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LEBESGUE HENRI (1875-1941)

Mathématicien et professeur

Né à Beauvais, d'une modeste famille (son père, typographe, mourut très jeune), Henri Lebesgue, de santé fragile, resta très simple, secourable à tous, cachant, sous un masque d'ironie, une extrême sensibilité et une grande bonté. Il fut élève de l'École normale supérieure (1894), docteur ès sciences (1902), professeur aux universités de Rennes, de Poitiers, puis de Paris, professeur au Collège de France (1921), membre de l'Académie des sciences (1922) et de nombreuses académies étrangères. Il devait mourir dans le Paris occupé de juillet 1941.

Critique insatisfait, considérant les problèmes les plus classiques comme ouverts, cherchant les raisons du succès ou de l'insuccès des méthodes, tout était pour Lebesgue l'occasion d'innombrables trouvailles, objets d'environ 140 articles de revue, soit simples énoncés curieux, tel cet équivalent de l'axiome d' Euclide (Tout triplet de points peut être entouré d'un quadrilatère), soit aperçus pouvant renouveler une théorie : calcul des variations, problème de Dirichlet, étude des polyèdres. Soucieux de la formation des maîtres du second degré et de ses élèves de l'École normale supérieure de Sèvres, il prépara la publication d'exposés originaux de questions élémentaires.

Lebesgue avait conscience de la démarche de sa pensée et considérait comme de son devoir de professeur de la dévoiler. Trois exemples sont particulièrement célèbres.

À l'origine de sa note révolutionnaire : « Quelques surfaces non réglées applicables sur un plan » (1898) fut sa réaction de jeune normalien à qui l'on démontrait que les surfaces applicables sont toutes développables : « Je me suis dit : il y a des boîtes ! » et il montrait dans son poing un mouchoir froissé.

À la même date, les démonstrations du théorème de Weierstrass sur les développements en série de polynômes lui semblent « plus savantes que ne l'exige la nature élémentaire de la question ». Il suffit de considérer |x|. Or sa représentation est approchée par celle d'un arc d'hyperbole, mais il faut déplacer l'origine... D'où la méthode devenue classique dont l'idée sera utilisée par les beaux travaux de C. de La Vallée-Poussin, S. Bernstein, H. Stone.

C'est un peu plus tard qu'en construisant une cloison dans une maison de village il aperçoit la vraie nature du problème de la dimension : « Dans notre espace à trois dimensions, on ne peut éviter qu'il y ait des points communs à quatre briques ! » et c'est une voie nouvelle qui s'ouvre.

Points de départ très concrets donc, en accord avec la forme géométrique qu'il aime donner à ses raisonnements et avec l'étonnante simplicité des énoncés obtenus au prix d'intuitions géniales et de raisonnements d'une grande subtilité.

Lebesgue fut conduit naturellement à intervenir dans les controverses sur les fondements des mathématiques, sur le transfini, l'axiome du choix. Il participa ainsi à la création qu'il préconisait d'une philosophie de la mathématique qui soit l'œuvre des mathématiciens et d'où l'homme ne soit pas absent.

— Lucienne FÉLIX

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Pour citer cet article

Lucienne FÉLIX. LEBESGUE HENRI (1875-1941) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • BAIRE RENÉ-LOUIS (1874-1932)

    • Écrit par
    • 332 mots

    Les travaux du mathématicien français René-Louis Baire portent principalement sur la théorie des fonctions de variables réelles. Ancien élève de l'École normale supérieure, Baire enseigna d'abord à l'université de Montpellier. En 1905, il vint faire au Collège de France ses célèbres ...

  • LUZIN NIKOLAÏ NIKOLAÏEVITCH (1883-1950)

    • Écrit par
    • 849 mots

    Mathématicien russe. Né à Tomsk, le 9 décembre 1883, Nikolaï Luzin poursuit ses études secondaires dans cette ville jusqu'en 1901, puis part pour Moscou étudier les mathématiques à l'université, sous la direction de D. F. Egorov. En 1906, il est à Paris où il suit les cours de la Sorbonne...

  • MESURE, mathématique

    • Écrit par
    • 1 309 mots
    ...1893, la seconde étape décisive vers la théorie moderne, lorsqu'il étend le concept peanien à celui d'étendue, couvrant déjà un champ bien plus vaste. Mais les véritables créateurs de ce qui est aujourd'hui la mesure sont ses cadets : Émile Borel, vers 1898, et surtout Henri Lebesgue en 1901....
  • RADON JOHANN (1887-1956)

    • Écrit par
    • 423 mots

    Pensée abstraite et pouvoir d'adaptation fondé sur l'intuition géométrique, tel est le double talent mathématique de l'Autrichien Johann Radon, qui est aussi bien capable de créer une théorie générale ou de traiter un problème particulier.

    Né à Tetschen (Bohême), Johann...