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PROTESTANTISME LIBÉRAL

Tendance de la théologie protestante qui, née de l'Aufklärung, en poursuit l'œuvre, en Allemagne surtout, dans le domaine de la critique des dogmes et de l'Écriture.

Le protestantisme libéral, qui a bien des points en commun avec le libéralisme culturel, politique et économique, s'en distingue pourtant par son souci de demeurer essentiellement religieux et théologique. Il s'oppose à tout autoritarisme dans le domaine de la foi, au cléricalisme et au dogmatisme qui dévoient la religion, laquelle dépend avant tout du libre examen de la raison et de la libre adhésion du cœur.

On peut distinguer dans ce courant trois périodes. La première, qu'illustrent les œuvres de D. F. Strauss (1808-1874) et de C. Baur (1792-1860), se caractérise par une critique historique et par une critique des textes qui se font radicales ; elle développe des spéculations philosophiques inspirées de Hegel. La deuxième période est dominée par A. Ritschl (1822-1889) et ses élèves. Ce théologien kantien essaie de débarrasser la religion des éléments métaphysiques qui la dénaturent pour la faire apparaître en son essence, c'est-à-dire comme une manifestation d'ordre éthique. A. von Harnack (1851-1930), qui se rattache à cette école, définit l'essence du christianisme comme l'expression d'une morale humanitaire. La troisième période, qui est celle de l'histoire des religions, essaie d'expliquer le christianisme à partir du monde ambiant qui l'a vu naître. Les chefs de file de cette tendance (Gunkel, Bousset, Weiss, Wrede) mettent en relief les forces élémentaires dont le jeu a abouti à structurer les mythes et les rites religieux.

Le « libéralisme protestant français », resté beaucoup plus proche de la pensée des Lumières que la théologie allemande, a agi surtout dans le sens de la séparation entre l'Église et l'État et a lutté, en faveur de la liberté des consciences, contre l'influence de l'Église catholique.

Misant ici et là sur la liberté du cœur et des consciences, le protestantisme libéral est devenu un mouvement multiforme et complexe. Il affirme la nécessité de poursuivre sans relâche l'œuvre de la Réformation et de reformuler les vérités de la foi chrétienne pour le temps présent. Dans ce dessein, il fait confiance aux méthodes scientifiques modernes, qu'il applique sans hésitation en matière de théologie. Cette attitude conduit souvent à réduire la foi à ce qui en est accessible aux méthodes employées, et à tenir le reliquat pour des affirmations d'une autre époque. Dans sa lutte contre l'autoritarisme politique ou ecclésiastique, le protestantisme libéral entend faire preuve d'une honnêteté intellectuelle dont ses représentants les plus éminents, des historiens tels que A. von Harnack et des philosophes tels que E. Troeltsch, ont donné l'exemple, notamment dans leurs efforts pour concilier la religion et la raison, le christianisme et la modernité, la foi et la culture.

Leurs adversaires, en particulier les tenants de la théologie dialectique, leur reprochent la manière dont ils insistent sur la religion. Ils y dénoncent un alibi par le moyen duquel on fuit le Dieu vivant au bénéfice d'un compromis avec le sacré. Bien qu'un tel grief soit souvent justifié, il reste, en revanche, que le fait de mettre l'accent sur la Parole de Dieu en tant que radicalement différente de toute parole humaine ne résout nullement les questions de l'incarnation de la foi dans le monde actuel, questions auxquelles le protestantisme libéral s'est trouvé affronté.

— Jean-Louis KLEIN

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Pour citer cet article

Jean-Louis KLEIN. PROTESTANTISME LIBÉRAL [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • SABATIER AUGUSTE (1839-1901)

    • Écrit par Émile POULAT
    • 274 mots

    Théologien protestant français. Né dans les Cévennes, en Ardèche, Auguste Sabatier fut pasteur à Aubenas et professeur de dogme réformé à la faculté de théologie de Strasbourg en 1867, d'où il fut expulsé par les Allemands en 1873. Il contribua alors à la création de la faculté de théologie protestante...