Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

MORRIS ROBERT (1931-2018)

Artiste, enseignant au Hunter College de New York et théoricien, Robert Morris a fortement contribué à l'expansion du champ de la sculpture, dans les années 1960-1970. Il a montré que la signification d'une œuvre dépend plus de sa relation à l'espace environnant et de l'expérience qu'en fait le spectateur que de sa forme.

Né le 9 février 1931 à Kansas City (Missouri), Robert Morris fait des études d'art et d'ingénieur avant de suivre l'enseignement de la California School of Arts. Dès la fin des années 1950, en Californie puis à New York où il s'est établi en 1961, l'artiste travaille à des improvisations théâtrales, qui vont devenir collectives et interdisciplinaires, avec le Judson Dance Theater. Selon l'historienne d'art Rosalind Krauss, la sculpture se définit alors, pour lui, négativement : « Elle se réduit à la simple détermination d'être ce qui dans la pièce [la galerie] n'est pas la pièce », ou, de même, ce qui dans le paysage n'est pas le paysage (Installation à la Green Gallery, 1964, New York ; Untitled [Mirror Boxes], 1966). Morris s'inscrit dans le contexte du minimalisme : selon qu'elles sont couchées ou dressées, des formes identiques produisent une perception différente, qui « dépend à l'évidence de l'orientation dans l'espace qu'elles partagent avec notre propre corps », note R. Krauss dans Passages in Modern Sculpture, qui poursuit : « leur différence est leur signification sculpturale » (Sans titre, 1965). Les œuvres, faites de segments permutables ou de lambeaux de feutres découpés, mis en forme dans l'acte même de leur accrochage, participent de cette notion d'Antiform élaborée par l'artiste. Dans les années 1970, avec ses Observatoires construits dans des sites naturels, Morris travaille l'articulation de l'architecture avec le paysage, avant de reconsidérer le statut du « monument » et du « baroque » dans la société contemporaine (participation à la Dokumenta 8, Kassel, 1987).

Des œuvres créées dans les années 1960-1970 et reprises en 1995 montrent l'évolution radicale de sa problématique. Steam (1967-1995), faite uniquement de vapeur d'eau, présentée en 1995 au musée d'Art contemporain-CAPC de Bordeaux – donc dans un espace clos –, avait été montrée en extérieur à la Western Washington University en 1967 pour souligner alors le caractère aléatoire de la forme. Au CAPC, l'immense nuage de vapeur qui s'élance d'un champ de galets dans la nef de l'ancien entrepôt colonial est une installation dramatique qui souligne le nouveau regard posé par Morris sur la sculpture. Toujours en 1995, une rétrospective lui est consacrée au Centre Georges-Pompidou, à Paris.

Robert Morris meurt à Kingston (État de New York), le 29 novembre 2018.

— Élisabeth LEBOVICI

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Élisabeth LEBOVICI. MORRIS ROBERT (1931-2018) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BODY ART

    • Écrit par Anne TRONCHE
    • 4 586 mots
    • 1 média
    ...hybrides, au croisement de diverses disciplines, dont certaines peuvent apparaître comme la préfiguration d'un art du corps. Ainsi, de 1962 à 1965, l'artiste Robert Morris, très souvent associé à l'art minimal en raison de ses sculptures composées de formes géométriques, réalise la chorégraphie de six spectacles...
  • ENVIRONNEMENT, art

    • Écrit par Universalis, François LOYER
    • 3 218 mots
    ...l'équilibre biologique de la nature – ce qu'on a appelé l'écologie (du grec oikos, la « maison » : encore un mot d'architecte...). Dès 1970, Robert Morris reçoit la première commande de sculpture environnementale qui possède une dimension écologique : Earthwork destinée au parc Belknap,...
  • LAND ART

    • Écrit par Gilles A. TIBERGHIEN
    • 3 673 mots

    Au début des années 1960, une tendance de l'art américain, mais aussi européen, va mettre de plus en plus l'accent sur l'utilisation des matériaux naturels, la terre, l'eau ou l'air, qui manifestent le processus à l'œuvre et impliquent du même coup une nouvelle conception de la durée dans l'art. Corrélativement,...

  • LE STYLE RUSTIQUE (E. Kris)

    • Écrit par François-René MARTIN
    • 1 018 mots

    Ernst Kris (1900-1957) est un des historiens les plus fascinants de l'« école viennoise » en histoire de l'art. Élève de Julius von Schlosser, Kris est nommé, à vingt ans, conservateur du département de sculptures et d'arts appliqués du musée de Vienne. Historien de l'art...

  • Afficher les 7 références

Voir aussi