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BATY GASTON (1885-1952)

Troisième homme du « Cartel », Gaston Baty fut un technicien sensible et intelligent de cette machine à jouer qu'est le théâtre. Il débute en 1919 au cirque d'Hiver en assistant Firmin Gémier dans une de ses mises en scène populaires. En 1921, il crée sans grand succès L'Annonce faite à Marie de Paul Claudel. Il fonde alors les Compagnons de la chimère, avec lesquels il erre de théâtre en théâtre en passant par une baraque de Saint-Germain-des-Prés. En 1924, grâce à sa mise en scène, l'un de ces textes qu'il aimait pour leur docilité rencontre un succès international : on a oublié depuis lors la Maya de Simon Gantillon, mais non l'un des premiers metteurs en scène à vouloir choisir ce qu'une œuvre avait à dire et ce qu'il avait, par elle, à nous dire. Il s'installe rue de la Gaîté, au théâtre Montparnasse, en 1931. C'est là qu'il va drainer ses fidèles. Au nom du drame intégral, Baty se révèle méfiant à l'endroit de la littérature, affirmant l'égalité du metteur en scène et du décorateur avec l'auteur, voire la supériorité sur le texte des éléments matériels du spectacle. Il assure jouer tout le texte, mais aussi plus que le texte. Sa recherche du spectacle de l'au-delà du texte le conduira à créer beaucoup d'œuvres mineures. Il s'est attaché quelquefois à « traduire » des classiques : ses représentations de Phèdre, d'Hamlet, des Caprices de Marianne, du Malade imaginaire furent des manières de scandale. Il avait voulu, par exemple, recréer la dernière représentation du Malade imaginaire par Molière, montrant l'auteur face à l'angoisse de la mort. Théoricien et réformateur du théâtre, Gaston Baty s'est toujours attaché à une certaine perfection formelle (ses éclairages étaient dignes des meilleures réalisations allemandes) ; il a eu avec lui d'excellents acteurs : Lucien Nat et surtout Marguerite Jamois. À sa science de la scène comme à son goût pour la liberté dramatique il a manqué un peu de force. La sensibilité de l'homme avait rendu l'intelligence solitaire. « De nos sens à notre âme, il est des sentiers secrets que ne croise pas la route de l'intelligence », disait-il. Mais ce maître du théâtre de l'entre-deux-guerres avait encore la force de créer en juin 1944, dans le Paris troublé par le bruit de la bataille, un Théâtre des marionnettes à la française ; son castelet représentait une réduction de la scène du théâtre Montparnasse, appelé aujourd'hui Montparnasse-Gaston-Baty.

— Armel MARIN

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Écrit par

  • : metteur en scène, conseiller en éducation populaire et techniques d'expression

Classification

Pour citer cet article

Armel MARIN. BATY GASTON (1885-1952) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CARTEL, théâtre

    • Écrit par Pierre-Aimé TOUCHARD
    • 2 015 mots
    • 1 média
    À première vue, Dullin, Jouvet, Baty et Pitoëff éprouvaient surtout, dans leur activité quotidienne, le sentiment de leurs divergences. Si Dullin et Jouvet avaient été, l'un et l'autre, disciples de Copeau, Dullin défendait un théâtre où le sens de l'action dramatique l'emportait sur le respect...
  • GÉMIER FIRMIN (1869-1933)

    • Écrit par Armel MARIN
    • 454 mots

    En 1903, Péguy publie dans ses Cahiers une série d'articles de Romain Rolland sous le titre : « Le théâtre du peuple, essai d'esthétique d'un théâtre nouveau ». C'est le temps de Gémier. Ancien comédien d'Antoine et de Lugné-Poe, grand animateur qui se situe...

  • THÉÂTRE OCCIDENTAL - La scène

    • Écrit par Alfred SIMON
    • 10 045 mots
    • 7 médias
    Auprès des superingénieurs de la grande machinerie constructivo-expressionniste, les metteurs en scène du Cartel ( Dullin, Jouvet, Baty, Pitoëff), dans leurs petits théâtres vétustes, avec leurs pauvres moyens, font l'effet d'artisans de village. Ce serait pourtant céder à l'autodénigrement que de...

Voir aussi