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CHARDONNET HILAIRE DE (1839-1924)

Chimiste et ingénieur français, Hilaire de Chardonnet (de son vrai nom Louis-Marie Hilaire Bernigaud, comte de Chardonnet) a mis au point en 1884 un procédé original pour fabriquer de la soie artificielle à partir de nitrocellulose et en a assuré la production industrielle, faisant de lui le père des textiles artificiels.

La science au secours de l’industrie de la soie

Issu d’une famille paternelle légitimiste de la région de Chalon-sur-Saône, anoblie sous la Restauration, et d’une famille maternelle bisontine, Hilaire de Chardonnet est né le 1er mai 1839 à Besançon. Après un baccalauréat obtenu à l’âge de seize ans et des études scientifiques dans sa ville natale, il est admis à l’École polytechnique en 1859. À sa sortie, il refuse d’entrer à l’École des ponts et chaussées pour ne pas avoir à prêter serment de fidélité au second Empire. Par curiosité scientifique, il s’intéresse d’abord à la lumière et à l’optique, ainsi qu’aux techniques émergentes, comme le téléphone, mais il va orienter définitivement la suite de ses travaux sur la question de la maladie des vers à soie, puis sur celle des textiles artificiels. Chargé d’une étude sur l’état de la sériciculture (élevage de vers à soie) dans la vallée du Rhône, il se rend en région lyonnaise en 1865 et y découvre l’univers de la soie auprès du baron Ferdinand de Ruolz (1810-1875), dont il épousera la fille. Les origines sociales de Chardonnet nourrissent encore en lui quelques ambitions politiques, mais il y renoncera par la suite, préférant se passionner pour les questions scientifiques et industrielles.

Lors de son passage par Lyon, il est fortement sensibilisé au problème de la pébrine, cette maladie qui met à mal la sériciculture et menace toute l’industrie de la soie. Du côté des sériciculteurs, on fait appel au monde scientifique pour éradiquer la maladie. Louis Pasteur, invité dès 1865 à se pencher sur la question, installe une magnanerie (bâtiment d’élevage des vers à soie) près d’Alès (Gard) pour étudier la transmission de la maladie et trouver des remèdes. Chardonnet pense, de son côté, qu’il faudrait mettre au point un substitut au fil produit par le bombyx du mûrier. Cette idée de réaliser un fil artificiel lui serait venue en manipulant du collodion, utilisé alors en photographie : ce matériau visqueux, issu de la nitrocellulose, se serait étiré en minces fils lors d’une expérience. Dès lors, Chardonnet ne cessera de poursuivre ses travaux en vue de mettre au point une méthode de fabrication d’un fil artificiel à base de collodion, dans le laboratoire de la faculté des sciences de Besançon et dans ceux qu’il a installés dans ses diverses propriétés. C’est dans sa résidence de Gergy, en Saône-et-Loire, qu’il parvient à fabriquer le premier fil artificiel en juillet 1883. Il dépose le 6 mai 1884 à l’Académie des sciences un pli cacheté pour une « matière textile ressemblant à la soie ». Lors de la séance du 7 novembre 1887, le pli est ouvert à la demande de l’inventeur et les académiciens y découvrent la recette pour fabriquer des fibres à base de cellulose, d’alcool et d’éther. Chardonnet dépose une dizaine de brevets entre 1884 et 1893, en France ainsi qu’en Allemagne.

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Écrit par

  • : conservateur en chef honoraire du patrimoine

Classification

Pour citer cet article

Bruno JACOMY. CHARDONNET HILAIRE DE (1839-1924) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Machine à filer la soie artificielle de Hilaire de Chardonnet - crédits : Catalogue du musée, Section T, Industries textiles, teintures et apprêts, Conservatoire national des arts et métiers, 1942.

Machine à filer la soie artificielle de Hilaire de Chardonnet

Autres références

  • MATÉRIAUX

    • Écrit par François DAGOGNET
    • 6 626 mots
    ...La route vers les « matériaux synthétiques » est ponctuée d'imprévus et de détours. Nous ne pouvons pas ne pas évoquer ici la démarche insolite du comte de Chardonnet qui le conduit vers « la soie artificielle » à la suite de fausses évaluations. Les élevages de « vers à soie » sont décimés par la...
  • PLASTIQUES

    • Écrit par Pierre LASZLO
    • 4 109 mots
    Hilaire de Chardonnet (1839-1924) inventa la viscose en 1884, par réaction du sulfure de carbone sur de la cellulose, préalablement traitée par de la soude. Le procédé, breveté par des Anglais en 1892, fut industrialisé au début des années 1920 pour produire des fibres textiles de ce nom.
  • TEXTILE

    • Écrit par Eugène AMOUROUX, Jean-Yves DRÉAN, Claude FAUQUE, André PARISOT, Marc RENNER, Richard A. SCHUTZ
    • 23 437 mots
    • 3 médias
    ...de la satisfaire. D'autant plus que la soie connaît depuis 1845 un désastre provoqué par la pébrine, cette maladie du ver à soie. Dans ce contexte, le comte Hilaire de Chardonnet (1839-1924) va consacrer sa vie de scientifique à la mise au point de la soie artificielle. Il présente à l'Académie des sciences...

Voir aussi