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URSULEAC VIORICA (1894-1985)

Le nom de cette cantatrice roumaine reste attaché à la musique de Richard Strauss, dont elle fut l'une des principales interprètes, créant les œuvres majeures de la fin de sa vie.

Née à Cernǎuţi (aujourd'hui Tchernovtsy, en Ukraine) le 26 mars 1894 de parents grecs, Viorica Ursuleac fait ses études musicales à l'Académie d'État de Vienne avec Philip Forstén et Franz Steiner avant de travailler avec Lilli Lehmann à Berlin. C'est curieusement dans un rôle de mezzo qu'elle fait ses débuts à Agram (aujourd'hui Zagreb) en 1922, celui de Charlotte de Werther (Massenet). En 1923 et 1924, elle chante à l'opéra de sa ville natale avant d'être engagée à la Volksoper de Vienne (1924-1926) par Felix Weingartner. Elle s'affirme comme soprano dramatique et voit rapidement la plupart de ses rivales écartées par la montée du nazisme : engagée à l'opéra de Francfort (1926-1929) par celui qui deviendra son mari, le chef d'orchestre Clemens Krauss (1893-1954), elle devient l'une des interprètes favorites de Richard Strauss, profitant par là même des sympathies qu'il avait su s'attirer chez les dirigeants nazis. En 1929, Fritz Busch l'appelle à Dresde mais, l'année suivante, elle rejoint Vienne, où Clemens Krauss a été nommé directeur de la musique à l'Opéra (1930-1935). Elle le suit ensuite à la Staatsoper de Berlin (1935-1937) et à l'opéra de Munich (1937-1944). Comme la plupart des chanteurs de cette époque, elle se produit assez rarement en dehors des théâtres auxquels elle est attachée. Elle chantera néanmoins à la Scala de Milan, à Covent Garden (en 1934, pour la première représentation en Grande-Bretagne de Švanda DudákSchwanda, le joueur de cornemuse — de Jaromír Weinberger), à Rome, à Bruxelles et au Teatro Colón de Buenos Aires (1948). Invitée régulièrement au festival de Salzbourg, elle s'y produit de 1930 à 1934, en 1942 et en 1944.

Après la guerre, elle suit son mari, interdit de direction par les Alliés, en Amérique du Sud avant de revenir en Europe, en 1949 ; elle enseigne au Mozarteum de Salzbourg et donne de nombreux concerts, notamment des récitals de lieder, accompagnée au piano par Clemens Krauss. À la mort de celui-ci, en 1954, elle se retire dans le Tyrol, à Ehrwald, où elle meurt le 22 octobre 1985.

Soprano dramatique, Viorica Ursuleac possédait un vaste répertoire couvrant presque une centaine de rôles, de Mozart à Wagner (Senta du Vaisseau fantôme et Sieglinde dans La Walkyrie), Verdi (Élisabeth de Valois dans Don Carlos) et Puccini (rôles titres de Tosca et de Turandot). Elle a également créé des opéras de Bernhard Sekles, de Ernst Křenek et d'Eugène D'Albert. Mais c'est surtout à la musique de Richard Strauss qu'elle a consacré l'essentiel de sa carrière : elle incarne la Maréchale du Chevalier à la rose et l'Impératrice de La Femme sans ombre, elle crée le rôle titre d'Arabella (Dresde, 1933), Maria dans Der Friedenstag (Jour de paix, Munich, 1938) — ouvrage qui lui est dédié —, la Comtesse dans Capriccio (Munich, 1942, livret de Clemens Krauss). Le 16 août 1944, elle participe à la « couturière » de L'Amour de Danaé à Salzbourg. Mais la création publique sera différée, les nazis ayant ordonné la fermeture de tous les théâtres après la tentative d'assassinat contre Hitler. Strauss lui dédiera aussi plusieurs lieder.

Viorica Ursuleac appartenait à une génération de chanteurs qui privilégiaient le résultat vocal par rapport aux impératifs scéniques ou musicaux. La beauté du timbre et l'efficacité d'une technique solide parviennent à faire oublier le côté un peu démodé de cette approche du chant, inscrite dans le contexte d'une époque révolue.

Avec R. Schlötterer, elle a écrit Singen für Richard Strauss : Erinnerungen und Dokumente[...]

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

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Pour citer cet article

Alain PÂRIS. URSULEAC VIORICA (1894-1985) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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