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PARCOURS (J. Habermas) Fiche de lecture

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Une pensée politique

En laissant à l’arrière-plan les ouvrages majeurs de Habermas qui sont souvent lus de façon isolée, à savoir la Théorie de l’agir communicationnel, De l’éthique de la discussion et Droit et démocratie, Parcours permet de saisir des lignes de continuité entre des écrits très variés et séparés dans le temps. Le rapprochement de certains textes produit des effets de compréhension. De nouvelles clés de lecture apparaissent. C’est l’effet produit en particulier par la publication de Sociologie et théorie du langage (les « conférences Gauss » de 1971)aux côtés de La Pensée postmétaphysique I et IIet d’écrits de théorie politique – parmi lesquels « La souveraineté populaire comme procédure », « De la légitimation par les droits de l’homme » ou encore « La constitutionnalisation du droit international a-t-elle encore une chance ? ». On comprend ainsi que les « conférences Gauss », qui rompent les premières avec la philosophie de la réflexion en se tournant vers la philosophie du langage de Ludwig Wittgenstein et le pragmatisme de George Herbert Mead, ne représentent pas simplement un préalable à la Théorie de l’agir communicationnel. Elles trouvent un écho dans la pensée politique de Habermas en formulant une ontologie sociale fondée sur l’intersubjectivité, qui est au centre de sa vision d’une démocratie fondée sur la discussion et la participation de la société civile.

De la même manière, la publication des deux livres de La Pensée postmétaphysique, rédigés à vingt-cinq ans d’intervalle, à la suite de Sociologie et théorie du langage et d’écrits revenant sur la signification de la théorie de l’agir communicationnel (« Textes philosophiques », les entretiens de 2010 et de 2016) aide à saisir les enjeux du tournant langagier en matière de théorie de la connaissance et de théorie sociale : le passage d’une philosophie du sujet à une philosophie du langage traduit la rupture avec la métaphysique que les mentalités occidentales ont opérée depuis que leur compréhension d’elles-mêmes et du monde ne fait plus appel à des images du monde totalisantes mais aux outils des sciences et de l’argumentation.

Tandis que Parcours 1 (1971-1989) republie des écrits épuisés, Parcours 2 (1990-2017)réunit des textes inédits en langue française. Les réflexions les plus récentes de Habermas sont présentées dans ce deuxième volume. Deux sont à distinguer. Une ligne d’analyse s’intéresse à la religion à partir de la double perspective d’une théorie de la modernité et de la philosophie politique : il s’agit de considérer le legs des religions monothéistes pour la pensée occidentale et, à ce titre, d’encourager le dialogue de la philosophie avec les religions et de rendre plus accessible le débat public aux contenus de sens issus des religions. Par ailleurs, soutenant une transnationalisation de la démocratie, plusieurs essais se penchent sur le nouvel ordre mondial, marqué par un libéralisme hégémonique où la paix est assurée non par le droit mais par le marché : pour le modifier, Habermas insiste sur les conditions de l’unification politique de l’Europe et sur le projet d’un État cosmopolitique qui prendrait appui sur la constitutionnalisation du droit international.

— Isabelle AUBERT

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Écrit par

  • : maître de conférences en philosophie, enseignante-chercheuse

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Isabelle AUBERT. PARCOURS (J. Habermas) - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 03/09/2018