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UCCELLO PAOLO (1397-1475)

La perspective d'Uccello

Uccello séjourne ensuite à Venise de 1425 à 1430, années au cours desquelles Florence assiste à l'explosion soudaine du génie de Masaccio († 1428). Bien que sur le mode négatif, le fait sera déterminant pour Uccello. En effet, quand il quitte Venise pour rentrer à Florence, il se retrouve dans un milieu déjà acquis aux nouveaux principes essentiels de la révolution picturale, posés par Brunelleschi dans la construction perspective avec « points de distance » (perspectiva artificialis), puis mis en pratique par Donatello dans les reliefs écrasés (rilievi a schiacciato) de la vieille sacristie de Saint-Laurent, et par Masaccio dans sa Trinité de Sainte-Marie-Nouvelle et dans l'étage inférieur des fresques de la chapelle Brancacci, et enfin, peu de temps après, codifiés en 1435-1436 par Leon Battista Alberti dans son petit traité De pictura. Si le séjour d'Uccello dans le nord de l'Italie l'avait plongé dans l'ambiance du gothique tardif, le fait de se retrouver dans le climat d'émulation de sa ville, à un moment où les discussions et les heurts atteignaient leur point culminant, dut l'amener progressivement à élaborer une conception très personnelle de la perspective. C'est sans doute à cette époque, précisément, qu'appartiennent certaines œuvres pour l'attribution desquelles la critique n'est pas unanime et dont le noyau central est constitué par la première partie des fresques de la chapelle de l'Assomption au Dôme de Prato, auxquels doit s'ajouter la fresque d'un Presepe découverte dans l'église de Saint-Martin-Majeur à Bologne.

<it>Saint Georges et le dragon</it>, Uccello - crédits :  Bridgeman Images

Saint Georges et le dragon, Uccello

D'autres œuvres, probablement de la même époque, telles que les deux petites compositions du Saint Georges du musée Jacquemart-André de Paris et de la National Gallery de Londres, les fresques du cloître de San Miniato, avec les Scènes de la vie monastique, et la Crèche peinte à fresque à San Martino alla Scala à Florence, nous font comprendre ce que le peintre entendait par « perspective ». Acceptant les directives de son maître Ghiberti telles qu'il les résumera dans le troisième de ses Commentaires, Uccello renonce aux principes essentiels de la réflexion dans un miroir plan, qui avaient servi à Brunelleschi pour bâtir sa construction perspective, fondement même de la géométrie descriptive, et en vient à reproposer, avec retard, toute la problématique de l'optique (perspectiva naturalis sive communis) qu'exposaient en détail les traités d'Alhazen (Ibn al-Haytham, xie s.), Vitelo, Roger Bacon et John Peckham (xiiie s.), et qui disparut de l'horizon scientifique avec les découvertes de Kepler (1604-1610) et de Galilée (1609). Toutefois, dans cette référence à l'optique, ce n'est pas le système scientifique qui intéresse Uccello, mais le fait que cette science est, entre toutes, « douce et pleine de beauté autant que d'utilité » (Bacon, Opus majus).

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Écrit par

  • : professeur à l'Istituto di storia dell'arte, università degli studi di Firenze

Classification

Pour citer cet article

Alessandro PARRONCHI. UCCELLO PAOLO (1397-1475) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<em>Le Miracle de l’hostie profanée</em>, P. Uccello - crédits : DeAgostini/ Getty Images

Le Miracle de l’hostie profanée, P. Uccello

<it>Saint Georges et le dragon</it>, Uccello - crédits :  Bridgeman Images

Saint Georges et le dragon, Uccello

<it>La Bataille de San Romano</it>, Uccello - crédits :  Bridgeman Images

La Bataille de San Romano, Uccello

Autres références

  • ANDREA DEL CASTAGNO (1390 ou 1406 ou 1421-1457)

    • Écrit par Philippe LEVANTAL
    • 741 mots
    • 3 médias

    Au début du Quattrocento, divers peintres florentins élaborent un style qui brise avec ce que le Trecento, dominé par Giotto, comportait encore d'empreinte gothique. La conquête, par Masaccio, d'un espace cohérent ouvre la voie à Uccello, à Andrea del Castagno, qui, de manière fort...

  • BALDOVINETTI ALESSO ou ALESSIO (1425-1499)

    • Écrit par Marie-Geneviève de LA COSTE-MESSELIÈRE
    • 488 mots

    L'art de Baldovinetti constitue un point de rencontre entre les deux tendances qui s'étaient affirmées dans la peinture florentine de la génération précédente, celle des coloristes et celle des dessinateurs. Il se rattache plus profondément au premier groupe, à Domenico...

  • CLOÎTRES

    • Écrit par Léon PRESSOUYRE
    • 5 514 mots
    • 3 médias
    ...les galeries d'un cloître de ce couvent, dit cloître de Saint-Antonin ; les restaurations du xviie siècle en ont laissé subsister quelques-unes ; dans le grand établissement dominicain de Santa Maria Novella, Paolo Uccello, peignant dans des tons glauques un cycle de la Genèse, a valu au chiostro...
  • FRESQUE

    • Écrit par Ève BORSOOK
    • 6 717 mots
    • 12 médias
    ...siècle, on réalisait différemment des plans précis pour des décorations murales entières : par la mise au carreau du modello. C'est le dessin d' Uccello pour le monument de John Hawkwood – dessin conservé aux Offices – qui en est le premier exemple connu qui ait survécu. L'invention de ce procédé...
  • Afficher les 7 références

Voir aussi