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MAKEBA MIRIAM (1932-2008)

Pour les Africains, elle était la « Mama Afrika », « l'Ancienne », celle que l'on respecte et que l'on vénère, celle qui fut la première à porter la musique des ancêtres sur la scène internationale. Pour le monde entier, elle était l'auteur du fameux tube Pata Pata et l'emblème de la lutte anti-apartheid.

La chanteuse sud-africaine Miriam Makeba a succombé à une crise cardiaque, quelques minutes après avoir quitté la scène, alors que le public l'applaudissait encore, réclamant une nouvelle chanson. C'était en Italie, le 9 novembre 2008, à Castel Volturno, l'un des fiefs de la Camorra, près de Naples. Elle avait soixante-seize ans et participait à un concert de soutien à l'écrivain italien Roberto Saviano, menacé de mort pour avoir écrit Gomorra, le livre sur le crime organisé porté à l'écran par Matteo Garrone.

Née le 4 mars 1932 dans le township de Prospect, près de Johannesburg, d'un père instituteur de l'ethnie Xhosa et d'une mère domestique d'origine Swazi, Miriam Makeba s'essaye au chant dans la chorale de son école méthodiste. À huit ans, elle commence à faire des ménages avec sa mère. Puis elle sillonne le pays avec une formation d'amateurs avant de se joindre, en 1952, au groupe de jazz vocal le plus célèbre à l'époque en Afrique du Sud, les Manhattan Brothers. Elle en deviendra la vedette. Miriam Makeba n'a jamais appris à lire et à écrire la musique. Ce qui ne l'empêchera nullement de composer. Au milieu des années 1950, ses premières chansons – très vite interdites, parce qu'elles célèbrent le passé glorieux du peuple noir – mêlent jazz, musiques interethniques des townships (kwela, mbaqanga) et airs traditionnels. Son style fait fureur dans Sophiatown, le quartier swing de Johannesburg devenu un haut-lieu du jazz sud-africain.

En 1959, sa participation au film anti-apartheid Come Back, Africa, réalisé aux États-Unis par Lionel Rogosin, et au spectacle musical King Kong (qui narre l'histoire d'un boxeur), lui permet de se rendre en Europe et aux États-Unis. En son absence, elle est déchue de la nationalité sud-africaine à cause de ses prises de position anti-apartheid, et elle est contrainte à un exil qui durera trente ans.

Les années 1960 seront les plus glorieuses. Aux États-Unis, elle se produit au Madison Square Garden devant le président Kennedy et prend la parole à la tribune des Nations unies pour dénoncer l'apartheid. Sa rencontre avec le comédien et chanteur de calypso Harry Belafonte – avec qui elle obtiendra un Grammy Award en 1966 pour l'album An Evening with Belafonte/Makeba – sera décisive pour sa carrière internationale ; elle va désormais chanter dans les salles les plus prestigieuses.

Après deux divorces (notamment d'avec le trompettiste sud-africain Hugh Masekela), elle épouse en 1969 Stokely Carmichael, dirigeant du mouvement afro-américain des Black Panthers. Ce mariage lui vaudra d'être inquiétée par le F.B.I., ce qui la conduira à préférer un nouvel exil, dans la Guinée indépendante de Sékou Touré cette fois. Elle y enregistrera plusieurs disques d'inspiration mandingue, mais restera coupée des grands circuits du show-business. Après un nouveau divorce, la chanteuse vit alors ses années les plus sombres, marquées par la pauvreté et la dépression. À la suite du décès, en 1985, de sa fille Bongi, elle aussi chanteuse, elle s'installe à Bruxelles, où elle obtiendra le titre de citoyenne d'honneur de dix pays, parmi lesquels la France.

Sa renommée mondiale rebondit enfin avec sa participation, en 1987, à l'album Graceland de Paul Simon. Trois ans plus tard, elle rentre en Afrique du Sud. Là, elle créera en 1995 un centre pour jeunes femmes victimes de violences. En 1999, lors d'un de ses derniers concerts en France, à l'Olympia, qu'elle[...]

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Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Éliane AZOULAY. MAKEBA MIRIAM (1932-2008) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • WORLD MUSIC ET MUSIQUES DU MONDE

    • Écrit par Eugène LLEDO
    • 900 mots
    • 2 médias

    La world music est un concept « fourre-tout » qui correspond à la médiatisation de formes populaires d'expressions musicales, ces dernières étant elles-mêmes liées à des traditions ancestrales. Permettant l'exposition commerciale de musiciens qui eurent longtemps du mal à trouver des circuits de diffusion...

Voir aussi