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CHAMPOLLION JEAN-FRANÇOIS (1790-1832)

Un peu avant midi, le 14 septembre 1822, Jean-François Champollion fait irruption dans le bureau de son frère Jacques-Joseph dans la bibliothèque de l'Institut de France et déclare triomphant : « Je tiens l'affaire. » La tradition veut que le déchiffreur de la langue égyptienne tombe sans connaissance, épuisé par ses recherches, et ne reprenne conscience qu'au bout de cinq jours. Le 27 septembre est officiellement lue la lettre, signée du 22, qu'il a rédigée à l'intention de « Monsieur Dacier, secrétaire perpétuel de l'Académie des inscriptions et belles-lettres relative à l'alphabet des hiéroglyphes phonétiques employés par les Égyptiens pour inscrire sur leurs monuments les titres, les noms et les surnoms des souverains grecs et romains ».

Le déchiffrement, lointain prolongement de l'expédition d'Égypte

Jean-François Champollion - crédits : Erich Lessing/ AKG Images

Jean-François Champollion

Ainsi vingt-trois ans après sa découverte lors de l'expédition d'Égypte, en juillet 1799, par le capitaine Bouchard, la pierre de Rosette, dalle de basalte portant un décret trilingue (en hiéroglyphes, en démotique et en grec) aujourd'hui conservée à Londres, au British Museum, répond aux espoirs qu'elle a immédiatement suscités. En démontrant que le système hiéroglyphique comprend non seulement des idéogrammes, mais aussi des signes phonétiques, le jeune savant, qui sait que son hypothèse vaut pour l'ensemble des textes égyptiens, fournit la clé du déchiffrement d'une langue tombée dans l'oubli depuis quelque quinze siècles. En dépit de sa célébrité cependant, le rôle de la Pierre est plus symbolique que réel ; seule l'énorme documentation réunie par Champollion, toutes époques confondues, lui a permis de devancer celui qui fut son rival le plus acharné dans la compétition engagée pour la lecture de la stèle, le médecin et physicien britannique Thomas Young.

Jean-François Champollion va alors sur ses trente-deux ans et ne connaîtra, en raison de sa mort précoce, qu'une brève carrière après ce premier et éclatant succès. Né le 23 décembre 1790 à Figeac dans le Lot, l'enfant avait rejoint, à l'âge de onze ans, à Grenoble son aîné Jacques-Joseph, mentor avisé et parfois oppressant qui se fera plus tard le gardien vigilant de sa mémoire. Déjà féru de culture classique, Jean-François dut sa passion pour la civilisation des pharaons à la fréquentation des anciens de l'expédition d'Égypte, amis du préfet de l'Isère, Joseph Fourier, qui fut lui-même membre de la commission des savants ayant accompagné en 1798 l'armée de Bonaparte. En 1807, celui que son entourage appelait Seghir (« petit » en arabe), tant son rêve l'absorbait, vint à Paris parfaire sa formation d'orientaliste. Dans le temps libre que lui laissaient ses cours d'hébreu, d'arabe, de persan, de syriaque et de chaldéen, il consultait les manuscrits coptes de la Bibliothèque impériale, ayant très tôt compris que la maîtrise de cette langue était indispensable à son projet. De 1809, date de son retour à Grenoble où il fut nommé professeur adjoint d'histoire ancienne à la faculté des lettres, à 1821, année de son installation définitive à Paris, Champollion, quoique tout entier tendu vers son objectif, fut aussi pris dans la tourmente des événements qui bouleversaient alors la France. Le ralliement des deux frères à l'Empereur lors des Cent-Jours (1815) leur valut l'hostilité des ultras de la ville et les contraignit même un temps à se réfugier à Figeac.

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Écrit par

  • : maître de conférences à l'université de Paris-IV-Sorbonne, docteur d'État

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Jean-François Champollion - crédits : Erich Lessing/ AKG Images

Jean-François Champollion

Cartouches royaux dessinés par Champollion - crédits : Renaud de Spens

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