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CODE NAPOLÉON

Valeur actuelle

Il ne faut pas cacher, pourtant, que le Code Napoléon a trouvé un rival dans le Bürgerliches Gesetzbuch : le Code civil allemand de 1896.

De toute manière, il a vieilli, régissant aujourd'hui une société profondément différente de celle de 1804. On a dû en remplacer bien des parties. Dans le domaine de la famille, par exemple, il a fallu notamment abroger l'incapacité de la femme mariée, accroître dans les successions les droits du conjoint (sacrifié dans le Code au souci de « conserver les biens dans les familles »), reconnaître les droits de l'enfant naturel, adapter la réglementation du divorce à l'évolution des mœurs, développer l'adoption, etc.

Le problème de la révision du Code civil a été souvent discuté. En 1945, le gouvernement français avait nommé à cet effet une commission dont les travaux ont pu inspirer diverses lois. Quinze ans plus tard, un garde des Sceaux entreprenait de rénover le Code, matière par matière. Le travail se poursuit.

Ces efforts ont « rajeuni » le Code, mais n'ont eu qu'un effet partiel. Sans doute ne pouvait-il en être autrement. Il est probablement devenu impossible de codifier le droit comme au début du xixe siècle : de réunir un ensemble de règles juridiques stables dans un nombre limité de codes couvrant chacun un domaine de relations sociales.

Le droit de propriété, par exemple, reste dans sa définition ce qu'il était en 1804. Mais que sont aujourd'hui les droits du propriétaire ? Nul ne peut le dire, en ce qui concerne du moins le propriétaire immobilier. Ses droits et ses devoirs sont l'objet d'un ensemble très complexe de règles essentiellement variables et fort différentes selon qu'il possède une terre rurale ou un terrain urbain (encore celui-ci peut-il appartenir à diverses « zones »), un appartement qu'il occupe ou qu'il loue (à quel usage ?), un domaine qu'il exploite ou qu'il a donné à ferme (dans quelle région ?). La propriété immobilière à elle seule exigerait un code qui englobe le droit de la construction et celui de l'urbanisme, le statut des baux ruraux et celui des locations à usage commercial ou à usage d'habitation. Mais ce code serait beaucoup plus volumineux que le Code civil et ses règles se modifieraient sans cesse, sous la pression des besoins sociaux et des efforts accomplis pour y répondre. Le droit traverse une crise. Celle-ci est d'autant plus profonde qu'elle ne fait que refléter le désarroi de notre civilisation.

— André TUNC

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université de Paris-I

Classification

Pour citer cet article

André TUNC. CODE NAPOLÉON [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CODE CIVIL FRANÇAIS

    • Écrit par Christian HERMANSEN
    • 273 mots

    Dans l'histoire juridique de l'Occident, le Code Napoléon de 1804 marque le triomphe d'une conception codificatrice esquissée par Colbert. Depuis son apparition dans le droit impérial romain du Bas-Empire, un code se présentait toujours comme une œuvre de compilation. Organisée par matières,...

  • ADOPTION

    • Écrit par Pierre MURAT
    • 8 894 mots
    ...l'enfant par le sang. Mais aucun des projets de codification révolutionnaires n'ayant abouti, après beaucoup d'hésitations et de discussions, l'adoption ne fut légalement consacrée qu'avec le Code civil de 1804, mais dans une forme toute autre. L'adoptant doit être âgé de plus de 50 ans et...
  • BOURGEOISIE FRANÇAISE

    • Écrit par Universalis, Régine PERNOUD
    • 7 659 mots
    ...définition met l'accent sur sa conséquence la plus importante, modifiant les mœurs tant publiques que privées, et donc la vie quotidienne du pays tout entier. Le Code civil, promulgué le 21 mars 1804, par celui en qui on voit à juste titre le fils de la Révolution, Napoléon, est calqué sur la loi romaine, en...
  • CAMBACÉRÈS JEAN-JACQUES RÉGIS DE (1753-1824) deuxième consul (1799-1804) archichancelier d'Empire (1804)

    • Écrit par Jean MASSIN
    • 625 mots

    Né à Montpellier d'une famille de noblesse de robe, conseiller à la cour des aides de Montpellier en 1774, président du tribunal criminel de l'Hérault en 1790, Cambacérès arrive à Paris, député de son département à la Convention, comme juriste compétent, bon vivant notoire et...

  • CIVIL DROIT

    • Écrit par Muriel FABRE-MAGNAN
    • 9 077 mots
    ...dans leur ordre naturel) et de Pothier au xviiie siècle en sont encore imprégnés, travaux qui ont été largement repris dans le Code civil de 1804. Pièce maîtresse de l'œuvre de codification du droit engagée dans la période révolutionnaire, le Code civil fut finalement rédigé grâce au talent de ...
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Voir aussi