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PROTECTORAT

Régime découlant d'une convention entre deux États et se caractérisant généralement par une répartition inégale de leurs compétences. Il est possible de distinguer diverses formes de protectorat : protectorats de droit des gens et protectorats coloniaux. Dans la première forme, deux États de même civilisation, dont l'un est une grande puissance et l'autre une communauté réduite, peuvent conclure un accord par lequel le second se place sous la protection du premier. Ainsi, on peut rapprocher d'un tel statut les États suivants : la république de Saint-Marin, enclave au sein du territoire italien, qui, par les conventions du 28 juin 1897 et du 31 mars 1935, bénéficie de sa protection ; de même, la principauté de Monaco a conclu plusieurs traités avec la France, dont le plus général est celui du 17 juillet 1918, le traité d'amitié protectrice ; des traités ont également été conclus entre la Suisse et la principauté du Liechtenstein.

Quant au protectorat colonial, il se distingue de la colonie dans la mesure où un territoire colonisé subit une administration directe et fait partie intégrante de la métropole, tandis que le territoire sous protectorat conserve, du moins sur le plan interne, une relative autonomie. Il s'agit ainsi d'une autre forme de domination qui, tout en maintenant la structure gouvernementale et administrative locale, permet à une puissance d'exercer certains pouvoirs et certains contrôles. Sur le plan international, l'État protecteur assure toujours la représentation diplomatique et la protection des ressortissants ; il assume seul la responsabilité internationale (en Tunisie, les diplomates accrédités auprès du bey restaient en relation avec le résident général, et les traités étaient passés par le gouvernement français au nom du bey). En fait, le régime du protectorat dépasse souvent les limites qui lui sont assignées en théorie. Ainsi, bien que le régime du protectorat ne prévoie en principe aucune administration directe par l'État protecteur, une ingérence certaine s'est manifestée dans ce domaine, si bien qu'il a fallu avoir recours à la notion de quasi-protectorat ; la France, par exemple, exerçait une administration directe au Laos ainsi qu'en Tunisie et au Maroc. Cependant, cette extension des compétences de la puissance protectrice ne fait pas pour autant de l'État protégé une partie du territoire de cette puissance ; il s'ensuit que la guerre éclatant entre eux n'est pas considérée comme un acte de rébellion mais comme une guerre internationale, et que les sujets de l'État protégé n'acquièrent pas la nationalité de l'État protecteur. Le protectorat est un régime essentiellement évolutif puisqu'il est lié à un rapport de forces pouvant se modifier ; il a le plus souvent constitué, dans sa forme pure, une étape provisoire dans l'histoire de la domination impérialiste. Nombreux sont les territoires sous protectorat qui devinrent des territoires coloniaux ; c'est ainsi que, par un acte unilatéral, la France a annexé Tahiti (loi du 30 décembre 1880) devenu depuis territoire d'outre-mer, et Madagascar (loi du 6 août 1896) devenu territoire d'outre-mer puis, en 1960, république indépendante ; de même, la Corée devint une colonie japonaise par le traité du 22 août 1910. En revanche, d'autres pays ont directement retrouvé leur indépendance : le protectorat britannique sur l'Égypte disparaissait le 28 février 1922 ; Cuba retrouvait son indépendance le 29 mai 1934 (traité abrogeant celui de 1903 établissant un protectorat de caractère perpétuel). Certaines solutions établirent des étapes intermédiaires avant l'indépendance. Dans le cas de la Tunisie, ce pays commença par retrouver son autonomie interne par les conventions franco-tunisiennes du 3 juin 1955, et ce n'est[...]

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Écrit par

  • : professeur de droit international public à l'université d'Évry-Val-d'Essonne

Classification

Pour citer cet article

Patricia BUIRETTE. PROTECTORAT [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AFRIQUE (Histoire) - Les décolonisations

    • Écrit par Marc MICHEL
    • 12 424 mots
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