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ELDRIDGE ROY (1911-1989)

On passe toujours trop vite sur ces musiciens qui ne sont dits de transition que pour excuser l'attention distraite que l'on porte à leur talent. Que Roy Eldridge ait été l'indispensable maillon qui relie Louis Armstrong à Fats Navarro, Clifford Brown, Dizzy Gillespie et Miles Davis nous force-t-il à ignorer l'évidence de ses dons et l'aveuglante personnalité de son style ? Premier Noir à figurer en tête du palmarès de la revue Down Beat, Roy Eldridge apparaît aujourd'hui comme un musicien majeur. Dizzy Gillespie, avec qui il a enregistré de nombreux duos, n'avouait-il pas : « Roy Eldridge était mon idole. J'essayais de jouer comme lui et je n'y arrivais pas. Cela me rendait fou et finalement je me suis décidé à tenter autre chose : on a appelé ça le style bop » ?

Roy David Eldridge naît le 30 janvier 1911 à Pittsburgh (Pennsylvanie). Dès ses six ans, il pratique la batterie dans l'orchestre de son école. Il conservera toujours un goût marqué pour la percussion, ce qui lui permettra d'affronter sans déchoir Jo Jones au festival de Newport de 1957 et d'être le batteur de Sidney Bechet à Knokke-le-Zoute un certain soir de juillet 1958. Mais, pour l'heure – il a près de douze ans –, il s'initie à la trompette grâce aux conseils de son frère Joe, habile joueur de saxophone alto. Ses débuts professionnels se situent en 1927 dans des spectacles itinérants puis dans l'orchestre d'Oliver Muldoon. Il dirige même à cette époque sa propre formation sous le nom de Roy Elliott. Encore à la recherche de son style et de sa technique, il appartient successivement aux formations d'Horace Henderson (1928), de « Speed » Webb (1929-1930) – où il côtoie notamment Teddy Wilson, Vic Dickenson et Jabbo Smith – et aux orchestres de Johnny Mills et de Zack Whyte, où il rencontre Sy Oliver. Il se perfectionne alors avec Chew Berry (1929). Au début des années 1930, il s'installe à New York et découvre enfin Henry Red Allen et, surtout, Louis Armstrong, au contact desquels sa personnalité va très vite s'affirmer. C'est au sein des grands orchestres que va désormais se développer sa carrière. Il se distingue parmi les pupitres de la formation de Cecil Scott et de Elmer Snowden. C'est dans cette dernière qu'Otto Hardwick lui donne le surnom qui lui restera : « Little Jazz ». On le retrouve avec les musiciens de Teddy Hill et de Charlie Johnson avant qu'il ne dirige avec son frère son propre ensemble à Pittsburgh (1933). Soliste vedette des Mackinney's Cotton Pickers (1934), des orchestres de Teddy Hill (1935) et de Fletcher Henderson (1935-1936), il se produit aussi à New York de manière indépendante, au Savoy et au Famous Door (1938), à 1'Arcadia Ballroom (1939) et au Kelly's Stables (1940). C'est l'époque où, dans le court métrage Smash your Baggage, il est pour la première fois enregistré en solo sur Buggle Call. De 1941 à 1943, il fait partie de 1'orchestre de Gene Krupa et donne avec lui au disque son plus grand succès, Rockin' Chair. Roy Eldridge est alors un virtuose éblouissant que les grandes formations exhibent comme un véritable phénomène affamé de ces trumpet battles où triomphent sans peine ses moyens hors du commun. On se l'arrache : Artie Shaw (1944-1945), le J.A.T.P. (1946-1947), Gene Krupa, avec qui il effectue de bien humiliantes tournées dans le sud des États-Unis (1949), Benny Goodman (1950), le J.A.T.P. encore (1951). Il se multiplie, en Amérique comme en Europe – notamment à Paris –, et apparaît dans de très nombreux festivals. Au milieu des années 1950 cependant s'altèrent les capacités techniques que ce trompettiste de la hargne et de la pugnacité sollicitait jusqu'à leurs limites extrêmes. Son activité ne se ralentit pas pour autant : il codirige un quintette avec [...]

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Pierre BRETON. ELDRIDGE ROY (1911-1989) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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