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SAINT-GUILHEM-LE-DÉSERT

Saint-Guilhem-le-Désert est d'abord un site exceptionnel, dans le cadre grandiose des gorges de l'Hérault. C'est en raison de sa sauvagerie que Guillaume, comte de Toulouse, cousin de Charlemagne par sa mère Aude, fille de Charles Martel, le choisit pour terminer en odeur de sainteté une vie jusque-là consacrée aux entreprises guerrières. Vers 804, il renonce au siècle et se fait moine à l'abbaye d'Aniane qu'avait fondée en 782 Benoît, le grand réformateur de la discipline monastique à l'époque carolingienne. Puis, peu après, sur le conseil et avec l'aide de ce dernier, il fonde non loin d'Aniane, dans le désert de Gellone, un monastère qu'il dote richement le 15 décembre 804. Il s'y retire en 806 et y meurt en 812. On pense assez communément que ce personnage historique fut l'ébauche du plus célèbre des héros de l'épopée médiévale après Charlemagne et Roland : Guillaume d'Orange.

Aux xie et xiie siècles, Gellone, qui devient Saint-Guilhem-le-Désert, est l'objet d'un important pèlerinage, et le Guide du pèlerin de Saint-Jacques-de-Compostelle fait obligation aux pèlerins empruntant la route de Toulouse de « rendre visite au corps du bienheureux confesseur Guillaume ». C'est aussi le moment où l'on reconstruit l'église et le cloître.

Du monastère carolingien, il reste de nombreux fragments du mobilier liturgique et funéraire, sous forme de panneaux et de pilastres sculptés, dont les motifs d'entrelacs et de tresses, souvent d'excellente qualité, sont exécutés en méplat ou en biseau.

Une première reconstruction eut lieu vers l'an mille, entre 990 et 1006. L'église, connue par des fouilles menées entre 1962 et 1970, se caractérisait alors par une organisation du chevet tout à fait intéressante pour l'étude des cryptes édifiées durant la période intermédiaire entre les époques carolingienne et romane. À l'est et en léger contrebas d'une basilique charpentée de petites dimensions était établie une confession massive, de forme rectangulaire, divisée en deux nefs voûtées par une file médiane de robustes piliers. Au fond de la nef de droite, une banquette de pierre supportait le tombeau de saint Guilhem. À cette confession était superposé un sanctuaire surélevé, de même plan rectangulaire, contenant l'autel majeur dédié au Sauveur. Cette disposition étagée se trouve dans de nombreuses églises des xe et xie siècles, notamment en Italie. Quant à la forme rectangulaire du chevet, elle était à peu près de règle dans le Languedoc méditerranéen avant la diffusion, au xie siècle, du premier art roman méridional.

C'est à cet art, d'abord apparu en Italie du Nord, qu'appartient précisément le monument actuel. À une époque qu'on peut situer dans le deuxième quart du xie siècle, on commença par construire la nef et ses collatéraux, en pierres de petites dimensions, façonnées au marteau, avec un décor mural de petites arcatures. L'édifice est voûté de berceaux en plein cintre soulagés par des doubleaux larges et minces reposant sur des piliers cruciformes et des pilastres encore dépourvus de sculptures. On conserva momentanément le chevet préroman, sans doute en raison de la vénération dont le tombeau était l'objet, et on le cantonna de deux minuscules absidioles prises dans un mur droit.

Dans un deuxième moment, on éleva un grand transept, une vaste abside et deux véritables absidioles, tout en respectant l'ancienne confession devenue crypte, qu'on enveloppa par le nouveau chevet, comme un précieux reliquaire. L'évolution du premier art roman méridional s'observe dans le développement d'un décor de niches sous la corniche de l'abside centrale et surtout à travers l'apparition d'une première sculpture sur pierre. Il s'agit de beaux chapiteaux cubiques ornant les fenêtres[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail

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Pour citer cet article

Marcel DURLIAT. SAINT-GUILHEM-LE-DÉSERT [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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