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LAMBERT JOHANN HEINRICH (1728-1777)

Mathématicien, astronome, physicien et philosophe suisse et allemand d'ascendance française. Né à Mulhouse, qui faisait alors partie de la Suisse, Johann Heinrich Lambert, dès l'âge de douze ans, quitte l'école pour aider son père qui était tailleur tout en continuant seul ses études, donnant ainsi l'exemple, rare dans la science, d'un autodidacte complet. Il est alors employé aux écritures, puis, à partir de sa dix-septième année, secrétaire bibliothécaire à Bâle. Devenu en 1746, pour une dizaine d'années, précepteur des fils de l'importante famille von Salis à Coire (Grisons), il publie ses premiers travaux qui sont remarqués par Daniel Bernoulli et le font connaître du milieu scientifique européen. Il noue alors des relations durables avec de nombreux savants de son époque, dont Leonhard Euler, avec qui il est en correspondance dès 1758. À partir de 1765, il est membre appointé de la célèbre Académie des sciences de Berlin. Jusqu'à sa mort à Berlin, il produira plus de cent cinquante publications.

L'ouvrage philosophique principal de Lambert est son Neues Organon (Leipzig, 1764). Par ses idées philosophiques, Lambert appartient au courant issu du programme leibnizien de la mathesis universelle. Il étudie les conditions auxquelles il faut soumettre la connaissance pour qu'elle jouisse du même degré de précision et d'évidence que la connaissance mathématique. Il tente de créer un ars characteristica combinatoria, calcul logique ou conceptuel qui comprendrait le calcul des probabilités. Dans la partie la plus originale de son ouvrage, intitulée Phänomenologie, il discute des apparences fausses, ou subjectives, et donne des règles pour les distinguer des apparences vraies (ou objectives). En 1771, Lambert publie son second ouvrage philosophique, Anlage zur Architectonik, dans lequel il tente une construction mathématique, qui soit valable à la fois logiquement et métaphysiquement du corpus scientifique à partir d'un ensemble primitif de concepts.

L'intérêt de Lambert pour l'astronomie fut éveillé par l'apparition de la fameuse comète de 1744, et il a laissé son nom à un théorème géométrique qui fut ensuite démontré analytiquement par Louis de Lagrange et le marquis de Laplace. Mais on retiendra surtout ici ses Kosmologische Briefe (1761) où, à partir de remarques relatives aux mouvements de Saturne et de Jupiter, il développe à propos de la Voie lactée une hypothèse cosmologique : il existe des forces en dehors de notre système planétaire, qui est lui-même une partie d'un autre système, lui-même partie d'un système d'ordre plus élevé, etc. Lambert croyait également à l'existence d'une multitude de mondes habités.

Les préoccupations philosophiques et méthodologiques de Lambert apparaissent clairement dans la mathématisation de la notion d'intensité lumineuse qu'il donne dans sa Photometria (1760) : il décrit son photomètre et propose la loi d'absorption de la lumière dite « loi de Lambert ». En tentant de faire des mesures précises dans ses investigations scientifiques, il a développé une théorie des erreurs qui en fait le précurseur de Gauss. Il est aussi, avec Leonhard Euler et Daniel Bernoulli, le fondateur de la statistique démographique. En cartographie, il a proposé plusieurs systèmes de projections dont l'un porte son nom (projection conique de Lambert). Son ouvrage Die freye Perspektive (1759), destiné à l'artiste désireux de donner un effet de perspective à son dessin, est un chef-d'œuvre de géométrie descriptive.

En mathématiques pures, le résultat le plus célèbre de Lambert est sa démonstration de l'irrationalité de e (déjà connue depuis Euler, 1737) et surtout de π, premier pas vers une réponse à l'impossibilité de la quadrature du cercle. Lambert se propose de montrer que[...]

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Écrit par

  • : docteur en histoire des cultures, des savoirs et de l'éducation

Classification

Pour citer cet article

Jeanne PEIFFER. LAMBERT JOHANN HEINRICH (1728-1777) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • OBJET

    • Écrit par Gilles Gaston GRANGER
    • 8 211 mots
    ...un courant de pensée qu'on pourrait qualifier, en un sens large, d'« intuitionniste », la non-contradiction n'est pas le critère approprié. Chez J. H.  Lambert, contemporain de Kant, la Gedenkbarkeit (capacité d'être pensé) est, en particulier pour les concepts représentant des objets simples, une ...
  • PHÉNOMÈNE

    • Écrit par Jean-Paul DUMONT
    • 3 347 mots
    Le mot de phénoménologie, sans doute créé par J. H. Lambert (Neues Organon, 1764), signifie théorie de l'apparence. La conclusion de Lambert est que le monde des corps ne se montre à nous que comme une apparence. La formule précédait de dix-sept ans la première édition de la Critique...
  • PHÉNOMÉNOLOGIE

    • Écrit par Renaud BARBARAS, Jean GREISCH
    • 7 242 mots
    • 2 médias

    « Pour une part essentielle, la phénoménologie assume, en notre siècle, le rôle même de la philosophie » (Jean-Luc Marion). Si elle a pu assumer ce rôle, c'est grâce à l'œuvre de Husserl. L'expression elle-même fut forgée par Johann Heinrich Lambert (1728-1777) pour désigner...

Voir aussi