīda al-Rafī‘a, est connu sous le titre hébreu de Sefer ha-Emouna ha-Rama (Livre de la Foi sublime). D'inspiration aristotélicienne, il rejette le néo-platonisme en vogue chez les auteurs juifs. Tenant pour acquis l'accord entre la Tōrah et la philosophie, il admet les preuves de l'existence de Dieu d'Aristote et d'Avicenne sur le « premier moteur » et sur la nécessité pour tous les êtres contingents de tirer leur origine d'un être nécessaire qui est Dieu. Pour lui, l'âme humaine est une substance indépendante du corps et le monde a été créé ex nihilo ; le libre arbitre de l'homme face à l'omniscience divine s'entend comme un simple possible n'existant que jusqu'à la décision. L'éthique de l'ouvrage s'identifie à celle de la Tōrah, qu'il considère comme l'expression la plus parfaite des principes philosophiques.

Sur l'œuvre astronomique d'Abraham ibn Daud, on ne dispose que d'une mention d'Isaac Israeli dans son Yesod ‘Olam.

— Gérard NAHON

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Écrit par

  • : directeur d'études émérite à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)

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Pour citer cet article

Gérard NAHON. ABRAHAM IBN DAUD dit RABAD Ier (1110 env.-env. 1180) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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