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BEHRENS PETER (1868-1940)

Né à Hambourg, mort à Berlin, Peter Behrens appartient à la brillante génération d'architectes qui tentèrent de constituer, dans l'Allemagne du début du siècle, une école d'avant-garde. Grâce à la construction de l'usine de turbines de l'AEG, il s'impose comme le pionnier de l'architecture industrielle. Il ne produit pas cependant d'autre ouvrage qui ait marqué de façon décisive la génération suivante. L'absence de continuité stylistique, les ambiguïtés et les incertitudes mêmes qui caractérisent l'ensemble de son œuvre attestent un désir de surmonter les contradictions qui, dans l'Europe industrielle et plus encore en Allemagne, éclataient entre l'apothéose manufacturière de l'exposition de 1889 et les années vingt.

À la recherche d'une architecture

Dans le vaste mouvement européen de l'« art nouveau », l'éphémère Jugendstil rechercha la rupture avec le passé. « Réactionnaire et bourgeois », le mouvement, qui en dernière analyse « se résout en un véritable épiphénomène », ne put, il est vrai, assumer pleinement cette rupture ; du moins stimula-t-il les recherches de cette architecture nouvelle que Behrens prônait résolument.

La carrière d'architecte de Behrens commence avec l'exposition de la Mathildenhöhe à Darmstadt (1901) ; il y réalise sa propre maison, la seule qui ne soit pas construite par Olbrich. Il s'oppose au style raffiné et « pictural » de ce dernier ; il réduit les moulurations et, surtout, établit une liaison entre façade et structure. À l'Exposition internationale de Turin, son hall d'entrée du pavillon allemand est d'une simplicité délibérée : dès 1902, comme Hoffmann et Olbrich, il tourne le dos à l'art nouveau, rejoignant le contre-mouvement amorcé à la fin des années quatre-vingt-dix.

Le refus de l'ornement se manifeste alors par un contrepoint géométrique autour du carré, fondé sur un système rigide des proportions. L'élégance de ce jeu, dans un espace à deux dimensions, reste encore apparentée aux superstructures de l'art nouveau. Du fait de sa formation de peintre et de son orientation vers les arts appliqués, Behrens manifeste, tout comme Van de Velde, une tendance naturelle à l'expression graphique. Le pavillon d'art de l'exposition d'Oldenbourg (1904), la salle de concert des jardins de Flore de Cologne (1906), le crématorium de Delstern dont le panneautage géométrique rappelle San Miniato de Florence, constituèrent sa première production, où l'on note une insistance décorative qui évoque Hoffmann. Pourtant l'architecture de Schinkel, considéré par Behrens comme son père spirituel, constitue pour lui un autre pôle d'attraction. Ce renouveau d'intérêt pour le « classicisme romantique » s'explique et se justifie par un penchant à la rationalité dans la conception de l'édifice, marqué dans les maisons Schröder et Cuno à Eppenhausen près de Hagen (construites respectivement en 1908-1909 et 1909-1910).

Son intuition d'une nouvelle expression doublée d'une volonté de redéfinir l'architecture comme art de construire n'eurent d'autre recours que la reconquête de concepts anciens et la « modernisation » de modèles historiques.

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Pour citer cet article

Luce CAYLA. BEHRENS PETER (1868-1940) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AFFICHE

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 6 817 mots
    • 12 médias
    ..., 1905) – auxquelles on peut rattacher les créations du Suisse Émile Cardinaux – tranchent par leur clarté et leur dépouillement. À partir de 1907, Peter Behrens réalise pour la firme A.E.G. une identité globale qui comporte une remarquable ligne d'affiches présentant les produits de la marque. Au...
  • ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - Architecture et société

    • Écrit par Antoine PICON
    • 5 782 mots
    ...leurs usages. Dans le cadre du Deutsche Werkbund, qui reprend à son compte une partie des orientations des Arts and Crafts, l'architecte allemand Peter Behrens (1868-1940) démontre la possibilité d'établir des relations étroites entre art, architecture et industrie. Ces mêmes relations figureront...
  • DESIGN - (repères chronologiques)

    • Écrit par Stéphane LAURENT
    • 639 mots

    Avril 1751 Parution du premier volume de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert. L'ouvrage défend entre autres les vertus d'une beauté obtenue par une production rationnelle à haut degré de savoir-faire, parfois réalisée en série et existant depuis l'Antiquité (amphores grecques, lampes à huile...

  • GRAPHISME

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 7 454 mots
    • 3 médias
    ..., association vouée à l'amélioration de la qualité des produits industriels, qui rejette « l'ornement comme un crime ». Dans cet esprit, Peter Behrens met en œuvre la première intervention relevant du design global pour la firme Allgemeine Elektricitäts Gesellschaft (A.E.G.). Dès 1907,...
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Voir aussi