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ÉQUATIONS ALGÉBRIQUES

Le second degré

L'histoire des équations quadratiques :

remonte, comme celles des équations affines, à des époques très reculées. La mathématique égyptienne n'a pratiquement rien découvert en ce domaine. Au contraire, l'on doit beaucoup, l'essentiel même, aux Babyloniens.

Premier exemple

Sur une tablette de l'ancien âge babylonien (YBC 4663), on demande de trouver un rectangle, connaissant son demi-périmètre, 60 30′, et son aire, 70 30′.

Il s'agit donc de résoudre le système :

Voici la méthode proposée par le scribe (numération à base 60) : prendre la moitié de la longueur et de la largeur :

élever au carré :
en retrancher l'aire :
prendre la racine carrée : 10 45′ ; ajouter la demi-somme :
retrancher :

Second exemple

Problème 7 de la tablette BM 13901, remontant à l'ancien âge babylonien, 1800 environ avant notre ère : « J'ai additionné sept fois le côté de mon carré et onze fois la surface : 60 15′. » Soit 11 x2 + 7 = 60 15′.

Solution : « Tu inscriras 7 et 11. Tu porteras 11 à 60 15′ : 1̀ 8045′. Tu fractionneras en deux 7 : 30 30′. Tu croiseras 30 30′ et 30 30′ : 12015′. À 1̀ 8045′ tu ajouteras 1̀ 210, qui est le carré de 9. Tu soustrairas 30 30′, que tu as croisé, de 9 : tu inscriras 50 30′. L'inverse de 11 ne peut être dénoué. Que dois-je poser à 11 qui me donne 50 30′ : 30′, son quotient. Le côté du carré est 30′. »

À savoir : l'équation à résoudre est ax2 + bx = c. On calcule b2/4, puis b2/4 + ac, dont la racine est √(b2/4 + ac). On forme √(b2/4 + ac) − b/2. Le coefficient  a  n'ayant  pas  d'inverse  dans l'anneau des nombres exprimables en base 60, on divise par a, par tâtonnements, √(b2/4 + ac) − b/2. Le quotient est le côté cherché. La numération est sexagésimale : 1̀ + 600, et 1′ = (1/60). 10.

D'autres exemples, fort nombreux, montrent que le calculateur babylonien sait résoudre toutes les équations quadratiques. Il y a pourtant un obstacle : ce calculateur ne s'exprime pas dans R, corps des réels, mais dans un sous-anneau, celui des nombres exprimables d'une façon finie, en base 60. Pour que ax2 + bx + c = 0 ait des racines, il ne suffit donc pas que b2 − 4 ac ≥ 0, mais il faut encore que cette quantité soit le carré d'un élément de l'anneau et que, de plus, la division finale par a soit possible dans l'anneau.

Les Grecs font, de la résolution des équations du second degré, la base même de toute leur géométrie. Mais, pour pouvoir travailler dans R, ils remplacent les calculs babyloniens par des constructions à la règle et au compas. Pour qu'une équation quadratique ait alors des racines, il suffira que b2 − 4 ac ≥ 0.

Le fait de construire les solutions des problèmes à partir des segments donnés, à la règle et au compas, conduit les géomètres grecs à l'étude des binômes, segments dont les mesures sont de la forme √ a + √ b, a et b rationnels. Cette étude savante n'aboutit guère à des conclusions définitives. Elle occupe cependant une grande partie des Éléments d'Euclide et joue un rôle important dans le développement de la théorie des équations. Cependant les algébristes grecs calculent dans Q, plus précisément dans Q+. Pour eux, une condition supplémentaire s'impose : b2 − 4 ac doit être le carré d'un rationnel. Toute l'algèbre diophantienne trouve là son origine. Elle est tenue à manipuler des équations indéterminées où certaines expressions doivent être des carrés parfaits dans Q. L'extraordinaire habileté de Diophante en ce domaine sera un très puissant stimulant pour les mathématiques des xvie et xviie siècles.

Les Arabes et leurs disciples occidentaux jusqu'au xvie siècle n'apportent[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, membre correspondant de l'Académie internationale d'histoire des sciences

Classification

Pour citer cet article

Jean ITARD. ÉQUATIONS ALGÉBRIQUES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABEL NIELS HENRIK (1802-1829)

    • Écrit par Jean-Luc VERLEY
    • 1 304 mots

    À une époque où la Norvège était d'une extrême pauvreté par suite des guerres qui l'avaient ruinée, Niels Henrik Abel, second fils d'une famille de sept enfants, naquit le 5 août 1802 dans l'île de Finnøy, près de Stavanger. Dès sa quinzième année, il lut et assimila les travaux les plus difficiles d'Euler...

  • AL-KHWARIZMI

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 183 mots

    Résident de la maison de la Sagesse à Bagdad, le mathématicien Abu Ja'far Muhammad ibn Musa al-Khwarizmi a participé à la traduction de nombreux manuscrits scientifiques grecs. Son traité intitulé Hisab al-jabr w'al-muqabala est considéré comme le premier manuel d'algèbre...

  • ARITHMÉTIQUES (Diophante)

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 188 mots

    Diophante d'Alexandrie, parfois appelé le « père de l'algèbre », est connu par son ouvrage les Arithmétiques, qui traite des solutions des équations algébriques. On ne sait pratiquement rien de sa vie et ses dates de naissance et de mort sont très controversées. Les Arithmétiques...

  • BÉZOUT ÉTIENNE (1739-1783)

    • Écrit par Jacques MEYER
    • 172 mots

    Le nom d'Étienne Bézout doit être associé à l'utilisation des déterminants dans la théorie des équations algébriques. Dans son mémoire à l'Académie (1764) et surtout dans son ouvrage Théorie générale des équations algébriques (1779), Bézout donne des règles pour résoudre...

  • Afficher les 27 références

Voir aussi