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PATHÉ

Le Français Charles Pathé (1863-1957), issu d'une famille de petits commerçants, exploitait le phonographe d'Edison dans les foires de la région parisienne lorsqu'il découvrit le Cinématographe. Intéressé par ce type d'appareil, il finance sans succès les recherches de Henri Joly, avant de signer un accord avec les frères Lumière pour « un projecteur Lumière transformé Pathé ». Avec son frère Émile, il crée Pathé Frères, dont l'activité conjugue la musique et le cinéma, sous un logotype (le coq et sa devise, « Je chante haut et clair ») qui révèle le primat du phonographe au cours des premières années d'exercice, jusqu'en 1906, du moins.

« Le cinéma est le théâtre, l'école et le journal de demain », déclarait Charles Pathé en 1901, quelques années avant de créer un studio de tournage et une fabrique de pellicule, de lancer des actualités cinématographiques, d'aider le cinéma scientifique, mais aussi et surtout de triompher sur le marché du cinéma de distraction, assisté notamment par l'indispensable Ferdinand Zecca. En 1908, Pathé est la plus grande firme cinématographique du monde, exportant vers de nombreux pays et détenant d'importants intérêts aux États-Unis où une alliance stratégique l'associe à Edison et aux principaux producteurs du pays. En France, Pathé affermit son pouvoir en imposant la location de ses films au lieu de la vente au mètre comme il était d'usage, et constitue un circuit de salles présent dans toutes les régions. Hors du pays, l'empire est décentralisé. S'il exporte aux États-Unis, Pathé produit sur place depuis 1910, diffuse Pathe Weekly, et remporte un grand succès avec des serials dirigés par Louis Garnier, comme The Perils of Pauline et The Exploits of Elaine. Bien qu'il n'ait guère participé aux innovations technologiques, Charles Pathé est le premier grand entrepreneur du cinéma de l'ère des pionniers.

La Première Guerre mondiale marque une rupture dans la vie de l'entreprise malgré la poursuite des activités de la filiale américaine. La maison Pathé va développer en 1922 le Pathé-Baby (le cinéma chez soi), puis le Pathé Rural (pour l'exploitation dans les petites salles), qui conquièrent de nouveaux marchés. Mais les filiales étrangères sont cédées (l'américaine sera absorbée par RKO). La branche cinéma est en déclin, contrairement à la branche phonographique qui, dissociée de Pathé-Cinéma en 1918, fusionne avec des concurrents britanniques ; dirigée par Émile jusqu'en 1937, elle sera filialisée par EMI.

Charles a cédé sa société déclinante à Bernard Natan, qui, à partir d'un atelier de tirage de copies, a étendu son activité à la production de films, achetant les studios de Joinville-le-Pont et créant ceux de la rue Francœur, à Paris, aujourd'hui transformés en école de cinéma. Natan constitue un important circuit de salles en France et en Belgique, relance les Actualités Pathé, produit de nombreux films, des comédies populaires mais aussi L'affaire est dans le sac de Pierre Prévert (1932), et des œuvres signées Jean Grémillon, Henri Diamant-Berger, Marcel L'Herbier, Raymond Bernard, Maurice Tourneur, René Clair.

Les difficultés de trésorerie, l'endettement consécutif aux investissements dans les salles, le désintérêt des banques et quelques jongleries financières conduisent à la faillite en 1936. Natan, accusé d'escroquerie, est condamné dans un climat d'antisémitisme (c'est un juif roumain naturalisé). Après un deuxième procès, en 1942, il est livré aux nazis et meurt à Auschwitz. C'est très tardivement que l'on saura reconnaître les mérites de « l'escroc » Natan dans le cinéma des années 1930. La nouvelle société Pathé retrouvera vite la prospérité après la guerre. Production et diffusion sont toujours accompagnées de studios, de laboratoires[...]

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Pour citer cet article

Daniel SAUVAGET. PATHÉ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BIENVENUE CHEZ LES CH'TIS (D. Boon)

    • Écrit par Kristian FEIGELSON
    • 939 mots

    Avec plus de 20 millions d'entrées, Bienvenue chez les Ch'tis a pulvérisé en 2008 le record détenu en 1966 par La Grande Vadrouille, qui en totalisait 17 millions. Quelles sont les conditions d'un tel succès, capable de fédérer des spectateurs de tous âges et de toutes catégories sociales,...

  • CINÉMA ET HISTOIRE

    • Écrit par Jean-Pierre JEANCOLAS
    • 8 291 mots
    • 6 médias
    Une des dernières actualités reconstituées chez Pathé, qui évoque la mutinerie du cuirassé Potemkine au large d'Odessa en juillet 1905, trahit la faillite du genre : avant les tableaux mis en scène sur les plateaux de Vincennes, l'auteur, Lucien Nonguet, a placé un plan d'archives d'un vrai bateau...
  • FRANCE (Arts et culture) - Le cinéma

    • Écrit par Jean-Pierre JEANCOLAS, René PRÉDAL
    • 11 105 mots
    • 7 médias
    ...des films qu'ils leur vendent au mètre. Les frères Pathé sont vite soutenus par des groupes financiers, dont le Crédit lyonnais, qui, en 1897 et 1898, consolide la société familiale Pathé Frères. Les dix années qui suivent sont rythmées par les augmentations du capital de l'entreprise. Pathé fait construire...
  • GAUMONT

    • Écrit par Daniel SAUVAGET
    • 1 138 mots
    Les énormes investissements consentis au cours des années 1990 pour la création de multiplexes fragilisent la société, qui cède du terrain. Elle abandonne la production télévisée en 1999, puis s'associe avec Pathé dans deux activités essentielles : c'est la fusion, en 2000, des deux branches exploitation...

Voir aussi